Plus jeune, Maripier Morin enchaînait les comas éthyliques, « black-out sur black-out sur black-out », jusqu’au jour où elle a reniflé sa première ligne de cocaïne.

« Bingo, tabarnak, je l’ai », s’est-elle dit.

L’animatrice de 36 ans, qui était « un désastre en boisson », selon ses propres mots, pensait avoir réglé ses problèmes en remplaçant l’alcool par de la poudre blanche colombienne. Fini les atroces lendemains de veille et les nuits qui se finissaient, complètement ivre, dans un banc de neige.

Grave erreur.

Maripier Morin a touché le fond des bas-fonds et elle en parle avec une franchise désarmante à France Castel dans un excellent épisode de L’autre midi à la table d’à côté, que Radio-Canada diffuse dimanche à 20 h, dans la case de Tout le monde en parle.

PHOTO KARINE DUFOUR, FOURNIE PAR RADIO-CANADA

Maripier Morin et France Castel

Ça démarre super bien la quatrième saison de cette émission de conversations toute simple, mais diablement efficace quand le courant passe entre les deux invités attablés au restaurant Le Serpent, dans la Cité du multimédia, à Montréal.

Entre France Castel et Maripier Morin, ça clique et ça coule de source. Aucune des deux ne se défile à propos de ses années de consommation de drogue et d’alcool. Elles en parlent comme on entend rarement parler de toxicomanie à la télé. C’est limite confrontant tellement leurs confidences sont honnêtes et crues.

Sous l’influence de la cocaïne, Maripier Morin se sentait invincible, plus intelligente, plus drôle, elle trouvait que sa répartie augmentait et que les gens l’aimaient davantage.

Même constat pour France Castel, 78 ans : la cocaïne lui conférait une assurance peu commune, une forme d’extase. « Je me trouvais belle, brillante et capable de vivre une sexualité à mon goût », révèle France Castel, en précisant qu’à l’époque, elle a souvent été payée en sachets de poudre par ses producteurs.

Évidemment, la chute a été brutale pour les deux femmes, qui ont abouti en cure de désintox. En plus de la dope, Maripier Morin buvait énormément d’alcool. « Je consommais à outrance et là, je devenais comme une guidoune, je frenchais n’importe qui », enchaîne Maripier Morin, dont le surnom, pendant ses années de barmaid, était Marie-French.

Jamais on ne sent que l’une juge l’autre, ou vice-versa. France Castel est particulièrement touchante quand Maripier Morin lui dit qu’elle s’est elle-même donné une « estie de ride ». Comprendre : Maripier, qui a « encore le goût de faire ce métier-là », a tout perdu par sa propre faute, elle l’assume.

« Tu avais toute, toute, toute, constate France Castel. Tu n’as plus à te punir. Tu fais tout ce qu’il faut pour revenir de ça. » La grande dame du showbiz québécois ajoute : « On pardonne moins aux belles filles. »

Dans cet entretien d’une heure, ni France ni Maripier ne prononcent le nom de Safia Nolin, qui a dénoncé, en juillet 2020, des comportements déplacés de l’animatrice et actrice à son endroit.

À propos de l’émergence du mouvement #moiaussi, France Castel, qui a croisé plusieurs mononcles dans sa carrière, ne se considère pas comme une victime, une position ferme qui risque de froisser quelques féministes.

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France Castel

« J’ai toujours refusé de me mettre dans la catégorie des victimes. J’ai vécu ma vie en fonction de refuser ça », martèle France Castel.

Maripier Morin plonge pour une rare fois dans l’aspect sombre de son mariage (très médiatisé) avec le hockeyeur Brandon Prust : « On ne s’est pas fait de bien ni l’un ni l’autre », témoigne Maripier à propos de cette relation qu’elle qualifie de toxique.

Quand elle a croisé Brandon Prust, Maripier n’avait aucune estime d’elle-même et traînait encore l’étiquette de la bitch d’Occupation double, se souvient-elle.

Oui, les deux femmes pleurent durant ce repas, mais leur rencontre contient plusieurs moments légers et rigolos. France Castel raconte notamment son idylle avec Miles Davis ou ses belles années de révolution sexuelle où ses copines et elle se prêtaient leurs chums.

Il n’existe pas de manuel de réintégration destiné aux vedettes annulées du showbiz québécois. Contrairement à un Julien Lacroix, dont le retour sur scène a été cahoteux, Maripier Morin a pris son temps.

Elle a déménagé en Montérégie. Elle a eu une petite fille. Elle n’a pas abusé d’Instagram. Elle participe à la balado Grains d’espoir, qui parle de rétablissement et de dépendance.

Au cours de l’hiver, Maripier a visité le plateau de Marie-Claude Barrette à TVA pour jaser de sobriété. Elle a reconnu ses torts et affronté ses démons. Bref, elle s’est prise en main et a pris soin d’elle.

On ne peut pas excommunier une personne indéfiniment ou la bannir des ondes à tout jamais. De ce que j’entends, les grands réseaux seraient prêts à donner une deuxième chance à Maripier Morin, mais ils attendent de voir la réaction du public avant de brandir les contrats.

Seraient-ils accusés d’invalider le témoignage de ses victimes en lui offrant du travail ?

Les fans ont pardonné à Maripier Morin. Ce sont les gens du milieu artistique qui lui en veulent encore. Comme si eux n’avaient jamais pris de solide débarque.