Dans L’argent et le bonheur, notre journaliste Nicolas Bérubé offre chaque dimanche ses réflexions sur l’enrichissement. Ses textes sont envoyés en infolettre le lendemain.

Bon, désolé, je voulais trouver une amorce originale à ce texte, mais finalement, j’ai pris une pause, et j’ai décidé d’aller au spa…

OK, elle était facile.

Si certains ne savent pas de quoi je parle, vous irez lire l’excellent dossier de ma collègue Marie-Claude Malbœuf sur les cégépiens qui sèchent leurs cours.

Lisez le dossier de La Presse

Ce dossier m’a bien fait sourire. On y lit que des jeunes décident de quitter leurs cours à la pause. La raison ? Ils devaient aller se reposer au spa. Ou bien aller faire l’épicerie...

Est-ce que tout le monde est à sa place au cégep ? Ce n’était pas le cas quand j’y étais, et ce n’est de toute évidence pas encore le cas aujourd’hui.

Chiffres encourageants

Ça ne doit pas nous faire oublier que les taux de diplomation au cégep et à l’université sont à des niveaux records.

En 2010, 56 % des jeunes Québécois de 17 à 24 ans accédaient aux études collégiales. Une décennie plus tard, ils étaient 65 % à y poursuivre des études postsecondaires.

Et près de 30 % des personnes âgées de 25 à 64 ans détiennent un diplôme universitaire au Québec, un pourcentage en hausse depuis des générations. En 1960, à peine un jeune adulte québécois sur dix fréquentait l’université.

Bref, jamais les Québécois n’ont été aussi instruits qu’aujourd’hui.

Depuis la nuit des temps, les gens aiment se moquer de la jeune génération, lui trouver toutes sortes de défauts. Paresse, ignorance, manque de détermination, etc.

Ce n’est pas dans ce bateau rempli à craquer que je veux embarquer quand je dis que les jeunes ne l’ont jamais eu aussi facile. Je parle plutôt des moyens de s’enrichir.

Ça n’a jamais été aussi facile qu’aujourd’hui d’ouvrir un compte de courtage auprès d’une institution comme Wealthsimple ou Questrade, et d’y placer de l’argent dès ses 18 ans. Ça n’a jamais été aussi facile d’investir dans des fonds négociés en bourse (FNB), des produits diversifiés aux frais de gestion modiques, qui ne demandent aucune connaissance particulière. En fait, moins un investisseur s’intéresse à ses placements, plus il s’enrichit à long terme.

Mais beaucoup de jeunes ne le font pas – y compris ceux qui seraient en position de le faire en raison de leurs revenus. C’est ce que déplore Allan, un lecteur qui n’est pas impressionné par le défaitisme qu’il sent chez les jeunes autour de lui.

« J’ai l’impression que beaucoup de jeunes n’investissent pas, car ils croient qu’ils n’ont pas d’avenir, m’écrit-il. Ils croient que la planète est foutue et que le système est fait pour que seuls les ultrasriches puissent s’enrichir. Ce pessimisme les empêche de penser à long terme. Alors même si vous leur donnez tous les trucs pour qu’investir soit très facile, ils ne le feront pas ! »

Si de jeunes adultes me tenaient ce discours, je leur répondrais : quelle est la solution de rechange ?

Est-ce que vous voulez vraiment y aller « yolo » et vous retrouver à 40 ans avec 700 $ dans votre compte bancaire ? Et à 65 ans avec 2000 $ à votre nom ? Ou, pire encore, avec des dettes de consommation sur votre marge de crédit ou votre carte de crédit ?

Regardez aujourd’hui les gens de 40 ans et de 65 ans qui sont dans cette situation. Ce n’est pas une position agréable. Pourquoi vouloir se la souhaiter à soi-même ?

Oui, le réchauffement climatique fait peur. Mais, au jour le jour, je pense que l’hypothèse de base est de présumer que les besoins des humains vont continuer d’être comblés, et que la société va continuer de fonctionner.

Selon l’ONU, nous devrions être près de 10 milliards en 2050, comparativement à 8 milliards aujourd’hui. Au Canada, on pourrait frôler les 50 millions d’habitants en 2050, comparativement à 40 millions aujourd’hui, d’après Statistique Canada.

C’est difficile de voir comment la planète passerait de 8 milliards à 10 milliards d’humains, ou comment le Canada passerait de 40 millions à 50 millions d’habitants, sans vivre de croissance économique. En passant, croissance économique ne veut pas automatiquement dire plus de CO2 relâché dans l’atmosphère. Le Canada émettait 18 tonnes de CO2 par personne en l’an 2000, comparativement à 14 tonnes aujourd’hui. Durant cette période, le produit intérieur brut (PIB) par habitant a presque doublé au pays. Un pays comme la France émet actuellement 9 tonnes de CO2 par habitant, et voit son niveau de vie augmenter année après année.

Mauvaise image

Malheureusement, l’épargne a aussi une mauvaise image chez les jeunes, car elle est vue comme un enjeu noir ou blanc : ou bien on épargne, ou bien on a du plaisir dans la vie. C’est complètement faux. Avec la magie des intérêts composés, de petites sommes investies pendant longtemps peuvent donner de grosses sommes. C’est que notre cerveau a du mal à comprendre les rendements exponentiels.

Par exemple, 400 $ (moins qu’un paiement d’auto) investis chaque mois dans un portefeuille de FNB diversifié à 7 % de rendements moyens par année (moins que les rendements moyens historiques) de l’âge de 25 ans à l’âge de 65 ans donnent 1 million. De ce million, moins de 200 000 $ proviennent des sommes investies, alors que plus de 800 000 $ viennent de la croissance.

Plus on commence jeune, moins on doit investir d’argent, puisque chaque dollar investi pourra travailler pour nous pendant plus longtemps.

Cela nous amène à Félix, un jeune lecteur de cette rubrique qui a compris que l’enrichissement n’a pas à être compliqué. Peu importe notre âge.

« J’ai 19 ans, et je suis dans la tranche d’âge parfaite pour commencer à investir », m’écrit-il.

Félix a actuellement 16 000 $ de côté, et épargne 300 $ par mois, qu’il investit dans un portefeuille de FNB diversifiés.

« Je vais regarder mon portefeuille monter ET descendre avec le temps, mais quand je vais avoir 55 ans, mon portefeuille va avoir augmenté à coup sûr. Donc, pourquoi m’inquiéter pour les six prochains mois ? J’ai une auto bon marché pour me déplacer. J’ai la chance d’encore vivre chez mes parents, donc je peux me permettre de mettre plus de côté. Comme mon coach me dit toujours : “À ton âge, investis et dors. Et va travailler, bien sûr.” »

Félix est en train de bâtir des fondations financières qui vont changer sa vie. Il aura moins besoin du crédit, moins besoin des banques. Il aura des options plus tard.

À 19 ans, on peut choisir de dépenser son argent au spa. Ou on peut être patient et un jour acheter le spa.

À chacun son choix.