La Galerie d’Outremont présente Un monde ravivé, l’exposition de photographies d’Agnieszka Traczewska prises au sein de communautés juives hassidiques de par le monde. Des photographies exceptionnelles de vie quotidienne des hassidim réalisées pendant 15 ans par cette artiste polonaise grâce à un accès très privilégié.

Agnieszka Traczewska n’est pas hassidique. Née catholique, elle vit à Cracovie et a passé son enfance dans cette ville polonaise, non loin d’un vieux quartier de juifs hassidiques. « Je ne savais absolument rien sur eux et leurs traditions, dit-elle. Mais je savais qu’avant la Seconde Guerre mondiale, ils étaient 65 000 dans ma ville et qu’après la guerre, les survivants avaient quitté le pays. Quand j’ai grandi, je voyais des traces de leur présence, des cimetières, des synagogues. J’avais l’impression que l’existence de cette partie de l’histoire de Cracovie pourrait être, elle aussi, éradiquée. »

La photographe s’est d’abord intéressée aux hassidim d’origine polonaise qui revenaient en Pologne raviver leurs racines, notamment en visitant les cimetières juifs. Elle a publié un premier ouvrage, Returns, illustrant ces retours de hassidim sur la terre natale de leurs ancêtres. Puis, elle a élargi son intérêt.

PHOTO AGNIESZKA TRACZEWSKA, FOURNIE PAR LA GALERIE

Un juif hassidique avec son enfant, à Jérusalem

Les photos exposées ont ainsi été prises au sein de communautés hassidiques de Brooklyn, d’Israël, de Belgique ou encore de Pologne. Non seulement elles témoignent d’une belle maîtrise technique, mais elles nous plongent aussi dans l’intimité de familles hassidiques comme cela est rarement possible, compte tenu de leur mode de vie très privé et communautaire.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

La photographe Agnieszka Traczewska a pu photographier un père avec son fils dans la salle de bains familiale.

Après avoir tissé des liens très forts avec des hassidim durant des années, l’artiste a pu assister à des mariages et à des cérémonies d’hommage aux ancêtres. Elle a même pu, dans une salle de bains, photographier un père new-yorkais qui raccourcissait les bords des papillotes de son fils avec une bougie.

Les photographies évoquent ainsi des traits marquants de cette communauté juive que sont la vénération de la famille, la transmission des traditions et la dévotion au hassidisme, ce courant mystique du judaïsme fondé au XVIIIsiècle par un rabbin originaire d’une région jadis polonaise et aujourd’hui ukrainienne.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Vue de l’exposition

Ces images montrent des célébrations religieuses, des juifs hassidiques descendant d’un survivant de l’Holocauste qui se recueillent à l’intérieur d’une chambre à gaz, à Auschwitz, en Pologne. Des rituels de shabbat et de Hanouka. Des enfants profitant de Pourim, la fête juive durant laquelle les règles sont assouplies. Et la scène émouvante de deux jeunes hassidim qui se retrouvent seuls dans leur chambre pour la première fois, après leur cérémonie d’union. Une photographie récompensée par un prix du magazine National Geographic.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Photographie d’Agnieszka Traczewska d’une célébration de la fête juive de Pourim en Israël

L’exposition illustre aussi combien ces communautés de familles nombreuses sont en pleine croissance partout dans le monde, d’où le titre de l’exposition, Un monde ravivé. Le travail d’Agnieszka Traczewska se poursuivra d’ailleurs bientôt à Montréal, car elle y a développé des liens avec les hassidim d’Outremont et de Boisbriand.

Cette présentation à la Galerie d’Outremont a été réalisée à l’initiative et grâce à la collaboration du Consulat général de la République de Pologne à Montréal. Le vernissage a eu lieu le 18 avril, journée internationale de commémoration de l’Holocauste perpétré par les nazis durant la Seconde Guerre mondiale. Ce jour-là coïncidait aussi avec le 80anniversaire de l’insurrection des habitants du ghetto juif de Varsovie en 1943.

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Le consul de Pologne à Montréal, Dariusz Wisniewski

L’aide de la Pologne apportée à cette expo s’inscrit dans une volonté du pays de redonner aux juifs leur pleine place dans la société, même s’il ne reste pas beaucoup de juifs en Pologne par rapport aux 3,3 millions qui y vivaient avant 1939, soit 10 % de la population. L’horreur des camps de concentration installés en Pologne, entre 1941 et 1945, a fait qu’il ne restait plus que 380 000 juifs polonais en 1945. « Beaucoup de survivants sont partis après la Seconde Guerre mondiale, car ils ne voulaient pas vivre sur la terre où des membres de leur famille avaient été exterminés », dit le consul de Pologne à Montréal, Dariusz Wisniewski.

  • Écriture des derniers mots d’un rouleau de Torah, synagogue Izaak, Cracovie, Pologne, Agnieszka Traczewska

    PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

    Écriture des derniers mots d’un rouleau de Torah, synagogue Izaak, Cracovie, Pologne, Agnieszka Traczewska

  • Prières du matin de juifs hassidiques au mont Méron, en Israël

    PHOTO AGNIESZKA TRACZEWSKA, FOURNIE PAR LA GALERIE

    Prières du matin de juifs hassidiques au mont Méron, en Israël

  • Accueil du nouveau rouleau de Torah, Cracovie, Pologne

    PHOTO AGNIESZKA TRACZEWSKA, FOURNIE PAR LA GALERIE

    Accueil du nouveau rouleau de Torah, Cracovie, Pologne

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L’exposition d’Agnieszka Traczewska n’évoque pas de questions politiques et sociales. Ce n’est pas son propos, nous a-t-elle expliqué. Sa démarche est documentaire et sociologique. On peut avoir sa propre approche des questions religieuses et apprécier son travail artistique, car il interpelle notre sens civique à accepter la diversité sociale de nos sociétés occidentales, voire à s’en réjouir. Pour que l’harmonie et la paix naissent du respect des différences.

Un monde ravivé, d’Agnieszka Traczewska, à la Galerie Outremont, jusqu’au 28 mai

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