Un jeudi sur deux, La Presse propose un retour sur ce qui retient l’attention dans le domaine de l’immobilier résidentiel et commercial

Au moment où les mises en chantier sont en recul de 54 % en un an, Cadillac Fairview commence la construction d’une tour de 500 logements locatifs dans le lotissement Quad Windsor, près du Centre Bell, dans le sud-ouest du centre-ville de Montréal.

Pour donner une idée de la durée probable de l’actuelle crise du logement, la construction de la tour de 35 étages s’étirera sur presque trois ans et les logements neufs seront offerts début 2026 seulement.

« On a une approche à long terme », répond Brian Salpeter, vice-président principal au développement de l’est du Canada de Cadillac Fairview, quand on lui demande ce qui a convaincu Cadillac d’aller de l’avant avec son projet malgré la hausse des coûts de construction et de financement.

« On a notre site depuis un bon bout de temps, poursuit-il. C’est important de continuer à investir dans nos communautés, dont Montréal, surtout au centre-ville. C’est une excellente nouvelle pour le centre-ville afin de continuer à y ramener des gens pour y travailler et y habiter.

« Il y a une pénurie de logements. C’est important de continuer à ajouter au parc de logements parce qu’il y a toujours une demande. »

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Brian Salpeter, vice-président principal au développement de l’est du Canada de Cadillac Fairview

Étant donné que le chantier de Cadillac Fairview constitue une rare tour résidentielle à sortir de terre au centre-ville en 2023, il devient difficile dans les circonstances d’assister à une remontée conséquente des mises en chantier avant probablement quatre ans au minimum, dans les zones centrales notamment.

L’immeuble d’une valeur supérieure à 300 millions sera érigé dans la partie nord-ouest du quadrilatère formé des rues Saint-Antoine Ouest, Peel, Saint-Jacques Ouest et Jean-D’Estrées.

Il s’agit de la première phase de l’aménagement du quadrilatère, qui peut recevoir jusqu’à trois bâtiments au total, dont au moins un autre sera à vocation résidentielle (environ 800 logements).

« Comme vous le savez, le site au sud de Saint-Jacques, juste en face de l’ETS [École de technologie supérieure], nous appartient toujours. On regarde pour continuer la densification du centre-ville avec d’autres tours résidentielles. On a la possibilité d’ajouter au-delà de 1500 logements sur ce site », dit M. Salpeter.

Pour ce qui est de la phase 1, la future tour reposera sur un basilaire de 11 étages. Le bâtiment a été conçu par les cabinets d’architectes NEUF et Zeidler. Reliance a été retenu comme entrepreneur général.

Les loyers seront déterminés en fonction des prix courants de 2026, indique M. Salpeter. Il n’y a pas de volet de logement social parce que les autorisations ont été obtenues avant l’entrée en vigueur du Règlement pour une métropole mixte (aussi appelé 20-20-20).

Un local commercial d’environ 850 mètres carrés est prévu pour y loger une épicerie jumelée à un café ou un restaurant.

Les solutions de la BN à la crise du logement

Instituer un processus diligent de médiation, à la fois abordable et efficace, en cas de conflit portant sur la densité de projets résidentiels ; céder gracieusement des terrains de propriété publique à des organismes à but non lucratif pour construire du logement abordable ; autoriser des projets d’usage mixte à la verticale pour réduire les coûts : telles sont les solutions proposées par le responsable du financement immobilier commercial de la Banque Nationale (BN) pour augmenter l’offre de logements sur le territoire.

« Pour favoriser la densité autour des pôles de transports en commun, tels le REM ou le métro, le gouvernement provincial pourrait intervenir à l’occasion pour les projets qui sont dans l’impasse à la suite d’un différend entre les villes et les promoteurs », explique René Demers, premier vice-président, entreprise et gestion privée – immobilier, de la BN.

« Il faudrait un processus d’escalade et d’appel entre les promoteurs et les villes. Il faut avoir quelque chose de structuré pour bien encadrer ce processus dans le temps. »

PHOTO FOURNIE PAR LA BANQUE NATIONALE

René Demers, premier vice-président, entreprise et gestion privée – immobilier, de la Banque Nationale

Pour ce qui est de l’idée de la cession de terrains, elle vise à contrecarrer la hausse exorbitante de la valeur des terrains qui se répercute sur le coût des logements neufs et qui finit par rendre les habitations inabordables pour le commun des mortels.

« Pourquoi ne pas mettre ces terrains à la disposition de coopératives d’habitation pour offrir des logements abordables pour les familles canadiennes avec une pérennité ? », demande M. Demers.

Au lieu d’une cession pure et simple, le financier imagine le gouvernement accorder une emphytéose à une coopérative, le gouvernement conservant la propriété du terrain.

La troisième idée porte sur les projets verticaux. « On a de la difficulté à intégrer des usages mixtes sur une même propriété en développement vertical. »

Par usage mixte, il cite une bibliothèque, un CHSLD, une école, des logements sociaux, etc.

« Actuellement, on construit une belle bibliothèque sans penser ajouter quatre ou cinq étages de logements abordables ou sociaux, déplore-t-il. Ça viendrait réduire le coût des projets actuels parce que si on est capable de faire trois projets à la verticale, ça revient moins cher que de faire trois projets avec trois fondations sur trois terrains distincts. »

Banquier comptant 30 ans d’expérience, M. Demers est responsable depuis 11 ans du financement immobilier commercial au Canada pour la Banque Nationale. Avec son équipe, il gère environ 25 milliards en prêt de construction et en financement hypothécaire de long terme. Il se propose de rencontrer la ministre responsable de l’Habitation, France-Élaine Duranceau, pour lui exposer ses idées et solutions potentielles.