(Ottawa) La ministre des Finances Chrystia Freeland présentera le 3 novembre son diagnostic de l’état de santé de l’économie canadienne et les perspectives plus sombres qu’elle entrevoit pour les prochains mois quand elle déposera son énoncé économique à la Chambre des communes.

La ministre Freeland présentera son énoncé économique dans un contexte des plus difficiles. L’inflation demeure élevée, les taux d’intérêt grimpent, l’économie montre des signes de ralentissement et le NPD, qui a conclu une entente politique assurant la survie des libéraux minoritaires aux Communes jusqu’en juin 2025, exerce des pressions pour une hausse des dépenses afin de solidifier le filet social, notamment le programme d’assurance-emploi, entre autres choses.

Les provinces ne sont pas en reste. Elles viennent de lancer une nouvelle campagne nationale pour forcer Ottawa à augmenter d’une manière substantielle (28 milliards de dollars par année) les transferts en santé tandis que le réseau de la santé est plus que jamais fragilisé après deux ans de pandémie.

Mme Freeland déposera aussi son énoncé au moment où le bilan financier commence à peine à s’améliorer à Ottawa. Le gouvernement fédéral a enregistré un excédent budgétaire de 3,9 milliards (voir plus bas) durant les cinq premiers mois de l’exercice financier 2022-2023 (avril à août), comparativement à un déficit de 57,2 milliards pour la même période de 2021-2022.

Au cours des dernières semaines, la ministre Freeland a multiplié les déclarations afin de préparer le terrain à l’annonce de mauvaises nouvelles sur le front économique.

Elle a soutenu que l’économie canadienne s’apprête à traverser une nouvelle période de turbulences en raison de la hausse prononcée du taux directeur de la Banque du Canada, qui tente de juguler une inflation qui demeure au-delà de la fourchette cible de 2 % à 3 %.

Cette hausse marquée des taux d’intérêt provoquera inévitablement un ralentissement qui touchera les familles, les travailleurs et les entreprises, en plus d’augmenter les coûts d’emprunt pour ceux qui comptent acheter une maison ou un véhicule.

Il n’y aura pas d’aide pour tout le monde

Elle a aussi fait savoir que le gouvernement ne pourra donner un coup de pouce financier à tout le monde, comme c’était le cas durant la pandémie, et qu’Ottawa doit s’imposer une plus grande rigueur budgétaire afin de ne pas alimenter l’inflation.

Enfin, elle a avisé ses collègues du Cabinet qu’ils devront se serrer la ceinture. Ils devront financer tout nouveau programme qu’ils proposent à même le budget actuel de leur ministère.

Mais la ministre n’a jamais prononcé le mot « récession », même si de nombreux économistes soutiennent que le pays ne pourra pas y échapper.

Cette semaine, la Banque du Canada a relevé son taux directeur pour la sixième fois cette année, la hausse des taux d’un demi-point portant son taux directeur à 3,75 %.

Dans son dernier rapport sur la politique monétaire, l’institution a révisé ses projections économiques. Elle s’attend à ce que la croissance économique stagne d’ici la fin de cette année et au cours des deux premiers trimestres de 2023, avec une croissance comprise entre 0 et 0,5 %, avant de gagner du terrain au second trimestre de l’année prochaine. Elle a également noté qu’une légère contraction est tout aussi probable.

PHOTO ADRIAN WYLD, LA PRESSE CANADIENNE

Rachel Bendayan, secrétaire parlementaire de la ministre des Finances et députée d’Outremont, à la Chambre des communes, vendredi

Aux Communes, vendredi, la secrétaire parlementaire de la ministre des Finances, Rachel Bendayan, a soutenu que l’énoncé économique démontrera que le gouvernement Trudeau entend faire preuve de rigueur budgétaire. « Cette mise à jour économique va être fiscalement responsable. Nous avons un déficit parmi les plus bas dans le monde. On est à un déficit de 1 %. Nous étions fiscalement responsables dans notre budget d’avril. Nous le serons toujours, et nous serons également là pour les Canadiens afin de les aider à traverser cette période d’instabilité économique », a-t-elle fait valoir.

Selon Robert Asselin, vice-président principal du Conseil canadien des affaires, la discipline budgétaire est particulièrement importante, alors que le pays fait face à une inflation élevée, à des taux d’intérêt en hausse et à une faible croissance économique.

« L’accent doit maintenant être mis sur la prudence budgétaire pour s’assurer que la banque centrale puisse ramener l’inflation dans sa fourchette cible », a déclaré M. Asselin, qui a été un proche collaborateur de l’ancien ministre des Finances Bill Morneau.

Surplus de 3,9 milliards à Ottawa

Le gouvernement fédéral a affiché un excédent de 3,9 milliards pour les cinq premiers mois de son exercice financier 2022-2023. Dans sa revue financière mensuelle, le ministère des Finances a indiqué que cet excédent enregistré entre les mois d’avril et août se comparait à un déficit de 57,2 milliards pour la même période l’an dernier. Les revenus du gouvernement pour cette période ont totalisé 177,2 milliards, contre près de 149 milliards il y a un an, grâce à une amélioration généralisée. Les charges de programmes excluant les pertes actuarielles nettes se sont élevées à 154,5 milliards, contre 190 milliards à la même période l’an dernier. Les frais de la dette publique ont totalisé près de 14,8 milliards pour la période, en hausse par rapport à près de 9,7 milliards. Les pertes actuarielles nettes ont totalisé près de 4,1 milliards, en baisse par rapport à celles de 6,4 milliards enregistrées un an plus tôt.

La Presse Canadienne