À l’approche de la semaine de relâche, Lynx Air, l’un des transporteurs canadiens à bas prix qui offre des liaisons à partir de Montréal et de Québec, cessera ses activités dimanche après avoir achevé ses derniers vols. Cette décision chamboulera les plans des voyageurs qui comptaient sur la compagnie aérienne pour se déplacer pendant leurs vacances.

« Malheureusement, nous n’avons pas été en mesure d’obtenir un financement adéquat et nous avons demandé [de nous placer à l’abri] de nos créanciers, a expliqué le chef de l’exploitation de Lynx, Jim Sullivan, dans une note interne envoyée à ses employés que La Presse a pu consulter. Je sais que c’est un choc terrible pour beaucoup d’entre vous et ce n’est pas ainsi que notre histoire devait se dérouler. »

Cette décision de l’entreprise établie à Calgary survient moins de deux ans après son vol inaugural. L’entreprise exploitait en février de 12 à 15 vols par semaine à partir de Montréal.

La Presse avait récemment rapporté que Lynx avait eu des pourparlers avec un autre transporteur canadien à bas coûts, Flair Airlines, à propos d’un regroupement potentiel entre les deux compagnies. Ces discussions ne se concrétiseront visiblement pas.

Lynx Air au Québec

Destinations à partir de Montréal-Trudeau*

Vancouver, Calgary, St. John’s (Terre-Neuve), Las Vegas, Los Angeles, Orlando, Tampa Bay

Destinations à partir de Jean-Lesage (Québec)*

Toronto

*Destinations actuellement offertes

Dans sa note aux employés, Lynx attribue sa débâcle à l’inflation, aux prix du carburant, aux taux de change, aux coûts élevés de financement, aux frais imposés dans l’industrie aérienne au Canada ainsi qu’à la « tension concurrentielle ». Sur son site web, jeudi soir, un message prévenait déjà que les jours de la compagnie étaient comptés. Une page sur les options qui s’offrent aux clients touchés était déjà en ligne, mais uniquement en anglais.

Consultez la page de Lynx Air pour ses clients touchés

Options limitées

Lynx offre peu d’options à ses clients. En soirée, jeudi, La Presse avait déjà reçu des courriels de voyageurs dont le départ était prévu après le 25 février et qui se demandaient quoi faire. Le transporteur suggère à ceux qui avaient acheté un billet pour un vol après le 25 février de se tourner vers leur compagnie de carte de crédit pour se faire rembourser. Pour ses clients déjà en déplacement et dont le retour est prévu après la fin des activités, Lynx leur fait la même suggestion afin de récupérer leur argent pour la portion restante de leur voyage.

« Tout devient un casse-tête, souligne Jacob Charbonneau, président-directeur général de l’entreprise Vol en retard. Même si on se fait rembourser avant notre départ, il faut racheter de nouveaux billets. On parle de prix de dernière minute. Cela risque donc d’être plus dispendieux. Il peut aussi y avoir des conséquences si cela change les dates de voyage et que des réservations d’hôtel avaient été effectuées à destination. »

Au Québec, tout consommateur ayant fait affaire avec une agence de voyages pour acheter un billet peut se tourner vers le Fonds d’indemnisation des agents de voyages (FICAV). Il est plus rare que des consommateurs passent par une agence pour se procurer des billets auprès d’une compagnie à bas prix, reconnaît le dirigeant de Vol en retard.

En émergence

En dépit de ses ambitions, l’empreinte de Lynx était limitée dans le marché canadien. On compte neuf Boeing 737 Max 8 dans sa flotte. L’entreprise souhaitait, à terme, en exploiter 46. Certains signes laissaient présager qu’il y aurait des défis à surmonter chez Lynx. La compagnie n’avait toujours pas trouvé de successeur à son ex-présidente et cheffe de la direction Merren McArthur, qui avait quitté ses fonctions en septembre dernier. Indigo Partners LLC, la firme de l’homme d’affaires Bill Franke, est l’un des principaux actionnaires de Lynx.

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

Merren McArthur, ex-présidente et cheffe de la direction de Lynx Air

La démission surprise de Mme McArthur avait été annoncée en juin 2023, deux ans après son arrivée. La gestionnaire avait accepté de demeurer en poste quelques mois supplémentaires pour permettre de « sélectionner et de nommer un nouveau chef de direction », expliquait Lynx à l’époque.

« Avec les frais, les taxes et autres tarifs dans l’industrie aérienne, c’est difficile de faire sa place, souligne Robert Kokonis, président de la société de conseil Air Trav. Le marché est aussi très saisonnier au Canada. Il y a de l’achalandage dans le créneau domestique [intérieur] pendant l’été, mais en hiver, ce sont les destinations soleil qui dominent. Nous sommes aussi dans un pays très vaste où les régions populeuses ne sont pas à proximité les unes des autres, comme en Europe. Cela change la dynamique. »

Consultant dans l’industrie aérienne, Mike Arnot croit que la disparition de Lynx n’aura pas d’impact notable sur le prix des billets puisque la compagnie n’offrait pas « une énorme quantité de sièges dans le marché canadien ».

La fin de Lynx devrait laisser plus de place à Flair. Cette compagnie établie à Edmonton fait également face à des défis financiers. Selon des documents judiciaires, la compagnie doit 67,2 millions en impôts impayés à Ottawa, ce qui avait incité l’Agence du revenu du Canada (ARC) à obtenir une ordonnance de saisie et de ventes des biens de la compagnie aérienne. Les activités quotidiennes de Flair n’ont cependant pas été perturbées, puisque le transporteur dit avoir été en mesure de s’entendre avec le fisc.

Lynx Air en bref 

  • Lancement : 2022
  • Siège social : Calgary
  • Président : inconnu
  • Flotte visée : 46 avions