Le coût estimé du programme du président Joe Biden en matière d’énergie propre et de climat a doublé depuis la promulgation de la loi sur la réduction de l’inflation, il y a un an et demi.

Presque toute cette hausse vient du fait que les aides sont plus demandées que prévu, et cela s’explique entre autres par le libellé de certains règlements, disent des analystes. Or, ce dépassement de coûts pourrait être bon pour la planète… et pour l’économie américaine.

L’Inflation Reduction Act, ou loi sur la réduction de l’inflation, adoptée par les démocrates à l’été 2022, prévoit des crédits d’impôt et d’autres aides à l’énergie verte, pour sevrer le pays des combustibles fossiles.

Aides fédérales non plafonnées

Certains de ces crédits n’ont pas de plafond : plus les entreprises et les citoyens en demandent, plus le déficit fédéral se creuse. Ces aides non plafonnées incitent les fabricants à construire des usines de panneaux solaires ou d’éoliennes et encouragent les consommateurs à acheter des autos électriques. Les responsables du budget doivent estimer la popularité de ces crédits afin d’en prévoir le coût.

À l’adoption de la loi, les fonctionnaires du Congressional Budget Office calculaient que les mesures énergétiques creuseraient les déficits de 391 milliards de 2022 à 2031. Ces prévisions ont été revues à la hausse au printemps 2023, puis encore mercredi : leur coût a doublé pour la période 2022-2031. Et d’ici 2033, on dépasse les 800 milliards de dollars.

PHOTO ERIN SCHAFF, THE NEW YORK TIMES

La loi Biden a stimulé l’investissement dans les usines américaines de technologies vertes : panneaux solaires, batteries de pointe et tout l’écosystème des véhicules électriques.

Voici ce qui a changé et en quoi cela influe sur les émissions, l’économie et le budget.

La production d’énergie propre est en plein essor

La loi a stimulé l’investissement dans les usines américaines de technologies vertes : panneaux solaires, batteries de pointe et tout l’écosystème des véhicules électriques.

Rhodium Group, un cabinet de conseil qui suit les dépenses liées à l’énergie et au climat, et le Massachusetts Institute of Technology estiment que les entreprises ont investi 44 milliards en 2023 pour fabriquer aux États-Unis des produits à base d’énergie propre ; et elles prévoient en dépenser bien plus par la suite. Ces entreprises profiteront d’allègements fiscaux prévus par la loi, directement ou indirectement.

La popularité des aides prévues à la loi Biden sur le climat a surpris les prévisionnistes fédéraux et le comité du Congrès sur les finances. Les responsables du Bureau du budget prévoient désormais qu’à l’horizon 2031, ces mesures gonfleront les déficits de 205 milliards de plus que prévu à l’origine.

Bon pour l’auto électrique

Les prévisionnistes s’attendent désormais à ce que la subvention à l’achat d’un véhicule électrique (jusqu’à 7500 $) coûte beaucoup plus cher que prévu. Ce calcul n’est pas basé sur les ventes passées (elles ont atteint un record en 2023, mais ralentissent depuis cinq mois). Il découle de deux mesures incitatives qui seront assez efficaces, estime le Bureau du budget.

Le premier est déjà adopté et augmente le nombre de véhicules admissibles. L’aide à l’achat ne s’applique pas à tous les véhicules électriques (VE) vendus aux États-Unis. La subvention à l’achat est réservée aux véhicules assemblés aux États-Unis avec des pièces surtout américaines. Mais le libellé permet une exception : ceux qui louent le véhicule, au lieu de l’acheter, peuvent réclamer la subvention même si leur véhicule électrique ne satisfait pas aux exigences de provenance nationale. Ce n’est pas un hasard si la location-bail de VE a explosé l’an dernier.

L’autre mesure est une proposition de l’Agence de la protection de l’environnement qui exigerait que les deux tiers des nouvelles voitures vendues aux États-Unis soient entièrement électriques d’ici 2032. Si cette mesure est ratifiée, elle incitera plus d’Américains à réclamer la subvention pour rouler électrique. Donc il se consommera moins d’essence… ce qui réduira les recettes de la taxe fédérale sur l’essence.

Les mesures vertes pourraient aider l’économie

En 2023, les modélisateurs de Rhodium ont estimé que la loi Biden réduirait de beaucoup les émissions américaines (mais pas assez pour respecter les objectifs 2030 dans le cadre de l’accord de Paris). Mais la hausse des coûts prévus suggère que la réduction des émissions sera plus grande que l’estimation de l’an dernier.

Si le plan Biden a plus de succès, il pourrait inciter d’autres pays à agir aussi pour réduire les émissions et éviter un réchauffement catastrophique. L’inaction aurait un coût économique et budgétaire énorme, a prévenu en 2022 la Maison-Blanche, estimant que ne rien faire pourrait réduire de 10 % la taille de l’économie d’ici 2100.

De plus, les dommages causés par le réchauffement pourraient coûter d’ici 10 ans au gouvernement 1000 milliards, en dollars d’aujourd’hui, en coûts supplémentaires liés aux inondations, vagues de chaleur et autres catastrophes.

Mais la loi sur le climat aggrave le déficit.

Mais elle est plus qu’une loi sur le climat. Elle augmente aussi l’impôt sur les sociétés, les subventions accordées à certaines personnes qui achètent une assurance maladie et l’aide fédérale pour les médicaments sur ordonnance. Elle augmente enfin le budget du département du Revenu pour sévir contre les entreprises et les personnes à hauts revenus qui ne paient pas leurs impôts. Le résultat net, selon les premières estimations du Bureau du budget, était une légère réduction des déficits sur 10 ans.

Mais les révisions à la hausse des coûts liés à la loi renversent ces calculs et mènent désormais à une légère hausse des déficits à l’horizon 2031, selon le Bureau du budget.

Mais les responsables de l’administration Biden continuent de soutenir qu’au net, la loi réduira les déficits.

Cet article a été publié à l’origine dans le New York Times.

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