(Washington) Le marché de l’emploi aux États-Unis a créé la surprise vendredi avec des gains d’emplois bien plus importants que prévu en juin, de quoi atténuer les craintes d’une récession imminente.

« La reprise du marché du travail est la plus rapide et la plus solide de l’histoire de l’Amérique », s’est réjoui le président Joe Biden dans un communiqué.

Pourtant, la solidité du marché du travail peut aussi être vue comme le signe que l’inflation ne ralentit pas, avec des entreprises toujours à la peine pour recruter.  

Aussi les responsables de la banque centrale américaine (Fed) ont-ils signalé leur volonté de poursuivre la remontée agressive des taux pour résorber le déséquilibre entre une offre d’emplois pléthorique et une main-d’œuvre toujours faible qui oblige les entreprises à gonfler les salaires, alimentant l’inflation.

En juin, 372 000 emplois ont été créés. C’est bien plus que les 250 000 attendus par les analystes et à peine moins que les 384 000 comptabilisés en mai.

Les économistes ont toutefois noté que l’emploi a amorcé un ralentissement au deuxième trimestre, avec un gain moyen mensuel de 375 000 contre 539 000 au premier trimestre.

Les secteurs des services professionnels, des loisirs et l’hôtellerie ainsi que les soins de santé ont bénéficié le plus des créations d’emplois, a détaillé le ministère.

Taux de chômage stable

Le taux de chômage est, lui, resté stable à 3,6 % pour le quatrième mois d’affilée.

Au total, 5,9 millions de personnes étaient au chômage en juin, un nombre quasi inchangé par rapport au mois précédent, note également le ministère.

Le taux de chômage comme le nombre de chômeurs sont ainsi proches de leur niveau de février 2020, soit juste avant la propagation de la pandémie (3,5 % et 5,7 millions, respectivement) qui avait provoqué un choc sans précédent sur le marché de l’emploi américain.

En revanche, le taux de participation au marché de l’emploi de la population en âge de travailler a légèrement diminué à 62,2 %, soit inférieur à son niveau prépandémique (63,4 %).

Par ailleurs, la rémunération horaire moyenne a augmenté de 0,3 %, comme le mois précédent. Au cours des 12 derniers mois, les gains horaires moyens ont grimpé de 5,1 %, un niveau élevé, mais insuffisant pour compenser celui de l’inflation (+ 8,6 % en mai).

Vers un ralentissement de l’emploi

Depuis le printemps 2021, les employeurs, confrontés à des pénuries de main-d’œuvre et des démissions massives chaque mois (encore 4,3 millions en mai), sont hésitants à licencier et offrent au contraire des conditions salariales améliorées pour fidéliser leurs employés et recruter, ce qui alimente les pressions inflationnistes.

Mais les économistes s’attendent à un ralentissement de l’emploi plus marqué au second semestre.

Ces dernières semaines, de grandes entreprises des secteurs de la technologie, dont Netflix, ont d’ailleurs annoncé des licenciements ou signalé qu’elles renonçaient à leurs plans d’embauche, à l’instar de Meta ou Microsoft.

La plateforme d’échanges de cryptomonnaies Coinbase et le site de vente de voitures d’occasion Carvana ont également décidé de se séparer de plusieurs milliers d’employés.

Mais pour l’heure, les offres d’emplois demeurent globalement à un niveau record (11,3 millions en mai).

Le marché du travail est un indicateur crucial pour savoir si le pays est en récession, et jusqu’à présent, il n’y a pas eu de signal d’un refroidissement spectaculaire.

« Dans l’ensemble, les données sur l’emploi confirment notre point de vue selon lequel parler d’une économie en récession en ce moment est fantaisiste », a ainsi réagi Ian Shepherdson, chef économiste chez Pantheon Macroeconomics.

Ralentissement mineur

La Réserve fédérale a entamé en mars une forte remontée des taux pour tenter de modérer la demande.

Son président Jerome Powell a prévenu que cette politique pourrait causer des dommages à l’emploi, mais il espère toujours éviter une hausse brutale du chômage.

Vendredi, le président de la Réserve fédérale d’Atlanta Raphael Bostic s’est félicité de « voir des signes de ralentissement » sur le marché de l’emploi. « C’est ce dont nous avons besoin, car nous avons actuellement un grand déséquilibre entre l’offre et la demande, qui alimente l’inflation », a-t-il réagi sur CNBC.

« Mais ce ne sont vraiment que des signes mineurs », a-t-il ajouté. « Ce que nous devons voir et ce que je vais chercher au cours des prochains mois, c’est la preuve que ce ralentissement devient beaucoup plus soutenu et beaucoup plus important à tous les niveaux », a-t-il dit.

« Je suis entièrement favorable à une hausse de 75 points de base » (0,75 point de pourcentage) lors de la réunion du Comité de politique monétaire fin juillet, a-t-il également souligné.

La Fed a déjà procédé en juin à une hausse de 0,75 point de pourcentage, après deux hausses d’un quart et d’un demi-point respectivement, pour combattre une inflation au plus haut depuis plus de 40 ans.