Les pénuries de main-d’œuvre continuent d’alimenter l’actualité, notamment au Québec, où les entreprises se plaignaient encore la semaine dernière de perdre des milliards de dollars à cause du manque de travailleurs. Mais nous ne sommes pas seuls.

La rareté de la main-d’œuvre est un problème à l’échelle mondiale, indiquent les plus récents résultats du sondage que la firme spécialisée Manpower réalise régulièrement auprès d’employeurs partout dans le monde. On y apprend que la proportion des employeurs qui disent éprouver des problèmes de recrutement a doublé depuis 2015, selon ce coup de sonde auprès de 39 000 employeurs dans 41 pays.

La pandémie, qu’on appelle souvent à la rescousse pour expliquer toutes sortes de problèmes, n’est pas à l’origine de tous les bouleversements que vit le monde du travail. Elle a certes semé le chaos dans l’économie mondiale, mais maintenant que la vie a repris son cours, il faut chercher ailleurs les causes de ce problème croissant.

La démographie est la première des explications. La population mondiale décline et selon la Banque mondiale, 75 pays dans le monde ont déjà un taux de fertilité insuffisant pour maintenir leur population. Le corollaire de ce déclin, le vieillissement de la population, est un problème plus aigu dans certains pays que dans d’autres, par exemple au Japon, mais il se manifeste partout.

Le bassin de travailleurs est donc appelé à se réduire et le phénomène ne fait que commencer.

La croissance économique alimente à la fois la consommation et le besoin de main-d’œuvre pour satisfaire cette consommation.

Pour répondre à une demande qui augmente, il faut fabriquer plus de biens et offrir plus de services. Si l’automatisation peut compenser en partie la rareté de la main-d’œuvre dans la fabrication, le secteur des services a besoin de bras pour assurer ces services, que ce soit au restaurant, au garage ou à l’hôpital. Une population vieillissante consomme davantage de services, ce qui exerce encore plus de pression sur la main-d’œuvre.

L’automatisation a aussi ses limites. L’utilisation de robots de plus en plus sophistiqués nécessite des compétences pointues de la part des employés qui les gèrent.

Les avancées technologiques transforment le monde du travail et rendent plus difficile le recrutement d’employés qualifiés qui accomplissent des tâches plus complexes. C’est ce dont les entreprises se plaignent le plus. On a beau accélérer la formation, la technologie évolue encore plus vite. L’offre de main-d’œuvre ne peut jamais correspondre parfaitement aux besoins des entreprises, mais l’écart pourrait s’élargir.

Dans les pays membres de l’OCDE, le taux de chômage est passé de 7 % en 2009 à 4,8 % en 2023.

Les pays les plus avancés technologiquement souffrent davantage de l’écart entre les compétences requises par les entreprises et celles des travailleurs disponibles.

Selon Manpower, c’est à Taïwan, en Allemagne et à Hong Kong que les entreprises disent avoir le plus de difficulté à recruter les travailleurs qu’elles recherchent. À l’inverse, les employeurs qui ont moins de problèmes de recrutement sont en Colombie, au Panamá et en République tchèque.

Le Canada et les États-Unis se retrouvent au milieu du classement, près de la moyenne de 77 % des employeurs sondés qui disent avoir des problèmes à embaucher.

« Bienvenue dans l’âge d’or des travailleurs », titrait récemment le magazine The Economist pour illustrer les changements qui s’opèrent sur le marché de l’emploi.

Les entreprises doivent s’y faire. Le contexte économique n’a probablement jamais été aussi favorable aux travailleurs, qui peuvent aspirer à une amélioration de leurs conditions de travail et à de meilleurs salaires.

Consultez le sondage de Manpower (en anglais)