L’accélération de la production d’appareils A220 se matérialise enfin chez Airbus. Il y a cependant encore beaucoup de pain sur la planche pour faire sortir ce programme du rouge d’ici deux ans : l’avionneur doit doubler la cadence actuelle.

« Ça sera très difficile, estime Richard Aboulafia, directeur général de la firme AeroDynamics. La réalité, c’est qu’ils dépendent de leurs fournisseurs. Il y a beaucoup d’autres programmes [comme la famille A320] qui ont des cibles de croissance très ambitieuses. Il faudra voir ce que les fournisseurs prioriseront, particulièrement chez les constructeurs de moteurs. »

À l’instar de son actionnaire majoritaire, l’A220 a connu une bonne année en 2023, d’après les données diffusées jeudi. L’appareil a décroché 142 commandes fermes – un record – en plus de remettre 68 exemplaires des deux versions de l’avion à des clients. Il s’agit d’une hausse annuelle d’environ 30 %.

Les chaînes de montage de Mirabel, dans les Laurentides, et Mobile, en Alabama, ont particulièrement été en mesure d’appuyer sur l’accélérateur en fin décembre, où 11 avions ont été livrés.

« Ce qui a rendu ce résultat [de 2023] possible, c’est l’installation d’une ligne de préassemblage [à Mirabel] qui gagne en maturité », a affirmé le dirigeant de la division commerciale d’Airbus, Christian Scherer, en visioconférence avec les médias.

Toujours déficitaire, l’A220 – détenu à hauteur de 25 % par l’État québécois – pourra commencer à être rentable une fois qu’il sera possible de produire 14 appareils par mois à Mirabel et Mobile, affirme Airbus. Même s’il ne lui reste que deux ans pour atteindre cet objectif, la multinationale européenne ne déroge pas de sa cible.

« Est-ce que nous [avons bon espoir] d’atteindre une cadence de 14 ? La réponse est oui », a affirmé M. Scherer, sans offrir plus de détails.

Tout retard risque d’avoir des conséquences pour les contribuables québécois, qui ont injecté, jusqu’à présent, 1,7 milliard dans ce programme développé par Bombardier. En acceptant de réinjecter 380 millions en 2022, Québec avait pu repousser à 2030 le moment où Airbus rachèterait sa participation dans l’A220. Plus les profits se font attendre, plus la somme obtenue par l’État risque d’être amputée.

Du mieux

Pour réduire le temps consacré à chaque appareil sur ses chaînes d’assemblage, le géant européen avait inauguré une chaîne de préassemblage à Mirabel en 2022. Cet espace sert notamment à installer le câblage électrique, les planchers et d’autres modules dans les fuselages qui se retrouvent ensuite sur les chaînes d’assemblage.

Malgré des améliorations au sein de la chaîne d’approvisionnement, les tensions sont toujours présentes, selon le chef de la direction d’Airbus, Guillaume Faury. La multinationale compte plus de 18 000 fournisseurs à travers le monde. En dépit des progrès accomplis l’an dernier, le défi reste « aussi grand en 2024 » pour l’A220, reconnaît la cheffe des communications d’Airbus Canada, Annabelle Duchesne.

Tant que nous n’avons pas atteint le seuil de rentabilité, on doit mettre les bouchées doubles chaque année. Le défi demeure le même. Il faut faire plus vite, mais encore et toujours mieux.

Annabelle Duchesne, cheffe des communications d’Airbus Canada

Dans le carnet de commandes, il y a 600 appareils à livrer. Les compagnies aériennes qui souhaitent acheter l’A220 ainsi que d’autres appareils monocouloirs d’Airbus doivent faire preuve de patience. Les créneaux de livraison sont complets jusqu’en 2029.

Cela n’a pas empêché l’ex-C Series de Bombardier de terminer 2023 sur une bonne note avec 65 nouveaux contrats pendant le dernier mois de l’année. La commande de 40 appareils du transporteur allemand Lufthansa avait été médiatisée, mais Airbus a vendu 11 exemplaires de l’A220 à deux clients dont les noms n’ont pas été dévoilés.

Le 29 décembre dernier, Delta Air Lines a aussi acheté 14 A220-300 supplémentaires. Cela fera passer à 145 le nombre d’appareils qui se retrouveront à terme dans la flotte de cette importante compagnie américaine.

En savoir plus
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    Commandes totales récoltées par Airbus en 2023, en hausse de 11 
    source : Airbus
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    Commandes obtenues par Boeing l’an dernier, comparativement à 774 en 2022
    source : Airbus