Aidée par les déboires de sa concurrente AB Inbev, Molson Coors affiche une croissance des ventes trimestrielles et de son bénéfice net qu’on n’avait pas vue depuis la fusion entre les brasseries Molson et Coors en 2005.

Les ventes en dollars ont augmenté de 11,8 %, à 3,26 milliards US au cours du trimestre qui s’est terminé le 30 juin. Même les ventes en volume ont progressé de 2,8 % au cours du trimestre, fait rare. Le bénéfice net, quant à lui, a bondi de près de 50 %, à 387,2 millions US.

Malgré les bonnes nouvelles, le titre de Molson Coors a cédé presque 5 %, à 66,52 $ US, mardi en Bourse. Même si la société a réévalué à la hausse ses prévisions pour 2023, ces nouvelles cibles impliquent un ralentissement du rythme des ventes et des profits au cours de la seconde moitié de l’année. Le titre est cependant en hausse de 29 % depuis le 1er janvier.

Les ventes doivent augmenter de 8 à 10 % au cours de l’exercice 2023, comparativement à une prévision de 5 % auparavant. Le bénéfice avant impôt devrait croître de 25 % en un an. La cible antérieure estimait la hausse à 5 % seulement.

Questionnée sur le ralentissement attendu de la croissance au second semestre lors de la téléconférence avec les analystes financiers, la haute direction du brasseur canado-américain a expliqué que l’entreprise allait mettre un terme à un contrat de brassage à forfait dans les prochains mois, ce qui allait freiner sa croissance.

De plus, une comparaison moins favorable au second semestre va jouer également. Le brasseur avait augmenté ses prix de 5 % l’an passé à l’automne. Les ventes du premier semestre 2023 se comparent donc avec des prix moins élevés en 2022. Ça ne sera plus le cas d’ici la fin de l’année. Au Canada, aussi, la comparaison a joué à la faveur du brasseur. L’an dernier, l’usine de la région montréalaise avait connu une grève de 11 semaines qui s’était terminée tout juste avant la fin du deuxième trimestre. L’arrêt de travail avait plombé les ventes de 2022.

Coûteuse polémique pour Bud Light

Cela dit, la croissance spectaculaire que connaît Molson Coors s’explique surtout par les déboires de son concurrent AB InBev.

Bud Light, qui était la bière la plus vendue aux États-Unis, a fait l’objet d’une polémique à la mi-mars lorsqu’une influenceuse transgenre, Dylan Mulvaney, a publié une vidéo sur son compte Instagram pour promouvoir un concours. L’entreprise avait préparé une canette de Bud Light sur laquelle figurait sa photo. Des conservateurs américains ont appelé au boycottage. Les ventes de la marque en ont souffert depuis.

Aux États-Unis, Modelo, distribuée par Constellation Brands, est ainsi devenue la bière la plus vendue à la place de la Bud Light.

Molson Coors en a profité également. Les volumes de ses marques, menées par Coors Light, Miller Lite et Coors Banquet, ont progressé de 8,7 % durant le dernier trimestre aux États-Unis, indique la société. Les bars ont ajouté 12 000 robinets de bière pression servant les marques de Molson Coors.

Selon Statista, on dénombrait 67 000 débits de boissons aux États-Unis en 2021.

Au Canada, Coors Light est devenue la bière légère la plus vendue. Selon les données de Bière Canada, de janvier à mai, le volume de ventes de Coors Light a augmenté de 4,3 % en rythme annuel. Pendant ce temps, les parts de Budweiser et de Bud Light ont baissé de 0,22 % et 3,8 %, respectivement.

« Au cours des trois dernières années, notre stratégie a permis à nos marques d’être manifestement plus fortes en 2023 qu’elles ne l’étaient en 2019. Ainsi, même si nous n’avons pas prévu que la plus grande marque de notre principal concurrent puisse perdre son volume de près de 30 % au cours du trimestre, si cela s’était produit en 2019, nous n’aurions certainement pas enregistré les mêmes bénéfices en termes de ventes qu’en 2023 », a indiqué Gavin Hattersley, président et chef de la direction de Molson Coors, en téléconférence.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Chaîne d’embouteillage à la nouvelle brasserie Molson Coors de Longueuil

Molson a reconstruit deux de ses brasseries canadiennes, a rationalisé le nombre de ses marques économiques et s’est diversifiée dans les boissons alcooliques autres que la bière comme les eaux pétillantes. Elle a aussi réduit sa lourde dette. Le ratio dette nette sur le bénéfice avant intérêts, impôts et amortissement est descendu à 2,5 fois à la fin de juin.

Blitz marketing de 100 millions US

Le créneau des eaux pétillantes alcoolisées a vu ses ventes exploser en 2020-2021 avant de reculer à partir de 2022.

« Il est vrai que nous avons enregistré des baisses plus importantes que prévu dans le secteur des eaux pétillantes alcoolisées », a d’ailleurs reconnu le patron de Molson Coors mardi. L’entreprise de boissons soutient toutefois que d’autres produits, comme la limonade alcoolisée Simply Spiked, compensent le recul observé dans les eaux pétillantes.

Molson Coors n’entend pas regarder passer la parade les bras croisés. Elle a débloqué un budget marketing additionnel de 100 millions US pour le restant de 2023. « Nous avons l’intention d’investir très fortement pour profiter du momentum, a expliqué M. Hattersley aux analystes financiers. D’où les 100 millions de dollars supplémentaires consacrés au marketing. Notre tâche consiste à maintenir les gains que nous avons obtenus. »