Au tour de l’opposition à l’hôtel de ville de critiquer la réforme du Règlement pour une métropole mixte (RMM) qui aura pour effet, selon ses détracteurs, de faire augmenter le prix des logements neufs à Montréal en pleine crise du logement.

L’administration municipale a tenu une assemblée publique de consultation jeudi soir sur les modifications qu’elle propose à son règlement.

« Malheureusement, les modifications proposées par l’administration Plante au Règlement n’amènent pas d’incitatifs qui permettraient d’accélérer la construction de logements, déplore dans une déclaration écrite Julien Hénault-Ratelle, porte-parole de l’opposition officielle en matière d’habitation à l’hôtel de ville de Montréal. L’administration Plante doit retourner à la table à dessin et arrêter de s’entêter avec des solutions nuisibles au développement. »

Ensemble Montréal déplore par ailleurs que l’assemblée de consultation publique soit menée par le responsable de l’urbanisme et non pas par une commission permanente de la Ville. « C’est pourtant la norme lors de modifications réglementaires d’une telle envergure », soutient le porte-parole de l’opposition.

Les modifications proposées par la Ville de Montréal au règlement sur la contribution des promoteurs au logement social et abordable vont faire augmenter de plus de 3000 $ le coût d’un logement neuf à Montréal, selon les calculs de l’Institut de développement urbain du Québec (IDU), opposé au règlement.

Lisez « Règlement pour une métropole mixte : des logements neufs plus chers à Montréal »

Le RMM impose aux constructeurs d’habitations de contribuer au parc de logements sociaux et abordables de trois façons : la construction de logements sociaux sur le site du projet, la vente de terrain à rabais à la Ville ou encore une contribution financière.

Entré en vigueur en avril 2021, le règlement a débouché jusqu’à présent sur des résultats mitigés.

« Expérience ratée »

En réaction, l’administration municipale propose de réformer son règlement en augmentant jusqu’à 82 % les contributions financières exigées des promoteurs, plus 5 % d’indexation par an pendant trois ans. L’ajustement se fera graduellement sur la période.

En agissant ainsi, la Ville cherche à décourager les promoteurs de payer la pénalité et à les inciter à choisir à la place la cession de terrain ou encore la construction d’unités sociales clés en main.

Dans une déclaration envoyée jeudi à La Presse, la Ville souligne que le RMM est un projet de société de long terme, qui vise à assurer l’abordabilité du parc immobilier. Elle mentionne que les projets de 20 unités et moins et la transformation de bureaux au centre-ville en logements sont exemptés de l’application du RMM.

Le professeur émérite Mario Polèse se montre cinglant à l’endroit du règlement et de sa version modifiée dans un mémo qui a paru le 7 décembre sur le site internet de l’Institut C.D. Howe, intitulé Leçons à tirer de l’expérience ratée de Montréal.

« Le fait que les promoteurs préfèrent payer une pénalité (ou décident simplement de ne pas construire à Montréal) n’aurait dû surprendre personne, écrit-il. Pourtant, la ville n’a pas l’intention de simplifier le règlement, mais plutôt d’augmenter la pénalité, tout en augmentant la compensation pour les terrains transférés. »

Une fois bonifiée, la compensation sera équivalente à 60 % de la valeur marchande du terrain cédé.

Gatineau cité en exemple

Cette approche de recourir au bâton plutôt qu’à la carotte est aussi désapprouvée par les constructeurs de maisons regroupés au sein de l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec (APCHQ).

« En pleine crise de l’habitation, les incitatifs à construire sont inexistants », soutient le président-directeur général de l’APCHQ, Maxime Rodrigue.

Avec le RMM, au lieu de favoriser et d’inciter la construction, on décourage en imposant des pénalités. Il faut trouver des façons d’y arriver pour que tout le monde en sorte gagnant parce qu’en ce moment, les besoins sont criants.

Maxime Rodrigue, président-directeur général de l’APCHQ

L’APCHQ propose la mise en place dès maintenant de mesures incitatives, comme l’a fait la Ville de Gatineau en septembre 2023 avec son programme de subvention ou une approche « Bonus zoning », pour augmenter l’offre en matière de logements dans la métropole.

Aussi, l’Association soulève l’importance de constituer un comité de gestion du Fonds du RMM pour assurer une reddition de comptes des sommes payées en pénalité par les promoteurs, plus de 25 millions jusqu’à présent. L’IDU demande la même chose.