(Montréal) Air Canada fait appel d’une décision de l’organisme de réglementation des transports du pays qui cherche à améliorer l’accessibilité pour les voyageurs vivant avec un handicap.

L’action devant la Cour d’appel fédérale vise à annuler une ordonnance de l’Office des transports du Canada obligeant la compagnie aérienne à accommoder les passagers dont les fauteuils roulants électriques ne passent pas par la porte-cargo d’un avion régulier.

La décision de l’Office des transports du Canada marque le point culminant d’une affaire qui traîne depuis 2016, lorsque le passager Tim Rose s’est fait dire que son fauteuil roulant électrique ne rentrerait pas dans l’avion, l’empêchant de se rendre en Ohio comme prévu.

L’organisme a demandé à Air Canada soit de trouver des vols similaires sur un itinéraire comparable, soit d’intervertir les avions pour en avoir un sur l’itinéraire pouvant transporter les fauteuils roulants électriques.

M. Rose dit que cette dernière décision est « décevante », particulièrement après que le transporteur s’est félicité de nouvelles mesures en novembre pour améliorer l’expérience de voyage des passagers vivant avec un handicap.

« J’ai l’impression qu’Air Canada parle des deux côtés de la bouche en ce moment. L’hypocrisie, c’est que, d’un côté, ils suggèrent qu’ils essaient de s’améliorer. De l’autre, ils continuent de lutter contre ma décision déjà prise qui assure la dignité et l’accessibilité à tous les Canadiens qui utilisent un fauteuil roulant », a-t-il confié.

De passage à l’Aéroport international de Vancouver pour une annonce, le ministre fédéral des Transports, Pablo Rodriguez, s’est aussi dit étonné de la décision d’Air Canada.

« Je n’ai pas vu les détails de l’appel, mais en termes d’efforts d’accessibilité, il faut en faire plus, pas en faire moins. Je suis un peu surpris par l’appel d’Air Canada, surtout que je les ai rencontrés le mois dernier là-dessus. En termes d’accessibilité, je l’ai dit clairement au président d’Air Canada, à son équipe et aux autres compagnies ; ‘‘il faut faire plus et pas moins’’ », a déclaré M. Rodriguez, jeudi après-midi.

Air Canada affirme avoir accepté la plupart des ordonnances du jugement visant à supprimer les obstacles, y compris l’obligation de trouver un avion qui décolle dans la journée suivant la date de voyage souhaitée, à condition que le client en fasse la demande trois semaines à l’avance.

Le transporteur indique contester l’obligation de changer d’avion dans un court délai pour des liaisons plus courtes.

À l’été 2016, M. Rose a été informé qu’il ne pouvait pas réserver un vol de Toronto à Cleveland où, « assez ironiquement », il devait faire une présentation sur la sensibilisation à la situation des personnes handicapées, a-t-il dit.

En 2022, un tribunal de l’Office des transports a conclu que lui et toutes les personnes qui utilisent des aides à la mobilité de grande taille sont confrontés à des obstacles abusifs à la mobilité chez Air Canada.

Cette conclusion est intervenue après de longs échanges entre les deux parties. Elle suit également une décision de 2019 établissant qu’il existait des obstacles à la mobilité, mais pas nécessairement injustifiés.

La décision de 2023 a noté que la compagnie aérienne déploie des avions de rechange quotidiennement en réponse à toutes sortes de problèmes, du mauvais temps aux problèmes mécaniques, et qu’elle devrait donc être en mesure de faire de même pour l’accessibilité.

Dans son avis d’appel du 21 décembre, Air Canada fait valoir que l’exigence d’échanger des avions avec des portes-cargo plus grandes représente une contrainte excessive pour le transporteur, le plaçant dans une situation de désavantage concurrentiel. Certaines de ces portes mesurent un peu plus de deux pieds et demi de haut, alors que de nombreux fauteuils roulants électriques ne peuvent être repliés qu’à une hauteur de trois pieds.

L’agence n’a pas pris en compte tous les facteurs ou n’a pas appliqué l’analyse appropriée pour déterminer ce qui constitue une telle difficulté, lit-on dans la requête.

Une série de mesures

Lancée en septembre, la procédure d’appel s’est amorcée quelques mois avant que le PDG d’Air Canada, Michael Rousseau, ne présente ses excuses pour les lacunes de la compagnie en matière d’accessibilité.

Dans un communiqué de presse, il a déclaré que le transporteur allait accélérer la mise en œuvre d’un plan d’accessibilité triennal après un certain nombre de cas récents de mauvais traitements infligés à des passagers, notamment un incident au cours duquel un homme atteint de paralysie cérébrale spastique a été contraint de se traîner hors d’un avion à Las Vegas en raison d’un manque d’assistance.

Les mesures prévues par la compagnie aérienne vont de la création d’un poste de directeur de l’accessibilité pour les clients à l’embarquement en priorité des passagers qui demandent une assistance pour les ascenseurs.

Air Canada a également l’intention de mettre en place une formation annuelle et périodique sur l’accessibilité pour ses 10 000 employés de l’aéroport et d’inclure les aides à la mobilité au moyen d’une application mobile.

L’appel de la compagnie aérienne conteste également l’ordonnance de l’organisme de réglementation l’obligeant à tenir compte des aménagements pour fauteuils roulants électriques dans son plan d’accessibilité, en particulier lorsqu’il s’agit de l’achat et de la sélection d’aéronefs sur les liaisons Canada–États-Unis.

L’agence n’a pas la compétence ou le pouvoir d’imposer un contenu à ce plan, a déclaré Air Canada dans un document déposé l’année dernière.