Le géant québécois du camionnage TFI International emploie les grands moyens pour devenir l’un des principaux acteurs dans le segment du transport spécialisé au sud de la frontière : il achète l’entreprise américaine Daseke dans le cadre d’une transaction qui valorise cette dernière à environ 1,5 milliard.

« On est l’acteur dominant au Canada dans le transport spécialisé, mais nous ne l’étions pas aux États-Unis, a résumé vendredi le président et chef de la direction de TFI, Alain Bédard, en entrevue téléphonique avec La Presse. Nous serons maintenant parmi les plus gros. »

Anciennement connue sous le nom de TransForce, l’entreprise québécoise offre 8,30 $ US pour chacune des actions de Daseke, ce qui correspond à une prime d’environ 70 % par rapport à son cours de clôture, jeudi, au NASDAQ. Le prix offert est néanmoins inférieur au sommet des 52 dernières semaines, soit 9,58 $ US, atteint l’hiver dernier. Les conseils d’administration des deux sociétés disent appuyer unanimement la transaction proposée.

Établie dans la région de Dallas, au Texas, cette entreprise américaine se présente comme la plus importante dans le créneau des remorques à plateforme – qui sont par exemple utilisées pour transporter de l’équipement ainsi que des matériaux de construction. Elle exploite un parc de 4500 tracteurs et 11 000 remorques.

TFI devra débourser environ 515 millions pour acquérir toutes les actions en circulation de Daseke. L’entreprise québécoise devra cependant assumer d’autres charges, comme la dette du transporteur américain, évaluée à environ 880 millions.

À moyen terme, l’acquisition pourrait ouvrir la voie à un essaimage de la division du transport de lots complets et spécialisés, qui devrait afficher des revenus annuels de 3,6 milliards US si on tient compte des activités de Daseke. Aucun échéancier précis n’a été évoqué.

Contexte plus difficile

L’industrie du camionnage est confrontée à des vents de face en raison du ralentissement économique qui pèse sur la demande et de l’inflation qui exerce une pression sur les coûts. L’achat de Daseke tombe à point, affirme M. Bédard, qui croit que le contexte s’apprête à changer.

« Vous achetez quand les nouvelles sont mauvaises et vous vendez lorsqu’elles sont bonnes, lance-t-il. Il ne faut pas oublier que les infrastructures, les écoles, les hôpitaux, les routes et les ponts ont besoin d’investissements majeurs. Cela profite à l’industrie du camionnage et encore plus au secteur de la remorque à plateforme. »

Les investisseurs ont réagi favorablement à ce qui est la quatrième acquisition de TFI depuis le début de son année financière. Sur le parquet de la Bourse de Toronto, vendredi, le titre de l’entreprise a terminé la journée en hausse de 7,9 %, ou 12,76 $, pour atteindre 175,29 $. Depuis le début de l’année, l’action affiche une progression d’environ 27 %.

Pour Cameron Doerksen, de la Financière Banque Nationale, même si l’achat de Daseke est logique pour TFI, les investisseurs s’attendaient probablement à un autre type de transaction.

« TFI a surtout effectué des acquisitions complémentaires aux États-Unis, écrit l’analyste, dans une note. Nous pensons que les investisseurs s’attendaient à ce que la compagnie achète d’autres entreprises spécialisées dans les lots brisés et la logistique. »

Un visage qui change

TFI génère plus de la moitié de ses revenus aux États-Unis. Dans le créneau du transport spécialisé, son chiffre d’affaires dépasse à peine les 100 millions US. L’ajout des activités de Daseke changera les choses. Au terme de la période de neuf mois ayant pris fin le 30 septembre dernier, elle affichait des revenus de 1,2 milliard US.

Il s’agit d’un recul d’environ 15 % par rapport à la même période en 2022.

« Nous sommes capables d’effectuer des acquisitions d’entreprises qui traversent des temps plus difficiles, affirme M. Bédard. Les coûts d’intérêt de Daseke sont de 10 %. Ils sont dans une mauvaise position. C’est faramineux. Nous, notre taux moyen est d’environ 4,5 %. Avec notre bilan, nous sommes capables d’effectuer ce genre d’acquisition. »

La clôture de la transaction, qui doit obtenir les approbations réglementaires habituelles au Canada ainsi qu’aux États-Unis, est prévue au cours du deuxième trimestre de 2024.

TFI International en bref

  • Siège social : Montréal
  • Président et chef de la direction : Alain Bédard
  • Secteurs d’activité : transport de colis et de courrier, lots brisés et complets, logistique
  • Employés : environ 26 000
  • Revenus : 5,6 milliards US (pour les neuf mois terminés le 30 septembre dernier)
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  • 90
    Nombre d’acquisitions réalisées par TFI International depuis 2014
    Source : TFI International