Avoir son propre univers et se construire un personnage particulier est un atout précieux en humour, pourvu qu'on en saisisse au minimum le langage. L'Absurdistan qui habite Jean-Thomas Jobin, avec son spectacle Soulever des Corneliu, présenté en première montréalaise hier soir au Monument-National, s'est révélé un absurde justement trop distant et beaucoup trop borderline pour rassembler tous les publics.

L'humoriste considère son humour comme expérimental, mais il faut croire que cette expérience a ses adeptes (quand même nombreux hier soir) et ses non-croyants: plusieurs spectateurs insensibles à la planète Jobin sont partis à l'entracte.

On ne peut reprocher à Jean-Thomas Jobin de ne pas travailler ses textes. Il a de l'imagination, le sens du jeu de mots et du quiproquo, mais son deuxième one man show n'a pas la fraîcheur de son premier, même si le spectacle a été plus coaché que mis en scène par le comédien Christian Bégin.

Le public l'a pourtant appuyé autant qu'il a pu, hier. Plusieurs «jobinistes» invétérés sont venus le soutenir. Mais les blagues sont très souvent tombées à plat. La plus drôle du début du spectacle faisait d'ailleurs référence à l'opacité de son style d'humour:

«Huguette, âgée de 84 ans, quand elle entend mes monologues, a envie que le Bon Dieu vienne la chercher!»

Autocritique lucide. Jean-Thomas ajoute peu après: «Ça m'arrive de relire ce que j'écris sur l'ordinateur et que j'en sois traumatisé!»

Le début du show était sans saveur et les applaudissements diffus. C'en était gênant. Le spectacle a pris un peu d'envergure quand est arrivée sur scène la marionnette Jack Bauer, manipulée par le comédien Jean-Sébastien Lavoie. La menace terroriste de la Fédération des Gisèle sans scrupules de Thetford Mines a aussi mis un peu de sel dans cette cuisine loufoque.

La deuxième partie du spectacle était plus drôle et plus salace. «»Prends-moi mon cochon», qu'elle m'a dit. Je lui ai répondu: «Dis-moi où il est, ton cochon, je vais le prendre et je vais te le donner!»» Gentillet.

Moment intéressant aussi quand il se fait passer pour Bono imitant Paul McCartney. Un absurde donc plus familier en deuxième partie et donc plus applaudi. Les amateurs atteints de jobinite aiguë ont en tout cas bien apprécié et chaleureusement ovationné Jean-Thomas Jobin à l'issue de sa performance. Ceux qui sont terre à terre respectent, mais ont des doutes...

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Soulever des Corneliu, au Monument-National, les 10, 12, 13 novembre et les 15 et 16 avril 2011, 20 h.