La reprise de l'économie mondiale a déjà perdu de sa vigueur et, après la crise européenne de la dette, ce sont désormais des perspectives américaines en demi-teinte, des chiffres japonais décevants et un relatif ralentissement chinois qui semblent menacer la croissance.

«La reprise mondiale se poursuit, mais elle a perdu une partie de son élan», a déclaré à l'AFP Rob Dobson, économiste de la société Markit.

Selon lui, même si ce n'est pas le scénario le plus probable, «il existe toujours un risque potentiel que certaines régions rechutent dans la récession», alors que la planète sort de sa plus grave crise économique depuis l'après-guerre.

La bonne performance de la zone euro, qui a enregistré au deuxième trimestre une meilleure croissance que les États-Unis (1% contre 0,6% par rapport aux trimestre précédent), doit être relativisée, estiment les analystes.

D'abord, car «la reprise avait commencé plus tôt Outre-Atlantique, mais structurellement la croissance reste plus faible en Europe qu'aux États-Unis», relève Benjamin Carton, du Centre français d'études prospectives et d'informations internationales (Cepii).

Ensuite, poursuit Cédric Tille, de l'Institut de hautes études internationales et de développement de Genève, parce que la zone euro doit en grande partie sa croissance à l'Allemagne, «dont l'économie avait fortement chuté en raison de son intégration au commerce mondial et qui ne fait que rattraper le chemin perdu».

Le net ralentissement annoncé lundi de l'économie japonaise, qui n'a progressé que de 0,1% au deuxième trimestre et a vu la Chine lui rafler la place de deuxième puissance économique mondiale au cours de la même période, apporte en revanche de l'eau au moulin des pessimistes.

Nouriel Roubini, professeur à l'Université de New York et Cassandre de l'économie mondiale, jugeait récemment de son côté que «les risques d'une nouvelle récession aux États-Unis» étaient «passés de 25% à plus de 40% ces temps-ci».

«Il est certain qu'en raison de son endettement et du fort taux de chômage, le consommateur américain n'est plus en mesure d'être le moteur de la croissance mondiale», explique Benjamin Carton.

Or, Eswar Prasad, de la Brookings Institution, note que «les économies qui s'en sortent le mieux, comme la Chine et l'Allemagne, sont très dépendantes des exportations» et donc du dynamisme de la demande chez leurs partenaires commerciaux. Selon cet économiste, «la création d'emplois, notamment aux États-Unis, est donc la principale clé de la reprise». Et sa faiblesse actuelle «laisse présager une croissance molle pour la fin de l'année».

Pour les années suivantes, les incertitudes sont très fortes, affirme Benjamin Carton, «car on ne sait pas encore très bien quel régime de croissance va s'installer dans le monde».

Quelques tendances commencent toutefois à se dessiner.

«Il risque d'y avoir une croissance à deux vitesses entre les pays intégrés au commerce mondial et ceux qui ne le sont pas», estime ainsi Cédric Tille, soulignant que cela créera «de nouvelles tensions au sein de la zone euro», l'Allemagne étant la mieux placée pour tirer profit de cette situation.

Autre tendance: «les marchés émergents seront les moteurs de la croissance mondiale au moins pour les trois prochaines années», assure Benjamin Carton.

Ce qui n'est pas sans comporter de risques. Car la Chine, principale locomotive, «montre quelques signes de ralentissement, ses autorités tentant de contenir le boom de l'investissement» et d'endiguer une éventuelle surchauffe, relève Eswar Prasad, même si la croissance chinoise demeure pour l'instant insolente.