Avec la demande d’un important actionnaire de Gildan de tenir une assemblée extraordinaire, le conseil d’administration du fabricant montréalais de vêtements n’aura d’autre choix que de convoquer prochainement les actionnaires pour les faire voter sur le retour en poste de l’ex-PDG Glenn Chamandy et l’élection d’administrateurs.

C’est du moins l’avis de l’analyste Martin Landry, de la firme Stifel/GMP.

L’actionnaire institutionnel américain Browning West a fait savoir mardi qu’il demande la tenue, sans délai, d’une assemblée extraordinaire des actionnaires pour reconstituer la majorité du conseil d’administration de Gildan.

Martin Landry dit comprendre que le conseil dispose de 21 jours pour répondre et fixer la date de l’assemblée.

Si le conseil ne convoque pas d’assemblée extraordinaire, il croit que Browning West pourrait amener Gildan devant les tribunaux pour forcer la tenue d’une assemblée.

« La jurisprudence suggère que les chances sont en faveur de Browning West. Il existe donc un scénario selon lequel une assemblée extraordinaire pourrait être convoquée dans les trois prochains mois », dit-il.

Si le conseil d’administration de Gildan devait utiliser des tactiques pour retarder la tenue d’une assemblée, les administrateurs de Gildan pourraient perdre la confiance des investisseurs, selon Martin Landry.

Browning West soutient avoir appris que le conseil considère employer des tactiques extrêmes en reportant la prochaine assemblée annuelle des actionnaires et toute assemblée extraordinaire demandée jusqu’à l’automne.

Browning West dit aussi craindre que le conseil devance la date d’entrée en fonction de Vince Tyra (actuellement prévue le 12 février), le successeur désigné de Glenn Chamandy, et estime troublant que le conseil tente délibérément de diminuer les résultats et les perspectives de croissance de l’entreprise.

Il n’a pas tout de suite été possible d’obtenir une réaction chez Gildan.

Glenn Chamandy a été destitué de son poste de PDG le 10 décembre. Le conseil avait justifié sa décision par des divergences liées au plan de succession et en soulignant que Glenn Chamandy souhaitait aller de l’avant avec une stratégie d’acquisitions risquée de plusieurs milliards de dollars.

Browning West a élargi sa liste de candidats au poste d’administrateur et souhaite maintenant remplacer 8 des 11 administrateurs. Les départs souhaités sont ceux de Donald Berg, Maryse Bertrand, Marc Caira, Shirley Cunningham, Charles Herington, Luc Jobin, Craig Leavitt et Chris Shackelton.

Browning West propose d’installer au conseil Glenn Chamandy, l’ex-PDG de United Rentals, Michael Kneeland, un ex-dirigeant de Nike, Michener Chandlee, le chef des finances du CN, Ghislain Houle, l’ex-présidente de Mobilia, Mélanie Kau, le cofondateur de Browning West, Peter Lee, une ex-dirigeante de Walmart, Karen Stuckey et le chef des finances de Rona, J. P. Towner.

Pour Browning West, qui dit détenir une participation approximative de 5 % dans Gildan, il est essentiel de tenir une réunion spéciale rapidement, car avec chaque jour qui passe, l’incertitude risque de causer des dommages permanents aux parties prenantes de Gildan.

Martin Landry affirme que cette saga n’est malheureusement bénéfique pour aucune des parties prenantes et que les allégations dévoilées publiquement par le conseil et par Glenn Chamandy pourraient laisser des cicatrices qui pourraient prendre beaucoup de temps à guérir. « Il y aura beaucoup d’explications à donner pour restaurer la confiance des investisseurs », dit-il.

Une dizaine d’actionnaires institutionnels contrôlant environ 35 % des actions de Gildan ont publiquement exprimé leur opposition au congédiement de Glenn Chamandy depuis un mois.

Réplique de Chamandy

Sans réfuter les allégations formulées lundi à son endroit dans une lettre ouverte publiée par le conseil, Glenn Chamandy s’est dit déçu et offusqué. La lettre ouverte mentionnait qu’il s’est désengagé graduellement à titre de chef de la direction, se concentrant davantage sur ses activités personnelles extérieures, dont l’aménagement d’un centre de villégiature de golf à la Barbade.

« Je suis profondément déçu par les actions du conseil d’administration », affirme-t-il dans une déclaration publique présentée mardi.

« Je suis offusqué par ce qui semble être un effort prémédité pour miner publiquement mon bilan et, ce qui est encore pire d’un point de vue d’entreprise, c’est que le comportement négligent du conseil ternit également la réputation d’une grande société. »

Glenn Chamandy soutient que les motivations « intéressées » du conseil d’administration, conçues pour détourner l’attention de ses propres imprudences, l’ont conduit à perdre de vue ce qui est vraiment important : l’intérêt supérieur de la société, de ses employés, de ses clients et de ses actionnaires.

« Je trouve particulièrement navrant que le conseil d’administration ait décidé d’utiliser à des fins néfastes des informations stratégiques confidentielles dans le seul but d’ancrer son pouvoir, sans se soucier de l’impact sur la valeur de l’entreprise. »

En fin de journée mardi, le titre de Gildan se situait à 42,12 $ (+0,12 %).

Les 11 membres actuels du conseil d’administration de Gildan

  • Donald Berg (président)
  • Maryse Bertrand
  • Dhaval Buch
  • Marc Caira
  • Shirley Cunningham
  • Sharon Driscoll
  • Charles Herington
  • Luc Jobin
  • Craig Leavitt
  • Anne Martin-Vachon
  • Chris Shackelton