On ne mesure pas encore à quel point la gestion de patrimoine va être bouleversée par l’utilisation de l’intelligence artificielle. De l’optimisation des rendements au changement de rôle des conseillers, c’est tout ce secteur d’activité qui est aux portes d’une transformation sans précédent.

« L’industrie sera davantage bousculée par l’intelligence artificielle qu’elle ne l’a été au cours des 60 dernières années », prévient Carl Thibeault, vice-président principal pour le Québec et les provinces de l’Atlantique chez IG Gestion de patrimoine.

L’intelligence artificielle (IA) est déjà utilisée chez IG Gestion de patrimoine. « Nous utilisons des éléments de l’intelligence artificielle pour améliorer la réalisation des plans, et s’assurer que les projections soient au plus près possible de la réalité, explique Carl Thibeault. Cela se traduit surtout par un temps de rédaction plus court que dans le passé. »

Ce n’est que le début

Mais il ne s’agit que du début d’une immense transformation, car les applications vont s’élargir sans cesse. « L’intelligence artificielle [IA] deviendra un outil majeur de la gestion de patrimoine », assure celui qui est aussi membre du comité directeur de la Chaire IG Gestion de patrimoine en planification financière de l’Université Laval. « On pourra apporter davantage de précision et de rapidité, et on sera capable d’aller encore plus loin dans la complexité. »

Par exemple, la sélection des supports d’investissement prend beaucoup de temps. En confiant cette tâche à l’IA, « du temps sera libéré pour la planification fiscale et successorale, qui est un enjeu très complexe en gestion de patrimoine », illustre Carl Thibeault.

Tous les professionnels utiliseront l’intelligence artificielle dans un horizon relativement court.

Carl Thibeault, vice-président principal pour le Québec et les provinces de l’Atlantique chez IG Gestion de patrimoine

L’IA ne permet pas encore à des robots financiers de couvrir tous les aspects de la gestion de patrimoine. « Aujourd’hui, on en est aux balbutiements », observe Michel Mailloux, président du Collège des professions financières et auteur de l’ouvrage Robots financiers et IA.

Ces robots financiers, ou dialogueurs financiers, comme les nomme Michel Mailloux, seront capables d’établir tous les liens nécessaires pour couvrir tous les aspects de la gestion de patrimoine. Ils considéreront l’ensemble des enjeux financiers et d’assurance des clients. « Tous les planificateurs financiers rêvent d’offrir ça, mais il est impossible de tout connaître dans tous les domaines », résume Michel Mailloux.

On sait qu’un conseiller apporte en moyenne un rendement annuel supérieur de 1,8 % à celui qu’obtiendrait un investisseur autonome, indique M. Mailloux, mais « les dialogueurs financiers vont améliorer ce rendement de 25 à 40 points de base », estime-t-il.

L’IA pourrait aussi donner accès à la gestion de patrimoine à une plus grande partie de la population. Les outils technologiques pourront être mis à la disposition de clients moins fortunés, alors qu’il serait trop coûteux aujourd’hui de consacrer une équipe d’experts à des besoins de base.

Et la transparence, dans tout ça ?

Comment le client pourra-t-il connaître les calculs réalisés par l’IA ? C’est bien simple... il sera impossible d’être transparent, affirme Michel Mailloux. « Les algorithmes peuvent eux-mêmes aller vers d’autres algorithmes en fonction de ce qu’ils trouvent, ce qui fait qu’il est inconcevable de suivre leur raisonnement. »

Le rôle du conseiller sera donc de faire preuve de jugement, en interprétant les recommandations formulées par l’IA. « Plutôt que la transparence des calculs, l’utilisation massive de l’intelligence artificielle nécessite l’explication de la solution, affirme Michel Mailloux. Cela change fondamentalement la nature du conseil en gestion de patrimoine. »