(New York) Les membres du syndicat représentant des centaines de milliers de salariés du transporteur UPS, qui livre lettres et colis, ont à la quasi-unanimité ouvert la voie à une grève en cas d’échec des négociations salariales en cours dans ce groupe, au rôle crucial pour l’économie américaine.

La puissante organisation des Teamsters négocie la prochaine convention collective avec la direction depuis le 17 avril et il ne leur reste théoriquement plus que six semaines, jusqu’au 31 juillet, pour parvenir à un accord pour ses 340 000 membres.

À défaut, une grève sera lancée.  

Avec 97 % des voix autorisant un arrêt de travail, le vote « donne au syndicat un maximum de poids pour obtenir des revendications à la table des négociations », remarque l’organisation dans un communiqué annonçant les résultats.

Il « montre que des centaines de milliers de Teamsters sont unis et déterminés à obtenir le meilleur contrat possible », y souligne son président Sean O’Brien.

Une grève aurait un impact considérable sur l’entreprise mais aussi sur l’économie américaine : UPS estime que ses camions transportent environ 6 % du produit intérieur brut des États-Unis chaque jour.

La patronne d’UPS, Carol Tome, affirme régulièrement qu’elle espère obtenir un accord à temps. « Nous vous avions dit dès le début que ce serait agité et cela se confirme », a-t-elle notamment déclaré en avril.

Dans un message vendredi, le groupe a souligné que ce vote « ne (signifiait) pas qu’une grève (était) imminente » et n’affectait en aucun cas ses opérations. Un tel scrutin représente « une étape habituelle dans les négociations syndicales », affirme UPS.  

« Jusqu’à la limite »

Les experts du secteur des transports s’attendent dans leur ensemble à une augmentation des salaires, même si elle ne sera probablement pas aussi élevée que celle demandée par le syndicat, remarque Anthony DeRuijter du cabinet Third Bridge.  

Mais « il ne devrait pas y avoir de grève », avance-t-il, car les Teamsters ont intérêt à montrer qu’ils peuvent parvenir à des avancées s’ils veulent convaincre les salariés d’autres entreprises comme Amazon de se syndiquer.

Les deux parties ont déjà conclu un accord sur l’installation d’air conditionné et de nouveaux ventilateurs dans les camions, un aspect crucial pour des chauffeurs qui peuvent souffrir des températures élevées à l’arrière des véhicules.

Le syndicat a aussi obtenu que la direction ne recoure pas aux drones et à d’autres nouvelles technologies de transport sans l’avoir consulté ainsi que des restrictions sur l’utilisation de caméras surveillant les chauffeurs.  

Mais Sean O’Brien, qui n’a pas donné d’objectifs chiffrés sur les salaires, a prévenu que de nombreux points restaient en discussions.  

Ces négociations interviennent à un moment particulier pour le mouvement syndical aux États-Unis. Depuis 2021, des petits groupes sont pour la première fois parvenus à créer des sections dans des grandes entreprises comme Starbucks, Amazon et Apple. Mais le taux de syndicalisation dans le secteur privé est encore descendu en 2022, à tout juste 6 %.  

Les syndicats dans le secteur des transports bénéficient toutefois d’une certaine dynamique depuis la pandémie, qui a mis en avant le rôle essentiel de la logistique.  

Mercredi, un accord a ainsi été trouvé entre l’association représentant 29 ports de la côte Ouest et le syndicat représentant les débardeurs, après des mois de discussions et deux semaines de travail au ralenti ayant affecté l’activité des ports.  

Les termes du contrat n’ont pas été rendus publics mais selon Sal Mercogliano, professeur d’histoire à Campbell University qui suit de près le secteur du transport maritime, les débardeurs ont obtenu une augmentation substantielle.  

Dans un communiqué commun, les ports et le syndicat ont salué « le rôle clé » de la ministre du Travail Julie Su dans les négociations.

Le président Joe Biden, qui défend régulièrement l’importance des organisations syndicales, était lui-même intervenu fin 2022 afin d’éviter une grève dans le secteur du rail.  

Pour Sal Mercogliano, il est possible que le gouvernement américain œuvre de nouveau « en coulisses » pour éviter une grève des chauffeurs et manutentionnaires d’UPS.

Si l’activité de l’entreprise a un peu ralenti depuis le pic de la pandémie, le syndicat peut invoquer la forte inflation, estime l’expert selon qui les Teamsters « vont pousser jusqu’à la limite ».