Montréal est la capitale des arts numériques en Amérique. Cela prenait un événement régulier pour le célébrer. Les organisateurs du festival Elektra ont donc créé la Biennale internationale d'art numérique (BIAN) qui prend son envol mercredi. Cinquante artistes, 30 projets, 26 lieux de diffusion. Une occasion de découvrir un univers artistique hybride.

«Issu de l'art électronique, l'art numérique a atteint une telle maturité, avec l'émergence d'artistes importants, qu'il était nécessaire d'organiser une biennale pour montrer que cet art a maintenant toute sa place et que de grandes oeuvres sont créées ainsi, indique Alain Thibault, directeur artistique de la BIAN, qui a fondé Elektra en 1999. L'art numérique est le futur de l'art.»

Comment définir l'art numérique? «C'est un art qui fait appel à toutes les disciplines mais qui a ses propres spécificités, son propre langage, dit Alain Thibault. Comme l'expanded cinema, par exemple, qui est plus que du cinéma expérimental, car c'est non narratif, souvent présenté en direct et beaucoup plus graphique.»

La BIAN présente donc des installations et de l'art public dans 26 lieux, notamment des musées, des galeries et des centres d'artistes puisque le milieu de l'art contemporain est profondément interpellé par l'art numérique.

Le titre de la première biennale, Phénomènes/Phenomena, renvoie à l'aspect mystique du développement numérique. «La technologie a remplacé la religion, affirme Alain Thibault. C'est un phénomène particulier. On vit une vraie révolution.»

Montréal a une avance certaine en Amérique en ce qui a trait à l'art numérique. La recherche, la création et la diffusion incarnées par la Société des arts technologiques, les modules Hexagram, Mutek, Elektra et Oboro en témoignent.

«Nous sommes très performants, car on a les infrastructures multimédias et on a les artistes, dit Marie-Michèle Cron, du Conseil des arts de Montréal. Nous avons aussi les universités avec de la recherche croisée. Montréal est un terreau propice pour les arts numériques avec de nouvelles manières de travailler et de créer en collaboration avec des chercheurs, des penseurs, des techniciens et des ingénieurs.»

Il existe un axe France-Québec en art numérique. Du coup, la France est à l'honneur pour cette première mouture avec la présentation, du 2 mai au 3 juin, dans l'ancienne École des beaux-arts, de cinq installations de jeunes artistes qui travaillent avec la lumière.

Incontournables

Les autres artistes de la BIAN sont québécois, allemands, turcs, autrichiens et japonais. Parmi les projets, des incontournables: la présentation de Fragmentation, une adaptation de trois scènes extraites du spectacle Lipsynch de Robert Lepage pour le ReACTOR, système de diffusion à six écrans 3D conçu par Sarah Kenderdine et Jeffrey Shaw. L'événement ouvre la BIAN jeudi, et est présenté au Musée des beaux-arts jusqu'au 5 août.

Le Musée d'art contemporain (MAC) présentera, du 5 au 27 mai, unidisplay 2011, nouvelle installation de l'Allemand Carsten Nicolaï qui explore le thème du langage universel. Il fera aussi une performance, univrs (uniscope version), le 4 mai à 19h, au MAC.

Parmi les artistes québécois participants, citons Matthew Biederman, Bill Vorn, Chantal duPont et Jean-Pierre Aubé. Pour Marie-Michèle Cron, il faut oser aller à la rencontre des artistes numériques. Surtout quand on n'est pas né «une souris dans la main»!

«Les projets numériques sont souvent originaux, excitants visuellement, dit-elle. Il y a encore un certain effroi pour les arts numériques, car c'est aussi de la technique et un langage mystérieux. Mais souvent, on oublie la technique et ce sont alors de purs moments de poésie.»

BIAN, du 18 avril au 13 juin. Info: bianmontreal.ca