Le Québec serait en mesure d’approvisionner l’Allemagne en gaz naturel dans un délai aussi court que 16 à 18 mois, assure le président de Ressources Utica, qui presse le gouvernement québécois de renoncer à son projet de loi qui interdirait l’exploration et l’exploitation du pétrole et du gaz.

« On est dans un monde différent depuis le 24 février, plaide Mario Lévesque, président et chef de la direction de Ressources Utica. La planète a changé. Si le gouvernement adopte le projet de loi 21 dans sa forme actuelle, la province abandonnera l’Europe à son sort. »

Selon lui, le Québec peut et doit aider l’Europe à diversifier ses sources d’approvisionnement en gaz naturel. « Et ça pourrait se faire très vite, d’ici 16 à 18 mois », estime-t-il.

Pour répondre le plus rapidement possible aux besoins de l’Allemagne, dont l’économie est la plus dépendante du gaz russe, il est possible d’expédier du gaz naturel québécois sous forme comprimée plutôt que liquide. « Une fois comprimé, le gaz peut voyager dans des conteneurs et être injecté directement dans le réseau une fois à destination », explique Mario Lévesque.

Le gaz naturel liquide, par comparaison, exigerait la construction d’installations de liquéfaction au Québec et de regazéification une fois rendu en Europe, ce qui est long et coûteux.

Ressources Utica affirme être en discussions avec des représentants du gouvernement allemand, qui est très intéressé par la solution québécoise, affirme son président.

Mario Lévesque estime qu’il est possible que le gouvernement québécois reporte son projet de loi. Un sondage réalisé par la firme Mainstream et commandé par Ressources Utica indique que 65 % des Québécois sont « très en accord » et « assez en accord » avec l’idée d’exploiter nos ressources en gaz naturel pour créer de la richesse et financer la transition énergétique. Une courte majorité des répondants, soit 52 %, se dit d’avis que dans le contexte actuel de crise énergétique, le gouvernement devrait suspendre son projet de loi visant à interdire l’exploration et l’exploitation du pétrole et du gaz.

« Je trouverais ça triste qu’il ne change pas d’idée, dit Mario Lévesque. On a l’obligation d’intervenir pour stabiliser la paix mondiale. »

À Bécancour

Des dizaines de milliards de dollars de fonds privés pourraient être investis rapidement pour forer des puits dans les basses-terres du Saint-Laurent et trouver des navires porte-conteneurs pour transporter le gaz jusqu’en Europe, selon Ressources Utica.

La production de gaz naturel pourrait être concentrée dans le parc industriel de Bécancour, situé au milieu des schistes (shales) riches en gaz naturel.

Les ressources en place dans les basses-terres du Saint-Laurent sont estimées à 180 TCF (trillion cubic feet), dont 60 TCF sont récupérables. Mario Lévesque estime qu’il est « très raisonnable » de croire qu’il est possible de produire 1 BFC (billion cubic feet) de gaz naturel à Bécancour dès l’hiver prochain et d’augmenter cette production à 1 TCF par année dans un horizon de trois ans. Le Québec pourrait ainsi fournir 20 % de la consommation européenne, estimée à 5 TCF par année.

« Même si la guerre menée par les Russes en Ukraine se termine demain matin, l’Europe a besoin de nouveaux fournisseurs », souligne-t-il.

La distance de transport est plus courte entre le Québec et l’Europe que celle des autres fournisseurs potentiels, comme le Qatar et les États-Unis, fait valoir Mario Lévesque.

Selon lui, le gaz naturel peut aider le monde à faire une transition vers l’énergie renouvelable, et le Québec en a. Bannir l’exploration et la production pétrolières et gazières pour des raisons environnementales, quand on continue d’en consommer qui vient d’ailleurs, c’est de l’hypocrisie, estime-t-il.