Le Plateau-Mont-Royal reste le quartier le plus prisé par les artistes au Canada, mais les créateurs migrent de plus en plus vers les quartiers périphériques de Montréal tels que Rosemont, Villeray et le Centre-Sud, révèle une étude rendue publique par la Ville hier. Pour certains, la flambée des prix immobiliers est à l'origine du phénomène.

La responsable de la culture au comité exécutif, Helen Fotopulos, a dévoilé hier les résultats d'une étude de Hill Strategies, qui a compilé les données du recensement de 2006 pour produire une cartographie des artistes dans les grandes villes du Canada.

Résultat: la métropole compte 13 400 artistes, soit 1,5  % de la population active. Au Canada, seule Toronto compte plus de créateurs (voir autre texte).

C'est dans le Plateau qu'ils sont plus nombreux. Leur concentration a bondi de 2,1% dans le secteur du Mile End, où ils forment 7,8 % de la population active. C'est le taux le plus important au pays.

D'autres secteurs du Plateau-Mont-Royal, du Vieux-Montréal et d'Outremont figurent parmi les 10 quartiers les plus habités par les artistes au pays.

Mais l'étude révèle que d'autres secteurs du Plateau sont moins attrayants qu'auparavant, notamment la portion située entre les rues Saint-Denis et Papineau. «Deux des quatre quartiers les plus artistiques du Plateau en 2001 ont connu une diminution de leur concentration d'artistes en 2006», peut-on lire dans le rapport.

Des parties du centre-ville et du Vieux-Montréal ont aussi vu leur concentration d'artistes baisser.

Mme Fotopulos, ancienne mairesse du Plateau-Mont-Royal, ne s'en inquiète pas. Elle souligne que le nombre d'artistes reste le même, mais que la croissance de la population fait diminuer leur poids relatif.

«Je ne sais pas si c'est uniquement le Plateau, mais le centre-sud du Plateau et une partie du Village qui ont connu une certaine baisse, a-t-elle indiqué. Mais il y a une progression au nord.»

Les quartiers voisins voient en effet leur population d'artistes grimper. Outre le Mile End, des secteurs de RosemontLa Petite-Patrie et de Villeray ont connu les plus fortes augmentations de leur concentration d'artistes. Verdun et le Centre-Sud ont aussi profité de la migration.

Le phénomène n'étonne guère le directeur du développement culturel à la Ville, Jean-Robert Choquet. Car, comme plusieurs locataires et propriétaires, les artistes doivent se plier aux aléas du marché immobilier.

«Ce que ça nous dit, c'est qu'il y a des déplacements, en particulier de jeunes artistes, explique-t-il. Ils doivent trouver un loyer, ou encore acheter une maison, et c'est difficile sur le Plateau et dans le centre-ville.»

Il ne serait d'ailleurs pas étonné que Verdun et Hochelaga-Maisonneuve deviennent à leur tour des destinations de choix pour les artistes dans les prochaines années.

L'écart grandissant du revenu des artistes par rapport au reste de la population n'est peut-être pas étranger à la migration vers les quartiers périphériques. Le revenu médian des artistes est de 15 000$, selon l'étude de Hill Strategies, c'est-à-dire que la moitié d'entre eux gagnent moins que cette somme, et la moitié gagnent plus. C'est de 37 % inférieur à l'ensemble des travailleurs montréalais.

«Pour avoir un atelier d'artiste, le premier critère est le prix, affirme Marie-Anne Marchand, responsable du secteur culturel à la Corporation de développement économique communautaire Centre-Sud/Plateau-Mont-Royal. On va un peu à l'extérieur du centre-ville, et c'est souvent dans des zones industrielles que les artistes vont trouver leur bonheur.»