Maurice Perron et les Éditions Mithra-Mythe

La maison d’édition Mithra-Mythe a été fondée par le photographe Maurice Perron (1924-1999) expressément pour diffuser Refus global. « Mon père avait fait une souscription pour [payer] les frais d’imprimerie, de papier, etc. », nous écrit sa fille Line-Sylvie Perron. Dans un texte qu’il avait écrit en 1994 pour le magazine Parcours et que Mme Perron nous a transmis, Maurice Perron précise que chaque tranche de cinq dollars versée en souscription donnait droit à un exemplaire du manifeste. Pierre Gauvreau avait commencé à dactylographier les textes du recueil à l’été 1948. « Une fois les textes dactylographiés sur des stencils, Pierre Gauvreau les avait patiemment imprimés sur la Gestetner de sa mère », poursuit Maurice Perron dans Parcours. Tous les exemplaires étaient numérotés. Les exemplaires 1 à 50 étaient dits hors commerce et furent remis aux souscripteurs et aux médias. Deux autres ouvrages sont parus chez Mithra-Mythe : le recueil de poésie Le Vierge incendié de Paul-Marie Lapointe (1948) et Projections libérantes, texte de Paul-Émile Borduas (1949). Après quoi la maison d’édition a cessé ses activités.

Quand les signataires reparlent de Refus global

Après la parution de l’œuvre, les signataires ont continué de parler de Refus global. Dans les médias, bien entendu, mais aussi en privé, comme a pu le constater l’archiviste Marthe Léger, de Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ), en retournant dans différents fonds.

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

Marthe Léger, archiviste aux Archives nationales à Montréal

« Par exemple, un texte écrit et dactylographié de Claude Gauvreau en 1958 pour la revue Situations montre qu’il persiste et signe, dit Mme Léger. Il écrit : « En relisant Refus global, je suis frappé par la précise conscience et l’actualité de ce qu’il renferme. » » Dans un autre texte, signé par Marcel Barbeau, celui-ci affirme : « Je signerais aujourd’hui Refus global avec une conviction inébranlable. Refus global est un refus de s’en tenir à la bourgade plastique. C’est une prise de position avec un message d’une haute valeur humaine. »

Avant Refus global, Prisme d’yeux

Avant Refus global, un autre manifeste, Prisme d’yeux, est lancé le 4 février 1948 à l’Art Center (3430, avenue du Musée), une aile de l’Art Association of Montréal, ancêtre du Musée des beaux-arts de Montréal. Jacques de Tonnancour rédige le texte de ce manifeste que signent 15 peintres et sculpteurs avec Alfred Pellan à leur tête. Lors de l’ouverture de la Librairie Tranquille le 8 mai 1948 au 67, rue Sainte-Catherine Ouest, les membres du groupe Prisme d’yeux y tiennent une exposition de leurs toiles. Trois mois plus tard, Refus global y est lancé. Durant plusieurs années, Henri Tranquille a fait beaucoup de place aux artistes contemporains dans son commerce.

En attente de classement

Selon le Répertoire du patrimoine culturel du Québec, une proposition de donner à Refus global un statut national a été formulée auprès du ministère de la Culture et des Communications le 26 septembre 2013. Dix ans plus tard, cette proposition est toujours « à l’étude », indique l’équipe médias du Ministère. Si le statut est adopté, Refus global deviendrait un « évènement historique » au Répertoire du patrimoine culturel, comme cela a récemment été le cas pour la création du Conseil du statut de la femme. Dans un autre courriel reçu en juin, le Ministère nous a dit être « conscient de l’imminence du 75anniversaire de la parution du manifeste du Refus global et évalue[r] actuellement la meilleure façon de mettre en valeur cet évènement ».

Prix de vente original : 1 $

Un dollar. C’était le prix de vente de Refus global au moment de sa sortie en août 1948. « C’est 13,50 $ en dollars de 2023 », indique Daniel Chouinard, bibliothécaire à BAnQ. Le prix d’un livre de poche. Dans sa biographie d’Henri Tranquille, Monsieur Livre, l’auteur Yves Gauthier estimait de son côté que le prix original était de 1,50 $.

Au Musée des beaux-arts de Mont-Saint-Hilaire

PHOTO FOURNIE PAR LE MUSÉE DES BEAUX-ARTS DE MONT-SAINT-HILAIRE

Une vue de l’exposition consacrée actuellement à Marcel Barbeau

Plusieurs expositions marquent cette année le travail des Automatistes. Jusqu’au 8 octobre, le Musée des beaux-arts de Mont-Saint-Hilaire présente l’exposition Marcel Barbeau – Global mixte, avec des œuvres du peintre et aussi un exemplaire (numéro 130) du manifeste. Le même musée et la Maison autochtone présentent aussi des œuvres de Jean Paul Riopelle. Toujours à Mont-Saint-Hilaire, on peut aussi visiter la Maison Paul-Émile-Borduas, que ce dernier a dessinée et construite. À Ottawa, le Musée des beaux-arts du Canada présentera une exposition rétrospective, Riopelle – À la croisée des temps, du 27 octobre au 7 avril prochains, dans le cadre du centenaire de la naissance du peintre (il est mort en 2002). Du 31 octobre au 18 février prochains, le Musée des beaux-arts de Montréal tiendra par ailleurs une exposition des œuvres récentes de Françoise Sullivan, Je laissais les rythmes affluer. Centenaire, Mme Sullivan continue toujours à travailler en studio.