(Ottawa) Cineplex pratique une « tarification au goutte-à-goutte » préjudiciable avec ses frais de réservation en ligne, et les cinéphiles n’ont aucun moyen de les éviter, a soutenu le commissaire de la concurrence du Canada.

Un avocat représentant le commissaire a fait valoir cette position mercredi alors que le Tribunal de la concurrence entend les arguments dans l’affaire contre le géant du cinéma.

Cineplex soutient que les clients peuvent acheter leurs billets en personne au cinéma, mais le commissaire affirme que ce n’est pas une véritable alternative, car il s’agit de deux services distincts.

« Le fait que le client puisse abandonner son achat, se rendre au cinéma et acheter un billet signifie-t-il que les frais ne sont pas obligatoires ? La réponse est non », a affirmé l’avocat Jonathan Hood.

Il a fait valoir que les clients n’ont d’autre choix que de payer les frais pour finaliser l’achat.

Une tarification au goutte-à-goutte, également connue sous le nom de frais indésirables, est une pratique trompeuse dans laquelle les clients sont attirés par un achat sans divulgation complète du coût final.

Cineplex facture des frais supplémentaires de 1,50 $ au prix de chaque billet acheté en ligne, mais les membres Scène+ bénéficient d’un rabais et les membres CinéClub sont dispensés des frais.

L’entreprise a empoché près de 40 millions grâce aux frais de réservation en ligne depuis qu’elle les a mis en place en juin 2022.

Le même mois, la Loi sur la concurrence reconnaissait explicitement l’indication de prix partiels comme une pratique commerciale préjudiciable.

Le Bureau de la concurrence affirme que les charges ou frais fixes supplémentaires représentent une pratique fausse ou trompeuse aux termes de la loi, à moins qu’ils ne soient imposés par le gouvernement, comme la taxe de vente.

Pour sa part, Cineplex soutient que l’affaire est sans fondement. Il mentionne que les frais ne sont pas trompeurs, que les informations concernant les frais sont clairement indiquées sur son site web et que les frais sont facultatifs.

Le commissaire à la concurrence affirme que les tarifs sont trompeurs, car les cinéphiles ne voient pas le prix total d’un billet de cinéma sur la toute première page qu’ils consultent lorsqu’ils achètent des billets.

Les tarifs sont plutôt divulgués « en dessous de la ligne de flottaison » ou hors de l’écran pour la grande majorité des cinéphiles, induisant ainsi les gens en erreur sur le prix final qu’ils paieront.

« Les consommateurs sont crédules. Ils sont prêts à croire les premières indications du prix des billets qu’ils peuvent voir à l’écran », a fait valoir M. Hood.

« Le consommateur est inexpérimenté pour détecter les mensonges ou les subtilités des indications commerciales », a-t-il ajouté.

Selon l’avocat, les consommateurs « ne prêteront pas particulièrement attention au sous-total pour voir s’il correspond au prix des billets ». Il a indiqué que les clients ne vont pas non plus faire défiler le site web « parce que Cineplex ne leur donne aucune raison de le faire ».

L’avocat de Cineplex, Robert Russell, a répondu à ces points mercredi après-midi, affirmant que le défilement ne devrait pas être un problème dans cette affaire, car il fait partie intégrante de l’utilisation d’un ordinateur ou d’un téléphone intelligent.

« On va en parler dans le monde des affaires comme de l’affaire “du défilement”, par la manière dont elle est présentée à ce tribunal, a-t-il lancé. Vous ne pouvez pas utiliser une application sur votre téléphone sans la faire défiler. Vous ne pouvez pas lire votre courrier électronique sans », a fait remarquer M. Russell. « C’est ridicule que cela soit un facteur dans cette affaire. »

Me Russell a également soutenu que les prix affichés sur le site internet sont « accessibles » pour les consommateurs.

Cineplex affiche deux prix totaux sur son site internet, l’un pour l’achat en personne et l’autre pour les billets en ligne, a-t-il affirmé.

Me Russell a souligné que près de la moitié des consommateurs choisissent d’acheter leurs billets dans l’enceinte du cinéma.