Benjamin Prince, 33 ans, a quitté la France l’an dernier avec sa conjointe pour s’installer au Québec et réaliser un MBA intensif à HEC Montréal. Alors qu’il a travaillé auparavant en finance, en gestion de projet et en politique, il a appris dans le MBA à faire équipe avec des gens actifs dans des secteurs d’activité complètement différents, en plus d’être d’origines et de cultures variées.

« Dans le MBA, mon cerveau a appris à s’adapter à la diversité, raconte-t-il. J’ai compris que si une personne pense d’une façon et une autre autrement, ce n’est pas parce qu’une a tort et que l’autre a raison, mais parce que les deux ont des points de vue différents. »

La diversité des cohortes de MBA est d’ailleurs frappante pour Kevin Johnson, directeur du programme de MBA à HEC Montréal.

« Le MBA attire une clientèle sociodémographique et professionnelle très différente par rapport à ce que c’était avant, affirme-t-il. Les étudiantes et les étudiants ont 30 ans en moyenne et sept ans d’expérience professionnelle, alors cela fait tout un bagage en classe. Ces personnes ont aussi des ambitions et des intérêts différents. C’est un défi aussi pour le personnel enseignant, qui doit toujours s’adapter. »

Virage coaching

Jordan Lebel, professeur de marketing au MBA de l’Université Concordia, remarque également qu’il faut s’adapter à la curiosité et au niveau d’information de ces étudiantes et de ces étudiants.

« Récemment, après le premier cours de la session, l’un d’eux est venu me parler d’une vidéo d’un prof de Harvard qu’il avait vue sur YouTube, raconte-t-il. Je connaissais cette sommité, alors j’ai pu avoir une discussion avec l’étudiant, mais la semaine suivante, il est venu me parler d’une autre vidéo. Je me suis demandé s’il allait faire ça chaque semaine ! C’est certain que dans des moments comme ça, on se demande quel est notre rôle de professeur. »

C’était justement l’une des questions au cœur de la récente refonte du programme de MBA de Concordia. « Nous avons adopté le rôle de coach, précise Jordan Lebel. Au-delà de faire partager nos connaissances, nous cherchons plus à voir comment nous pouvons coacher les étudiantes et les étudiants pour qu’ils naviguent dans cet univers et puissent arriver à leurs fins. »

Ainsi, il n’y a pas un modèle de leader, mais plusieurs.

J’invite les étudiants à définir le succès par eux-mêmes, puis à se faire un plan pour y arriver et à y rester fidèles.

Jordan Lebel, professeur de marketing dans le MBA de l’Université Concordia

« Ils doivent éviter de se laisser séduire en cours de route par d’autres modèles, poursuit-il. Parce que ce qui est bon pour d’autres ne l’est pas nécessairement pour eux. Ce genre de discours résonne particulièrement chez les milléniaux. » 

Des valeurs fortes

Pour développer son propre modèle de leadership, il faut bien se connaître. S’avouant très curieux, Benjamin Prince a participé à une foule d’initiatives proposées dans le MBA ou en marge, comme les compétitions universitaires, le Creative Destruction Lab-Montréal, où il a accompagné une jeune pousse dans son développement, en plus d’être le président de l’Association des étudiants du MBA de HEC Montréal.

« L’exploration et la découverte étaient des valeurs présentes chez moi, mais le MBA les a renforcées », indique celui qui aspire à diriger une entreprise. « Je souhaite arriver à créer un environnement de travail sain, qui encourage la curiosité, la prise d’initiatives, et où ce n’est pas grave de faire des erreurs, tant qu’on apprend à travers elles et qu’on corrige le tir par la suite. »

Kevin Johnson remarque d’ailleurs que les étudiants du MBA ont soif d’aller chercher des compétences très étendues.

« Ils ne semblent pas se contraindre à ce qui doit être fait, mais s’intéressent à ce qui peut être fait, indique-t-il. Par exemple, une base en finance est essentielle pour qu’une entreprise fonctionne, mais on peut aller beaucoup plus loin notamment en intégrant les principes de la finance durable. »

D’ailleurs, les questions ESG (environnementales, sociales et de gouvernance) intéressent beaucoup cette génération. Les personnes inscrites à l’EMBA McGill-HEC Montréal, dont les milléniaux représentent 45 % de la cohorte cette année, participent à un sondage avant leur entrée dans le programme. Face à une préoccupation accrue concernant les questions ESG, le programme, qui a déjà un module qui y est consacré, intègre maintenant une réflexion sur ces enjeux dans tous ses modules.

« La nouvelle génération a l’espoir, l’ambition et aussi la capacité d’avoir de l’impact sur les entreprises dans lesquelles elle évolue, mais aussi sur le monde qui l’entoure, remarque Kevin Johnson. Le MBA la guide dans ces aspirations. »