(New York) Pertes de pièces de carlingue en vol, problèmes de moteurs ou soucis mécaniques, les incidents sur des Boeing s’enchaînent depuis quelques mois. Il s’agit, pour des experts, d’un « alignement des planètes défavorable » découlant de problèmes de production et de maintenance.

Le dénonciateur, un ingénieur de Boeing qui a travaillé sur l’avion, a allégué que des sections du fuselage du 787 étaient mal fixées ensemble d’une manière qui pourrait affaiblir l’avion au fil du temps, a rapporté le journal.

La série noire

Depuis l’accident du 5 janvier sur un Boeing  737 MAX 9 d’Alaska Airlines aux États-Unis, quand une porte-bouchon s’est détachée en vol, les yeux sont rivés sur le constructeur américain.

United Airlines est particulièrement concernée : pédales de gouvernail bloquées, perte d’un pneu au décollage, pièce métallique du fuselage manquante, indicateurs de vitesse du vent défaillants, entre autres.

La compagnie à bas coût Southwest Airlines a également attiré l’attention quand une pièce du capot d’un moteur s’est en partie arrachée au décollage. Ou encore Delta, lorsqu’un pneu est tombé peu après que l’avion s’est élevé dans les airs.

Des incidents sur des avions en exploitation, tous constructeurs confondus, ne sont pas rares à travers le monde, mais certains sont parfois mentionnés dans les médias si des images spectaculaires sont disponibles ou s’il y a des victimes. Et, ces temps-ci, s’il s’agit de Boeing, mais son concurrent européen Airbus n’est pas en reste.

La sortie de piste jeudi d’un Boeing 737-300 à Dakar (Sénégal) a fait onze blessés, dont quatre graves.

La veille, le train d’atterrissage d’un Boeing 767 cargo du groupe américain Fedex ne s’est pas déployé. La photo de l’appareil, nez sur le tarmac de l’aéroport d’Istanbul (Turquie), a circulé dans les médias et sur les réseaux sociaux.

Les causes techniques

Pour les experts, il y a trois problèmes possibles.

Un problème de conception, d’abord, comme ce fut le cas pour les accidents de deux Boeing 737 MAX 8 en 2018 et en 2019, qui ont fait 346 morts.

En revanche, l’incident d’Alaska Airlines – qui a fait quelques blessés légers – relève d’un problème de production. L’appareil, un Boeing 737 MAX 9, avait été livré en octobre.

Le rapport préliminaire de l’Agence américaine de sécurité des transports (NTSB), publié le 6 février, révèle que « quatre boulons prévus pour empêcher que la porte-bouchon ne se déplace vers le haut étaient manquants ».

Ces boulons avaient été retirés à l’usine de Boeing pour remplacer des rivets endommagés.

La troisième cause, d’après les experts, est un problème de maintenance. Et c’est le point commun de la plupart des incidents repérés ces derniers mois.

Si les deux premières causes relèvent de l’avionneur, la troisième est du ressort de la compagnie aérienne.

« Très certainement » du contrôle qualité de la société de maintenance, souligne Bertrand Vilmer, expert aéronautique et consultant au cabinet Icare aéronautique.

« Une fois les avions livrés, Boeing n’intervient plus », abonde Richard Aboulafia, directeur du cabinet de conseil AeroDynamic Advisory, insistant sur le « problème dans le secteur de la maintenance dans le monde entier ».

Faut-il s’inquiéter ?

« Il n’y a pas eu un seul décès depuis bien plus de dix ans aux États-Unis alors que des millions de personnes prennent l’avion chaque année », relève M. Aboulafia, soulignant qu’un grand nombre de personnes meurent sur les routes chaque jour.

Airbus n’est pas épargné par les incidents, y compris de production, comme la présence d’un composant contaminé dans des pièces de moteurs Pratt & Whitney, qui affecte des centaines d’avions, cloués au sol pendant de longs mois.

« Ça se sait, mais dans un petit comité », car c’est moins médiatisé, relève M. Vilmer, citant également un problème de peinture de fuselages pour Qatar Airways.

Mais « si vous cherchez les problèmes, vous allez les trouver », relativise M. Aboulafia, relevant que des milliers d’avions volent chaque jour dans le monde.

« Chaque incident survenu sur un avion Boeing cette année a fait les gros titres, laissant penser que les avions Boeing ne sont pas sûrs », notaient, fin mars, les analystes du gestionnaire d’actifs Bernstein.

« La réalité est que le nombre d’incidents aux États-Unis sur les avions Airbus et Boeing jusqu’à présent cette année est proportionnel » au nombre de leurs avions dans les flottes des compagnies américaines, affirment-ils.

D’après le cabinet spécialisé Cirium, la flotte commerciale américaine actuellement en service compte 4769 appareils, dont 60 % sont des Boeing et la quasi-totalité du solde des Airbus.

L’Association professionnelle Airlines for America indique sur l’internet que, chaque jour, les compagnies aériennes américaines assurent plus de 26 000 vols et transportent 2,6 millions de passagers à travers près de 80 pays.

Mardi, le titre de Boeing a reculé de 1,89 %, ou 3,44 $ US, à 178,12 $ US à New York.