Le 28 juillet prochain, Zaia deviendra le premier spectacle permanent du Cirque du Soleil en Asie. La troupe québécoise compte mettre la Chine sens dessus dessous avec cette superproduction, dont les 75 artistes se produiront à Macao, le Las Vegas chinois. Cette étape importante pour l'avenir de la troupe québécoise résulte de liens de confiance tissés patiemment depuis 20 ans avec les Chinois. L'aventure se poursuivra en 2010 à l'exposition universelle de Shanghai, où le Cirque concevra le pavillon du Canada. La même année, le Cirque souhaite présenter un spectacle permanent à Pékin ou à Shanghai. En Chine, la troupe québécoise a su donner du temps au temps. Son président et chef de la direction, Daniel Lamarre, a rencontré La Presse cette semaine pour raconter le long chemin parcouru.

Le 28 juillet prochain, Zaia deviendra le premier spectacle permanent du Cirque du Soleil en Asie. La troupe québécoise compte mettre la Chine sens dessus dessous avec cette superproduction, dont les 75 artistes se produiront à Macao, le Las Vegas chinois. Cette étape importante pour l'avenir de la troupe québécoise résulte de liens de confiance tissés patiemment depuis 20 ans avec les Chinois. L'aventure se poursuivra en 2010 à l'exposition universelle de Shanghai, où le Cirque concevra le pavillon du Canada. La même année, le Cirque souhaite présenter un spectacle permanent à Pékin ou à Shanghai. En Chine, la troupe québécoise a su donner du temps au temps. Son président et chef de la direction, Daniel Lamarre, a rencontré La Presse cette semaine pour raconter le long chemin parcouru.

Q Les réussites du Cirque en Chine ne sont pas le fruit du hasard.

R Dans les années 80, Guy Laliberté et Gilles Sainte-Croix sont pratiquement allés en Chine avec leur sac à dos pour rencontrer les petites troupes loin des grandes villes. C'était une aventure. Ils ont vraiment tissé des liens à la base, dans un pays où il y a de multiples troupes de cirque.

Q À l'époque, l'idée était déjà de travailler avec des artistes chinois?

R Ils avaient créé des liens en Europe, notamment en Russie. Il y avait des Européens dans les premiers spectacles. Ils ont littéralement vécu avec les Chinois, dans les troupes. Et ils ont fini par les convaincre de libérer des artistes qui ont fait des numéros dans des spectacles.

Q Vous devez avoir beaucoup appris sur le pays et ses habitants?

R Tout le monde veut aller faire des affaires en Chine, mais la première chose à apprendre, c'est que les Chinois prennent leur temps. Si tu leur poses des questions pratiques comme «à quelle date ce sera prêt?» ou «quand aura lieu la prochaine réunion?», c'est quasiment une insulte. Tant et aussi longtemps qu'un lien de confiance n'est pas créé, rien n'est réglé.

Q Comment les choses ont-elles fini par débloquer?

R Cela a commencé de façon un peu artisanale. Ensuite, il y a eu une entente avec la CPAA (Chinese Performing Arts Agency), qui est liée à l'armée chinoise. C'est une agence culturelle de casting avec laquelle il faut faire affaire. Au fil des ans, après Guy, d'autres ont pris la relève, comme Murielle Cantin. Elle va en Chine depuis de nombreuses années et elle a aussi tissé un lien de confiance personnel avec eux. Depuis cinq ans, nous avons aussi François Macerola.

Q Le spectacle Dralion, en 1999, représente aussi une étape importante dans vos échanges avec la Chine.

R On a convaincu la CPAA et les troupes chinoises de nous fournir un certain nombre de numéros, qui sont en permanence dans le spectacle. C'est un hommage au cirque acrobatique chinois. Depuis, nos relations se sont encore resserrées. Ensuite, nous sommes allés pour la première fois en tournée en Chine avec Quidam, il y a un an et demi. Nous ne nous rendions pas compte de notre popularité en Chine. Beaucoup de spectacles avaient été présentés à la télévision et plusieurs se vendaient sur DVD. Ils nous attendaient. Quidam a été un immense succès.

Q Et Macao?

R C'est un grand coup. On espère que Zaia va créer en Chine ce que Mystère et O ont créé en Amérique du Nord. Ces deux spectacles à Las Vegas ont donné le ton en éblouissant les spectateurs. Beaucoup de gens à Hong Kong et à Shanghai, notamment, ont vu nos spectacles de tournée, mais jamais rien de permanent comme celui qui sera présenté à Macao. Cette ville est une copie de Las Vegas, en plus grand. Près de 50% du territoire est maintenant construit. En un an, ils vont passer de 5000 à 30 000 chambres d'hôtel.

Q Quelle est la croissance anticipée en Asie pour le Cirque du Soleil?

R Nous planifions monter quatre ou cinq spectacles permanents dans les 10 prochaines années. Pour les spectacles de tournée, nous visitons actuellement trois marchés ; nous anticipons passer à au moins 10 ou 15. L'apport de l'Asie aux revenus du Cirque pourrait se chiffrer à 15% d'ici cinq ans, Japon inclus.

Q L'exposition de Shanghai en 2010 représente quelque chose de différent au Cirque du Soleil.

R Notre participation au projet du pavillon canadien est un témoignage de notre engagement envers la Chine. En démontrant un autre aspect de notre créativité avec le design de ce superbe pavillon et en étant les maîtres d'oeuvre de la programmation artistique, nous souhaitons présenter un échantillonnage différent de notre vitrine créative.

Superstitions

Q Il doit tout de même survenir beaucoup d'obstacles vers l'établissement de bonnes relations en Chine ?

R Si on se comporte là-bas en Nord-Américains, sans porter attention à la culture locale, le lien de confiance ne se créera pas. Ça se voit dans les détails, de la nourriture aux superstitions les plus diverses. Le choix de la date d'ouverture à Macao était très important. On a choisi le 28 du huitième mois 2008 parce que le chiffre huit est très important à leurs yeux. Si on avait choisi une autre date, cela aurait pu signifier une catastrophe. Il s'agit de croyances profondes. Il faut le comprendre.

Q Est-ce qu'on peut percevoir les relents d'un régime plutôt fermé au reste du monde?

R Dans une réunion avec un ministre, je me rappelle avoir mis des gants blancs jusqu'aux coudes pour oser une question. Je me suis excusé 10 fois avant de lui demander s'il ne croyait pas que la démocratie serait un meilleur choix pour la Chine. Il m'a expliqué que, en Chine, les meilleurs à l'école passent au degré suivant. Les meilleurs, disait-il, dirigent notre pays. Il m'a demandé si, dans notre démocratie, ce sont les meilleures personnes qui dirigent le pays. J'avoue que ça porte à réflexion.

Q On ne peut pas passer sous silence la situation au Tibet.

R Notre philosophie est simple. Nous avons des valeurs, au Cirque. Ce qu'on essaie de faire, avec nos moyens, c'est d'amener des changements avec nos actions sociales en Chine. On va s'engager à Macao comme ailleurs. Plutôt que de dire aux Chinois qu'ils ne font pas les choses correctement, on les invite à réaliser un projet pour les gens dans un quartier particulier.