La dernière fois que La Presse a parlé à Enola Bédard, c’était en février 2021. La danseuse venait d’obtenir son visa de travail et elle s’apprêtait à déménager en Californie pour vivre de son art. Trois ans plus tard, nous l’avons jointe pour prendre de ses nouvelles. En résumé, les choses vont bien pour elle. Très bien, même.

Qui est Enola Bédard ? Pour la génération Z, la réponse à cette question est d’une évidence manifeste. Enola est la reine québécoise du réseau social TikTok avec ses quelque 16,5 millions d’abonnés (en comparaison, Céline Dion n’en a « que » 2,6 millions). Son talent et sa vitrine lui ont permis de collaborer sur les réseaux sociaux avec des vedettes de la trempe de Nicki Minaj, Usher, Shania Twain et – tout récemment – Jennifer Lopez.

Les fans de Révolution, à TVA, pourront aussi la replacer en fouillant dans leurs souvenirs : Enola Bédard a concouru aux deux premières saisons de l’émission, en 2018 et en 2019, alors à peine sortie de l’adolescence. En 2019, elle avait subi une élimination crève-cœur au ballottage malgré une performance admirable.

« De 17 à 20 ans, j’ai tellement essayé de percer dans le milieu, se souvient Enola, jointe cette semaine chez elle, à Los Angeles. J’ai même essayé de faire So You Think You Can Dance. Les juges m’ont dit non, parce que je n’avais pas assez de technique.

Pendant des années, je n’étais pas assez techniquement avancée pour faire ces émissions-là.

Enola Bédard

« J’ai vécu beaucoup de refus et de remises en question, dit Enola, maintenant âgée de 23 ans. Est-ce que je suis faite pour ce milieu-là ? Est-ce que je dois changer de carrière ? Mais une petite voix me disait : “Enola, il y a quelque chose de plus gros qui t’attend et il ne faut jamais que tu abandonnes”. »

Cette petite voix avait raison. Ça roule pour Enola. Elle a performé à l’émission World of Dance. Elle a remporté deux années de suite un prix en danse aux Streamy Awards, un gala qui récompense les productions web. Et début janvier, elle a surpris ses abonnés en publiant une vidéo où elle danse en duo avec nulle autre que Jennifer Lopez. C’est l’équipe de la superstar qui a communiqué avec la créatrice de contenu québécoise pour lui proposer cette collaboration. Le but était de promouvoir sur les réseaux sociaux le nouveau single de J. Lo, Can’t Get Enough.

« Son équipe a vu mes vidéos, probablement celles que j’ai faites sur les chansons de Jennifer Lopez », raconte Enola. La célèbre chanteuse a passé environ deux heures avec elle, d’abord pour lui enseigner la chorégraphie choisie par l’équipe de la star, puis pour enregistrer la vidéo d’une minute.

PHOTO MATT PARSON, FOURNIE PAR ENOLA BÉDARD

Enola Bédard

[Jennifer Lopez] est l’une de mes plus grandes inspirations, parce qu’elle sait où elle s’en va. C’est aussi la direction que je veux prendre.

Enola Bédard

Enola l’assume : son objectif, c’est de partir en tournée avec ses propres chansons. Parce qu’en plus de danser, Enola chante. Elle a d’ailleurs sorti deux singles originaux dans les derniers mois, Yes, Please ! et Ça brûle, des chansons pop efficaces qu’elle a elle-même écrites. Elle rêve d’un album complet, cette année ou la suivante. « Je pense que tout est possible si on y met le travail », dit-elle.

Enola ne chôme pas. Elle suit chaque semaine trois cours de danse, trois cours de chant, un à deux cours de jeu d’acteur. Elle écrit des chansons. Et, bien sûr, avec le vidéographe montréalais Justin Corbo, elle crée en moyenne 20 vidéos par semaine pour nourrir ses réseaux sociaux. On la voit danser en public sur le Hollywood Walk of Fame, sur la jetée Santa Monica, dans le Vieux-Québec (lorsqu’elle visite ses parents !), ou encore reprendre les chorégraphies de vedettes comme Lady Gaga et Britney Spears. « Je n’ai pas peur de danser en public, de sortir de ma zone de confort, et c’est ce qui m’a permis de me différencier », dit-elle.

Un travail à temps plein

Enola publie sur TikTok en tout temps, même lorsqu’elle travaille sur des projets d’envergure (l’an dernier, elle a créé la chorégraphie et joué dans le vidéoclip Giddy Up !, de Shania Twain). Cet impératif de produire des vidéos ne crée-t-il pas une pression ?

« Quand j’ai commencé à faire des vidéos, pendant la pandémie, je n’avais pas vraiment réalisé que c’est un travail à temps plein, convient Enola. Même si j’ai une grosse plateforme, il faut que je pense à comment avoir des vues, comment devenir virale, comment aller toujours plus haut, mais sans perdre de vue mon art, la danse. »

« Je dois donc trouver cette balance-là, poursuit-elle. Oui, ça vient avec une petite pression, mais au final, j’aime vraiment ça. »

Ce n’est pas toujours facile, convient Enola, mais elle rappelle que, pour se rendre là, elle a tondu la pelouse 60 heures par semaine avec son père et vendu du chocolat la fin de semaine avec sa mère. « Je ne peux pas me plaindre, parce qu’avant, j’aurais tout donné pour faire ce que je fais en ce moment. Je me dis : “Enola, you got this”. »

Consultez la page TikTok d’Enola Bédard