La pandémie aura-t-elle favorisé la féminisation des finances ? L’avenir le dira. Mais à tout le moins, elle aura ouvert la porte à une révolution de l’organisation du travail qui pourrait être bénéfique. C’est le constat que dresse Françoise Lyon, présidente et associée directrice de DGC Capital, qui assume la présidence du conseil d’administration de l’Association des femmes en finance du Québec (AFFQ).
Il y a à peine 15 mois, bien des sociétés ne savaient pas ce qu’était le télétravail, et encore moins si cela était possible dans leur cas. Mais elles le savent maintenant. « Toutes ont dû l’adopter, et parce qu’il a démontré son efficacité, le télétravail est là pour de bon », dit Françoise Lyon.
Une révolution de l’organisation du travail va s’orchestrer dans la plupart des entreprises, qui vont réorganiser complètement la configuration des bureaux, dégageant ainsi des économies qui pourront être affectées à d’autres postes, ce qui permettra d’augmenter l’efficacité, selon elle.
Le secteur immobilier sera également mis à contribution. Les tours résidentielles pourront fournir des salles de travail communes pour ceux qui auront besoin d’espace. L’appétit pour de plus grandes maisons va augmenter, ce qui constituera un renversement de la tendance actuelle. « Grâce à l’économie de temps qu’entraînera la diminution des déplacements, on peut prévoir une importante augmentation de productivité », croit Françoise Lyon.
Télétravail et visibilité
Les perspectives quant aux femmes en finance pourraient être fort intéressantes, explique Marie-Hélène Noiseux, actuaire de formation et enseignante à l’UQAM, mais aussi membre de nombreux comités de placement d’institutions et de caisses de retraite, endroits où les femmes se font rares, admet-elle.
Le passage au télétravail a apporté beaucoup de flexibilité, car les femmes peuvent mieux s’organiser, ce qui les encourage à vouloir demeurer sur le marché du travail. Le rappel au bureau se fera probablement à mi-temps, soit deux ou trois jours par semaine. Mais les femmes devront se donner de la visibilité, ce qui ne sera pas facile étant donné que le réseautage demeure pour elles un problème que la pandémie n’a fait qu’exacerber, selon Mme Noiseux.
L’AFFQ plus active que jamais
Dès la mise en place des premières mesures sanitaires, l’AFFQ est passée rapidement du présentiel au virtuel et a adapté ses activités afin de faire face à la nouvelle réalité, explique Martine Cantin, directrice générale. « On voulait s’assurer que nos femmes aient les mêmes chances qu’auparavant dans ce nouvel environnement », dit-elle.
Les impacts de la pandémie sur les femmes travaillant en finance ont généralement été positifs, estime Françoise Lyon. La dernière année, pour particulière qu’elle ait été, a permis à l’AFFQ de faciliter l’accès à ses activités.
La participation dans un contexte virtuel était plus facile, ce qui nous a permis d’augmenter le nombre d’activités, ainsi que le nombre de membres.
Françoise Lyon, présidente du conseil d’administration de l’Association des femmes en finance du Québec
« On a pu également accélérer notre virage numérique et même organiser un gala électronique », ajoute-t-elle.
Plus de diversité
Post-pandémie, on doit s’attendre à plus de diversité chez les professionnels de la finance. Les choses avaient commencé à changer avant la pandémie, note Françoise Lyon, et elle croit que la dernière année n’aura fait qu’augmenter la volonté des employeurs de se doter d’une plus grande diversité au sein du personnel.
L’urgence d’engager plus de femmes était certainement perceptible dans les institutions financières qui mettaient en place depuis quelque temps des programmes de promotion adéquats afin d’attirer plus de femmes. « Les institutions ont compris qu’elles doivent s’adapter à la clientèle, qui est souvent composée en bon nombre de femmes », dit la présidente de l’AFFQ.
Encore un boys club ?
L’AFFQ compte un membre masculin sur son conseil d’administration, soit Martin Gagnon, premier vice-président à la direction, gestion de patrimoine, Banque Nationale. Il reconnaît que le secteur financier conserve cette étiquette de boys club. Mais il n’y a pas de raison que cela persiste, car l’argument selon lequel le talent disponible chez les femmes pour les postes de direction dans le secteur financier ne serait pas suffisant ne tient plus la route, selon lui.
Dans les conseils d’administration, on a besoin d’expérience diversifiée de haut niveau, explique M. Gagnon. « Il n’y a pas d’excuse pour que l’on n’atteigne pas la parité hommes-femmes », dit-il.
Un gala virtuel
Pandémie oblige, l’Association des femmes en finance du Québec présente pour la deuxième année de suite son gala annuel sous la forme d’une « web-célébration ». Sur le thème « L’unité, une force essentielle des talentueuses », la soirée animée par Pénélope McQuade et Nicolas Ouellet se tiendra le jeudi 27 mai prochain. Cette année, le prix Initiative pour l’avancement des femmes en finance est remis au programme Femmes en investissement de CFA Montréal. Voyez qui sont les autres finalistes et lauréates de cette année.