Le prolongement du métro jusqu'à Laval permet aux Montréalais de se rendre facilement à la salle Alfred-Pellan de la Maison des arts de Laval, un bienfait quand elle expose Du haut de mon sous-sol, une installation d'Éric Lamontagne sur l'enfance et la banlieue. Une belle occasion où l'art contemporain rencontre les familles. Et vice-versa.

L'artiste visuel Éric Lamontagne crée des expositions ancrées dans le réel et des éléments de sa vie. «Ça me permet de transposer quelque chose que j'ai ressenti et que les visiteurs peuvent ressentir eux-mêmes, notamment les enfants pour lesquels j'ai toujours une petite pensée», dit-il à La Presse, tout en présentant sa dernière installation, Du haut de mon sous-sol.

Quand La Presse l'a visitée, un petit groupe scolaire venait de la parcourir. Un jeune du primaire est revenu sur ses pas pour dire de sa petite voix un «merci» bien senti à l'artiste qui en était tout ému.

Occupant la grande salle Alfred-Pellan, l'exposition d'objets peints et sculptés s'adresse en effet aux amateurs d'art de tous âges, notamment les ados et les plus jeunes qui peuvent la visiter avec un masque.

«Pour chaque exposition, on s'assoit avec l'artiste, nos techniciens en muséologie et les commissaires pour trouver le meilleur outil pour transmettre le contenu de l'expo, dit Jasmine Colizza, muséologue de la salle Alfred-Pellan. Ça peut être un audioguide. Là, c'est un masque.»

Ce masque, qui peut rendre la visite de l'expo plus ludique, est composé d'une image de la mère d'Éric Lamontagne. «C'est comme si c'est elle qui raconte l'époque où ses enfants étaient encore à la maison, dit-il. Mes oeuvres racontent une histoire. Le visiteur fait le lien entre les objets.»

À l'intérieur du masque, la mère de l'artiste parle d'elle-même, de sa solitude depuis que ses enfants ont quitté la maison, avec des mots qui permettent de mieux comprendre l'installation où l'artiste évoque ses souvenirs d'enfance dans le sous-sol de sa maison.

Le visiteur est accueilli par un pissenlit en contreplaqué de grande taille. Tout est immense quand on est petit. L'ombre de la dent-de-lion n'est ni végétale ni florale, mais celle d'une famille, collée serré. Éric Lamontagne a recréé la maison. Sur un côté, la silhouette de sa mère est découpée dans un mur. Son ombre projetée sur le sol impose sa présence rassurante et inquiétante. La mère. Un des murs de la maison. Une falaise de la raison.

L'exposition présente les objets du sous-sol de l'artiste. Le sofa s'enfonce dans le sol, disparaissant de la réalité. Le poêle à bois avale un tronc et se transforme en écran de télé dans lequel une cité de banlieue se consume dans les flammes.

Un tapis aux allures de gazon accueille nos fesses pour regarder une télé où la neige remplit l'écran. Comme dans le temps, quand papa s'endormait devant. Dans un trou de souris, Éric Lamontagne a recréé un monde miniature que l'on découvre en se couchant par terre.

Une machine à écrire et un radiocassette aux oreilles qui s'écartent à cause du bruit suggèrent une époque qui disparaît sauf de notre mémoire, espace grandiose et si fragile.

Chaque objet côtoie un morceau de miroir marquant le reflet des choses, l'eau et la glace des deux grandes saisons. Le visiteur se mire dans cet environnement familier. «Je travaille beaucoup avec l'illusion et la tradition du trompe-l'oeil», dit Éric Lamontagne, qui a aussi peint une voie de chemin de fer. Les rails quittent le tableau pour le sol. Une invitation au voyage qui taraudait l'artiste dans son sous-sol.

À côté, une valise prend racine. «La sédentarité a pris le dessus», dit Éric Lamontagne, qui réussit à nous transporter dans nos propres souvenirs.

D'ailleurs, jeudi, à 19h, au même endroit, huit poètes (Mathieu Arsenault, Catherine Cormier, Claude Drouin, Nancy R. Lange, Frédérique Marleau, Marc-Antoine K. Phaneuf, Leslie Piché et Mayra Bruneau Da Costa) rendront hommage à ce repaire de l'adolescence avec des poèmes qu'ils ont écrits à l'âge où l'on se terre à l'intérieur de soi.

Du haut de mon sous-sol, par Éric Lamontagne, jusqu'au 3 juillet, Maison des arts de Laval (1395, boulevard de la Concorde Ouest).