Depuis 10 ans, la tendance est clairement à la baisse dans les taux d'imposition des entreprises au Québec comme au Canada, au point où il est devenu plus attrayant sur le plan fiscal d'y investir qu'aux États-Unis, selon une étude publiée hier par l'École de politique publique de l'Université d'Alberta.

Fait mis en lumière par les auteurs de l'étude, les revenus des gouvernements en provenance des sociétés sont restés stables durant la période, malgré la baisse régulière des taux de taxation, parce que les entreprises multinationales ont transféré et/ou conservé plus de profits en terre canadienne qu'auparavant, avancent les professeurs Jack Mintz et Duanjie Chen.

Ainsi, la part des revenus de taxation en provenance des sociétés est restée stable entre 2000 et 2010, fluctuant entre 3,1% et 3,8% du produit intérieur brut (PIB) chaque année, en dépit de la récession de 2009.

Les professeurs Chen et Mintz soulignent que le Canada a le régime d'imposition des sociétés le plus concurrentiel parmi les pays du G7, le 20e parmi les 34 pays de l'Organisation de coopération et développement économique (OCDE) et le 57e des 90 pays formant l'échantillon.

Résultat: le pays a obtenu plus d'investissements et a connu une meilleure croissance économique en dépit des menaces de récession, soutiennent les auteurs.

Le Québec arriverait au 13e rang des pays de l'OCDE avec un taux effectif marginal de taxation sur l'investissement de 16,9%. Le Canada est à 19,9% et les États-Unis, à 35,6%. Plus le taux est élevé, moins le régime fiscal est concurrentiel. La Turquie est bonne première, avec un taux effectif de 5,7%.

Le taux effectif marginal de taxation sur l'investissement est calculé en tenant compte du taux d'imposition sur le revenu des sociétés, des taxes sur le capital, des taxes de vente s'appliquant à l'achat d'équipement, des taxes sur les transactions financières et autres taxes liées aux éléments d'actif.

Taxes sur la masse salariale

L'étude ne considère pas les taxes sur la masse salariale (cotisations au Fonds des services de santé, au régime des rentes, CSST, etc.) qui influencent négativement l'emploi, mais pas l'investissement, a expliqué par courriel Jack Mintz. Le Québec est le champion des taxes sur la masse salariale au Canada, répète la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante (FCEI).

Depuis 2005, le taux effectif marginal de taxation sur l'investissement est passé de 38,8% à 19,9% au Canada. Quant au taux officiel d'imposition sur le revenu des sociétés, il a été réduit de 8,1 points de pourcentage: de 34,2%, en 2005, à 26,1%, en 2012.

Au Québec, le taux effectif était de 36,2%, en 2005. Il se situe maintenant à 16,9%. Le taux provincial d'impôt sur le revenu des sociétés est à 11,9%.

Parmi les provinces canadiennes, le Québec se classe au 6e rang derrière les provinces de l'Atlantique. Fait méconnu, le Nouveau-Brunswick a le système le plus concurrentiel, caractérisé par un taux d'imposition sur le revenu de 10% et une large assiette fiscale, qui ne compte pas ou peu d'exceptions. Le Québec arrive devant l'Ontario et les provinces de l'Ouest.

Le Québec a amélioré son sort dans les dernières années en abolissant la taxe sur le capital. La TVQ, harmonisée avec la TPS depuis le début, joue aussi en sa faveur. Par contre, le Québec a réduit volontairement son assiette fiscale en octroyant une kyrielle de crédits d'impôt sectoriels.

Parmi les facteurs influençant le taux effectif marginal de taxation sur l'investissement, il y a la hauteur du taux de taxation du revenu des sociétés. Plus ce taux est élevé, plus la province est pénalisée. De plus, la présence d'une taxe de vente classique, c'est-à-dire qui n'est pas une taxe sur la valeur ajoutée comme la TPS fédérale, nuit aussi au caractère concurrentiel du régime, car il augmente les coûts d'un investissement d'une entreprise. Ce sera le cas en Colombie-Britannique qui, après un vote par référendum postal, a décidé de revenir en 2014 à une taxe de vente classique.

Avertissement

Les auteurs de l'étude invitent les gouvernements à résister à la tentation, toujours forte en période d'austérité budgétaire, de hausser les impôts de sociétés dans le but faire croître leurs revenus.

La faiblesse de l'économie, indiquent-ils, demande plutôt de mettre en vigueur des politiques fiscales favorisant la croissance. Le cas échéant, les revenus de taxation suivront.