Le taux directeur de la Banque du Canada a dépassé 3 % mercredi, à la suite d’une cinquième hausse d’affilée. Il est à son niveau le plus élevé depuis 2008.

L’inflation donne des signes d’apaisement, mais la Banque du Canada continue son combat et a relevé mercredi son taux directeur de 75 points de base, à 3,25 %.

Est-ce que la Banque du Canada est maintenant prête à faire une pause pour évaluer l’impact des hausses de taux ?

Non. Même si plusieurs économistes s’attendaient à ce que la Banque du Canada prenne le temps d’évaluer l’impact de ses cinq hausses consécutives, le message contenu dans l’annonce de mercredi est très clair. « Compte tenu des perspectives d’inflation, le Conseil de direction juge encore que le taux directeur va devoir augmenter davantage », ont fait savoir les autorités monétaires.

À part le prix de l’essence, qui a baissé, « les pressions sur les prix se sont généralisées davantage, particulièrement du côté des services », ce qui justifie d’autres augmentations, selon la banque centrale. Elle ne donne aucun signe que les prochaines hausses pourraient être moins importantes.

Le taux d’inflation est passé de 8,1 % en juin à 7,6 % en juillet, alors que la Banque du Canada veut le ramener à sa cible de 2 %.

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Tiff Macklem, gouverneur de la Banque du Canada

Pourquoi le taux d’intérêt est-il maintenant considéré comme « restrictif » ?

À 3,25 %, le taux directeur est actuellement à son niveau le plus élevé depuis 2008. Il est passé au-delà de la zone neutre, c’est-à-dire le niveau auquel il n’a pas pour effet de stimuler ou de ralentir la croissance économique. Cette zone neutre se situe entre 2 % et 3 %, selon les autorités monétaires. À 3,25 %, le taux directeur dépasse maintenant ce seuil critique et il faut s’attendre à ce que le coût du crédit freine significativement la croissance de l’économie canadienne, qui est encore solide, avec un taux de croissance de 3,3 % au deuxième trimestre de 2022.

Quel impact ont eu les hausses de taux jusqu’à maintenant ?

Le marché immobilier a ressenti en premier l’impact de la remontée des taux d’intérêt. L’activité sur le marché immobilier s’est calmée et les prix ont commencé à reculer dans les principaux marchés au pays.

Les propriétaires qui ont un prêt hypothécaire ou une marge de crédit hypothécaire à taux variable subissent immédiatement l’augmentation de 75 points de base annoncée mercredi. Ceux qui ont un prêt hypothécaire à taux fixe doivent s’attendre à encaisser une augmentation de leur taux lors du renouvellement de leur prêt.

Consommer à crédit est aussi devenu plus coûteux avec les hausses successives de taux d’intérêt, qui ont des répercussions immédiates sur le coût du crédit.

Les dirigeants des grandes banques canadiennes réunis à Toronto mercredi ont fait le constat que les hausses de taux ont vraiment commencé à ralentir la demande et que les dépenses par cartes de crédit ralentissent.

Une récession est-elle à nos portes ?

À mesure que les taux augmentent, les risques de récession augmentent aussi. Estimé à 50 % par la plupart des économistes au début de la remontée des taux d’intérêt, ce risque devient de plus en plus majoritaire dans les prévisions des experts. Une récession se définit par deux trimestres consécutifs de croissance négative.

À la Banque Nationale, les économistes constatent que le risque de récession a augmenté au cours des dernières semaines, mais son PDG, Laurent Ferreira, s’attend à un ralentissement plutôt qu’à une récession.

Les économistes de Desjardins prévoient une légère récession pour l’économie canadienne au début de 2023. Au Québec, où les signes de l’essoufflement de l’économie se multiplient, la récession pourrait être évitée, selon eux, parce que le recul du secteur immobilier sera moins prononcé et que le taux d’épargne est élevé, ce qui permettra de limiter les dégâts.

Évolution du taux directeur depuis 1970