Y a-t-il des caméras cachées dans votre chambre d’hôtel, votre appartement trouvé sur Airbnb ou votre chalet loué ? Pas besoin d’être paranoïaque en 2023 pour se poser la question. Ces caméras sont plus discrètes que jamais et que ces mésaventures sont régulièrement rapportées. Sans être à toute épreuve, voici tout de même quelques conseils pour dormir sur ses deux oreilles.
En mai 2022, un ex-avocat et entraîneur de hockey montréalais a plaidé coupable d’avoir filmé dans la salle de bains trois adolescents qu’il avait invités dans un chalet. En mai dernier, a rapporté Global News, un groupe de femmes a trouvé une caméra cachée dans la douche d’un Airbnb près de Vancouver, en Colombie-Britannique.
Ce ne sont que quelques exemples des nombreux cas retracés ces dernières années. En 2019, un sondage effectué auprès de 2000 Américains commandé par la firme immobilière IPX1031 avait révélé que 11 % d’entre eux avaient trouvé une caméra cachée dans leur Airbnb.
« Ces caméras sont parfois difficiles à trouver, explique Leonid Grustniy sur le blogue de la firme de cybersécurité Kaspersky. L’objectif peut être vraiment petit, 2 millimètres de diamètre, et le boîtier est généralement caché ou camouflé. »
Surveillance et contre-espionnage
Alexandre Santos, propriétaire de la boutique Spytronic à Montréal, en connaît un rayon dans ce domaine, dans lequel il travaille depuis 2004. Le client est accueilli dès les premiers pas par une exposition d’objets anodins : vases, télécommandes, réveils-matin, horloges, détecteurs de fumée et gicleurs. Tous ont une petite caméra intégrée qui permet d’enregistrer, sur une carte ou sur un dispositif externe, des heures de vidéo.
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PHOTO PATRICK SANFAÇON, LA PRESSE
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PHOTO PATRICK SANFAÇON, LA PRESSE
Fait moins connu et qui peut sembler paradoxal, M. Santos est également un expert de la « contre-surveillance » pour détecter ces caméras. C’est en fait cette motivation qui l’a poussé à ouvrir Spytronic, affirme-t-il. « J’ai été victime d’un acte criminel, dit-il sans en dire davantage. Mon idée première était de protéger les victimes, d’aider les familles et les victimes à avoir des outils pour se protéger des vilains. »
Il donne en exemple les cas de maltraitance dans les CHSLD, les nombreuses enquêtes journalistiques ou policières qui ont utilisé ses équipements pour la bonne cause. « On se voit comme des chevaliers blancs utilisant la technologie pour le bien. »
Deux amis abordables
Quelles sont les solutions qu’il propose pour détecter les caméras cachées ? Derrière un présentoir vitré, on retrouve d’abord dans de grandes valises des systèmes complexes, réservés aux professionnels et dont le coût peut s’élever à plusieurs milliers de dollars.
Ce ne sont évidemment pas des solutions réalistes pour le commun des mortels qui veut inspecter une pièce ou deux par année, au maximum.
Le détecteur de lentilles le plus abordable coûte 150 $ : il s’agit du modèle SPT-CSS-003 simplement nommé « Camera Detector ». Un modèle plus sophistiqué, le WEGA-i, se vend quant à lui 550 $. Les deux sont offerts à la location pendant une semaine au quart de leur prix.
PHOTO PATRICK SANFAÇON, LA PRESSE
Alexandre Santos, propriétaire de Spytronic
Ces deux appareils fonctionnent essentiellement sur le même principe : ils émettent de la lumière infrarouge reflétée par les lentilles des caméras cachées, qu’on peut alors voir illuminées de points rouges à travers un filtre.
La Presse a fait l’expérience du WEGA-i – les caméras cachées ne manquent évidemment pas dans la boutique Spytronic – et a pu détecter assez facilement ces minuscules caméras encastrées dans des objets banals et trahies par un petit point rouge.
Chat et souris
On peut par ailleurs repérer ces caméras par leurs émissions avec un détecteur de radiofréquences ou un traqueur GPS, des appareils généralement plus coûteux.
Pour une inspection futée, il faut d’abord sélectionner les endroits privilégiés pour l’installation de caméras cachées, précise M. Santos. « Ce sont des voyeurs. On s’entend qu’ils ne pointeront pas la caméra sur une porte, mais sur le lit ou dans une salle de bains. » Il faut donc se placer à l’endroit qui semble plus à risque d’être filmé et pointer son détecteur tout autour, lentement.
Comme tout ce qui concerne la sécurité, il n’existe pas de méthode infaillible, précise le propriétaire de Spytronic. « C’est le jeu du chat et de la souris, c’est complexe. On trouve des solutions pour détecter les caméras, il en sort qui ne sont pas détectables. »
Deux méthodes maison
Téléphone
On trouve sur de nombreux sites web une méthode gratuite pour débusquer les caméras, utilisant la capacité de certains téléphones intelligents. Essentiellement, en tamisant ou en éteignant complètement la lumière dans une pièce, on force la caméra cachée à passer en vision nocturne – si elle a cette capacité, évidemment. Elle émet alors une lumière infrarouge invisible à l’œil nu, mais que certains téléphones peuvent détecter quand ils sont en mode photographie.
Nous avons fait le test avec un iPhone 14 Pro Max, un Pixel 7a et un OnePlus 7T : les trois ont affiché le faisceau infrarouge d’une télécommande, même s’il est invisible à l’œil nu.
« Ça fonctionne surtout pour les plus vieilles caméras, indique M. Santos. Maintenant, elles vont parfois utiliser autre chose que les infrarouges, par exemple un lidar. Et il faut vous assurer que votre téléphone détecte vraiment les infrarouges. »
Routeur
L’autre solution souvent proposée, mais très imparfaite, consiste à scanner le réseau WiFi qu’offre votre hébergeur. Fing, par exemple, est une application gratuite qui fait ce travail. On voit alors l’ensemble des appareils connectés, ce qui pourrait permettre de détecter un appareil suspect, voire une caméra dont le nom sur le réseau serait révélateur. Il faut évidemment que la caméra utilise ce réseau WiFi et que ce dernier ne soit pas utilisé par des dizaines d’appareils impossibles à identifier.
La version payante de Fing peut théoriquement détecter les caméras. Nous l’avons testée et elle n’a pas pu repérer nos deux caméras Nest à la maison.