(Toronto) La cryptomonnaie a atteint cette semaine des sommets jamais vus sur les marchés depuis plus de deux ans après qu’un régulateur américain a approuvé 11 fonds négociés en Bourse (FNB) liés à la cryptomonnaie, suscitant la perspective d’une nouvelle ère pour la monnaie numérique, mais aussi un appel à la prudence des investisseurs.

En approuvant les FNB de sociétés comme BlackRock et Franklin Templeton, le président de la Commission des valeurs mobilières (SEC) des États-Unis, Gary Gensler, a déclaré que cette décision ne signifiait aucune approbation ni aucun endossement de la cryptomonnaie.

« Les investisseurs doivent rester prudents face à la myriade de risques associés au bitcoin et aux produits dont la valeur est liée à la crypto », a-t-il déclaré mercredi dans un communiqué.

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Gary Gensler, président de la Commission des valeurs mobilières des États-Unis

Les dernières nouvelles ne changent pas grand-chose à l’examen de l’opportunité d’investir dans la cryptomonnaie, a soutenu Sadiq Adatia, directeur des investissements chez BMO Gestion mondiale d’actifs.

« Rien n’a changé quant aux raisons pour lesquelles vous voudriez en détenir ou pourquoi vous ne le voudriez pas », a-t-il affirmé.

Des frais réduits

Tout de même, cette option permet effectivement aux investisseurs américains d’acheter de la cryptomonnaie plus facilement et à moindre coût, ce qui contribue à susciter davantage d’intérêt, a-t-il indiqué. Mais les investisseurs canadiens ont la possibilité d’acheter des FNB dont les avoirs sont placés en cryptomonnaies depuis 2021.

Les approbations aux États-Unis rendront probablement ces avenues moins dispendieuses pour les investisseurs canadiens, à mesure que la concurrence fera baisser les frais de gestion, a-t-il expliqué.

Déjà, Fidelity Investments Canada a annoncé jeudi avoir réduit ses frais de 0,95 % à 0,44 %, à compter de vendredi, sur son Fonds Fidelity FNB Avantage Bitcoin. Pendant ce temps, BlackRock est sorti avec l’une des options les moins chères, disponible à 0,12 % la première année.

M. Adatia estime que même si l’option des fonds négociés en Bourse est plus simple, les investisseurs doivent néanmoins être prudents, car elle reste volatile.

Le bitcoin a grimpé d’environ 5 % pour atteindre près de 49 000 $ US jeudi, premier jour de négociation des FNB américains, avant d’abandonner une grande partie de ces gains, oscillant autour de 43 500 $ US vendredi à midi.

La cryptomonnaie s’échangeait autour de 16 000 $ US en décembre 2022 et a culminé à plus de 68 000 $ US en octobre 2021.

De grandes fluctuations

« Il y a de grandes fluctuations que peu d’investisseurs sont capables de gérer, a souligné M. Adatia. Lorsque vous avez des mouvements extrêmes, les gens entrent au mauvais moment et sortent au mauvais moment. »

Il a déclaré que ceux qui envisagent un investissement dans la cryptomonnaie devraient planifier sur un horizon à long terme et être capables de surmonter les obstacles sur la route.

D’autres considèrent les récentes approbations comme plus importantes pour la cryptomonnaie et le segment en général.

« C’est certainement un moment décisif pour l’industrie et la classe d’actifs. Avec l’approbation d’un FNB, le bitcoin entre en quelque sorte dans le firmament financier », a déclaré Alex Tapscott, directeur général du groupe d’actifs numériques chez Partenaires Ninepoint.

Le lancement des FNB américains et le fait que les principaux gestionnaires d’actifs en parlent à leurs clients pourraient contribuer à relancer le débat autour de l’actif et du potentiel de la technologie qui le sous-tend.

« Au contraire, certaines des choses les plus significatives et les plus marquantes sont encore à venir », a-t-il soutenu.

Bien qu’il n’offre pas de conseils en investissement, il affirme que le point de vue de Ninepoint est qu’une certaine exposition aux actifs numériques est très utile dans le cadre d’un portefeuille bien diversifié.

Ninepoint a diversifié ses propres offres, convertissant l’année dernière un premier FNB de cryptomonnaie « pure-play » en un portefeuille plus large pour couvrir une gamme de sociétés liées à la chaîne de blocs ainsi qu’une exposition au bitcoin et à l’Ether.

À mesure que le secteur mûrit et que la classe d’actifs se développe, adopter une approche de portefeuille est une voie beaucoup plus judicieuse que de posséder un seul actif, n’est-ce pas ?

Alex Tapscott, directeur général du groupe d’actifs numériques chez Partenaires Ninepoint

En ce qui a trait à l’évaluation de la cryptomonnaie, M. Tapscott a déclaré qu’il était difficile de bien la cerner, mais qu’en fin de compte, cela dépendait de son utilité en tant que réserve de valeur et en tant que moyen d’échange.

La valorisation boursière de la cryptomonnaie, d’environ 1000 milliards, ne représente encore qu’un dixième environ de celle de l’or, tout en offrant de nombreux avantages pour l’économie numérique, a-t-il souligné.

La comparaison avec l’or

Le lancement des FNB sur l’or au début des années 2000 a entraîné une augmentation notable de la classe d’actifs, et Alex Tapscott s’attend à voir un effet similaire avec le bitcoin, avec déjà plus de 4,5 milliards négociés dans les nouvelles offres.

Il existe des différences notables entre les paris sur les métaux précieux et les cryptomonnaies que Gary Gensler a soulignées lors de l’approbation des produits négociés en Bourse basés sur le bitcoin.

« Les actifs sous-jacents des FNB sur les métaux ont des usages grand public et industriels, alors qu’en revanche, le bitcoin est avant tout un actif spéculatif et volatil qui est également utilisé pour des activités illicites, notamment les rançongiciels, le blanchiment d’argent, l’évasion des sanctions et le financement du terrorisme », a-t-il déclaré.

Et même si l’intérêt est grand, certains grands gestionnaires d’actifs aux États-Unis ont décidé de rester à l’écart.

Vanguard, par exemple, a déclaré qu’il ne lancerait pas de FNB liés à la cryptomonnaie.

« Notre point de vue est que ces produits ne correspondent pas à notre offre axée sur des classes d’actifs telles que les actions, les obligations et les liquidités, que Vanguard considère comme les éléments constitutifs d’un portefeuille d’investissement à long terme bien équilibré. »