Des grèves aux incendies de forêt, bien des facteurs peuvent imposer une perturbation du revenu

(Toronto) Qu’il s’agisse d’une évacuation liée à un incendie de forêt, d’une grève ou d’une maladie inattendue, des experts rappellent que les Canadiens aux prises avec une perte de revenu à court terme devraient gérer ces perturbations autrement qu’une perte de revenu à plus long terme comme une mise à pied.

« J’ai vu des gens renoncer à plusieurs dépenses à court terme, sachant que cela ne durerait que très peu de temps », affirme Mark Kalinowski, éducateur financier et conseiller à la Credit Counselling Society.

« Si on sait que c’est court et qu’on a un objectif quant au moment où on retournera au travail et où les choses reviendront à la normale, lorsqu’on établit son budget, on peut se dire : “Vous savez quoi, je n’ai pas besoin de Netflix ce mois-ci, je n’ai pas besoin d’aller au café pour acheter du café, […] pour l’instant, je peux reporter ces choses.” »

C’est une stratégie différente d’une modification de revenu à long terme, quand on a encore besoin « d’avoir un peu de bonheur dans sa vie », explique-t-il, parce qu’on ne sait pas combien de temps cela pourrait prendre pour trouver son prochain emploi. Dans les cas d’urgence, chaque dollar compte.

Des dizaines de milliers de personnes ont été forcées d’évacuer leur domicile, laissant derrière elles leurs maisons et leurs emplois, dans les Territoires du Nord-Ouest et en Colombie-Britannique au cours des dernières semaines, alors que les incendies de forêt faisaient rage.

« Dans cette situation, on a un tas de facteurs de stress différents qui pèsent sur nous […] et puis on a le facteur de stress financier en plus », souligne M. Kalinowski.

Dans ce type de situations sévères, M. Kalinowski suggère aux gens de discuter avec leurs prêteurs du report temporaire des paiements de leur prêt hypothécaire, de leur carte de crédit ou de leur prêt automobile, une fois qu’ils sont hors de danger immédiat et un peu plus calmes.

Face à une perte de revenu soudaine, Kalee Boisvert, conseillère financière chez Raymond James, convient que la première étape consiste à réduire les dépenses et à suspendre l’épargne.

C’est également là qu’intervient un fonds d’urgence, souligne-t-elle.

Il est maintenant temps de puiser dans ces réserves. Avoir un fonds consacré aux circonstances imprévues est une habitude prudente. Il ne faut pas hésiter à utiliser ces ressources pour faire face à la situation actuelle.

Kalee Boisvert, conseillère financière chez Raymond James

En cas de grève

Entre-temps, des travailleurs syndiqués de partout au pays, notamment chez le radiodiffuseur public ontarien TVO et chez Crown Corporation, la société d’assurance automobile du Manitoba, sont actuellement en grève. Jusqu’à récemment, les employés des épiceries de Metro de la région torontoise et les débardeurs des ports de la Colombie-Britannique étaient également en arrêt de travail. D’autres syndicats représentant les employés des traversiers de la Colombie-Britannique et les travailleurs du secteur canadien de l’automobile pourraient aussi débrayer si les négociations syndicales échouaient.

En règle générale, les syndicats disposent d’un fonds pour payer les travailleurs pendant qu’ils sont en grève, mais la somme est généralement inférieure aux gains habituels de l’employé. Si l’arrêt de travail se prolonge suffisamment longtemps, il existe également un risque que le fonds se retrouve à court d’argent.

« Si on connaît la période prévue de la perturbation des revenus, il faut créer un budget qui tient compte des ressources disponibles et des dépenses prévues. Même si la durée est incertaine, la planification des mois à venir peut clarifier les options financières », observe Mme Boisvert.

Bien que l’idée générale pour un fonds d’urgence soit de mettre de côté suffisamment d’argent pour couvrir trois à six mois de dépenses, la bonne taille dépendra de la situation de chaque individu. Un ménage à deux revenus sans enfants pourrait avoir besoin de moins d’argent de côté pour les urgences qu’un parent seul avec deux enfants, explique Mme Boisvert.

« Même si on n’a pas grand-chose à mettre de côté, il ne faut pas s’inquiéter. Il faut commencer par ce qu’on peut gérer confortablement. Une somme d’à peine 25 $ par mois ou par chèque de paie peut faire une différence importante au fil du temps », poursuit-elle.

Mme Kalinowski pense que beaucoup ont du mal à épargner pour les situations d’urgence, peut-être parce qu’ils ont l’impression d’épargner pour quelque chose qui pourrait ne pas se produire alors que la hausse du coût de la vie gruge de plus en plus le budget des ménages.

Un sondage réalisé par Comptables professionnels agréés Canada la semaine dernière a révélé qu’environ un répondant sur quatre ne serait pas en mesure de recueillir 500 $ en espèces en une journée sans emprunter ou vendre un actif.

C’est un indicateur que de nombreuses personnes ont des difficultés à gérer leur trésorerie, selon l’enquête.

Cependant, une autre solution potentielle « que beaucoup oublient », selon Mme Kalinowski, consiste à obtenir une ligne de crédit à l’avance.

« J’appelle cela un crédit de sécurité parce que c’est un crédit que nous n’avons vraiment aucune intention d’utiliser, mais si quelque chose de grave arrive, il est là pour nous », explique-t-elle.

« L’astuce pour obtenir une marge de crédit sur sa valeur domiciliaire ou une marge de crédit personnelle – qu’on n’utilisera jamais à moins que quelque chose de grave ne se produise – est d’en faire la demande pendant qu’on travaille et que les revenus sont là. »

Mme Boisvert ajoute que les Canadiens faisant face à une perte de revenu prolongée devraient envisager toutes les ressources disponibles, y compris l’accès à des comptes de placement ou à des régimes de retraite, si nécessaire.

« Il faut donner la priorité aux options d’emprunt avec les taux d’intérêt les plus bas, affirme-t-elle, et ne pas oublier que les retraits effectués dans les comptes de retraite auront des implications fiscales. »