On jurerait que les Gémeaux ont été distribués – ou éparpillés ? – de « façon équitable » pour acheter la paix et fermer le clapet aux contestataires qui réclament une refonte du mode d’attribution de ces prix du petit écran.

Cette répartition « égalitaire » a causé plusieurs incongruités et injustices dans le tableau d’honneur final. Comment STAT a pu rafler tous les trophées majeurs de la soirée, dont meilleur premier rôle (Suzanne Clément), meilleur rôle de soutien (Geneviève Schmidt), meilleure réalisatrice (Danièle Méthot) et meilleur texte (Marie-Andrée Labbé), mais échapper celui de la meilleure quotidienne, qui a atterri dans le camp d’Indéfendable ?

Ça ne fonctionne pas, votre honneur. Même le producteur Charles Lafortune avait l’air sonné de cette victoire inattendue.

Car Indéfendable, nommée 14 fois, a mordu la poussière sur tous les fronts devant STAT et se sauve quand même avec la récompense ultime. Voilà un signe que le système de votation cafouille.

J’ai vu les 120 demi-heures de STAT, de même que les 120 demi-heures d’Indéfendable, et le feuilleton médical de Radio-Canada surpasse, en qualité, le téléroman juridique de TVA.

La même ambivalence a été constatée au rayon des séries dramatiques. Le scénariste Simon Boulerice a été couronné pour les textes de Chouchou de Noovo, Patrick Hivon et Anne Dorval ont brillé pour leurs rôles dans La nuit où Laurier Gaudreault s’est réveillé du Club illico, mais c’est Avant le crash de Radio-Canada qui a remporté la statuette la plus prestigieuse du gala.

Très content pour Avant le crash, vraiment, c’est excellent. Reste que cette dispersion des Gémeaux témoigne d’un manque de cohérence et de logique dans la sélection des lauréats. Avant de monter sur la scène à 22 h 16, Avant le crash n’avait rien récolté.

L’Académie a été plus conséquente chez les téléromans en saluant Alertes de TVA et son auteure Julie Hivon. Catherine Trudeau a toutefois agrippé le prix Gémeaux de la meilleure actrice de téléroman pour sa Catherine dans Les moments parfaits de TVA, qui tirera sa révérence à la fin de l’automne.

En comédie, grosse surprise avec le couronnement de Complètement lycée de Noovo, une parodie de séries américaines d’ados qui a coiffé des titres plus matures tels Les mecs ou L’œil du cyclone.

La crainte que l’implantation des nouvelles catégories non genrées (à huit finalistes) nuise aux chances des femmes de remercier au micro a été dissipée, pour le moment. Cinq des six prix d’interprétation ont été décernés dimanche soir à des actrices. Les hommes se plaindront-ils que ce changement les désavantage ?

Perso, je reviendrais à la méthode « ancienne », comme celle des Emmy, qui distingue les performances masculines et féminines, ce qui permet de mettre encore plus de lumière sur les comédiens.

Mais bon. « On est tous des humains », ont répété les choristes – merci, on le savait – du longuet numéro d’ouverture de 17 minutes, qui aurait dû être raccourci.

Gars rassembleur et festif, Pierre-Yves Lord a injecté de la gratitude, de l’émerveillement et énormément de musique dans ses interventions. Je préfère les galas plus piquants, drôles et mordants, mais on ne reprochera pas à PY d’être gentil et bienveillant, quand même.

PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE

Pierre-Yves Lord

La vignette à la Plan B où Pierre-Yves Lord pourchassait Pier-Luc Funk dans une kyrielle d’émissions québécoises a été savoureuse. On aurait pris davantage de ce contenu rigolo. Et bravo pour l’autodérision de Guillaume Lemay-Thivierge, qui a ri de son esclandre incompréhensible de l’an dernier.

La séquence de l’intelligence artificielle, notamment la portion du « blackface » de PY Lord dans Les filles de Caleb, a été mourante.

Côté discours, celui de Christine Beaulieu (L’œil du cyclone), qui a louangé sa maman, a marqué un temps fort, tout comme celui de Patrick Hivon, super émouvant, qui a encensé le « petit crisse » à Xavier Dolan à la toute fin d’un gala qui a duré 20 minutes de trop.

OD version épurée

Pas de conseil d’administration inutile, de deuxième aventure en parallèle ou d’autre gadget déstabilisant pour les participants, Occupation double Andalousie a renoué, dimanche soir, avec un format plus classique et épuré, qui a mis en scène des célibataires sincères, sympathiques et souriants, dans un contexte favorisant davantage les rapprochements que les affrontements.

Oui, l’impressionnant tapis rouge, déroulé sous forme de « speed dating », a été pimenté de petits malaises – des moments trop cringe, en langage OD –, mais rien pour crier à l’intimidation. La production a pris ses distances de son ancienne formule axée sur les influenceurs et actionnée par une énergie négative, ce qui a insufflé de la fraîcheur à la téléréalité Cupidon de Noovo, qui fête ses 20 ans.

Par exemple, les gars ont craqué pour deux filles pétillantes, intelligentes et naturelles, soit Laurence, 24 ans, étudiante en sciences infirmières, et Marilyne, 24 ans, étudiante à la maîtrise en psychologie. Ça faisait changement des « instababes » et autres vendeuses de cossins sur TikTok des chapitres précédents d’OD.

PHOTO TIRÉE DU COMPTE FACEBOOK D’OCCUPATION DOUBLE

Candidats d’OD Andalousie

Un des rares gars qui a « flex ses abdos » (Gabriel, le bad boy électromécanicien) a été éliminé sans hésitation, même s’il était « super énergétique ». Ça faisait changement des saisons d’avant où les concurrentes se pendaient au cou de tous les danseurs nus du Grand Montréal.

Les 16 nouveaux candidats donnent l’impression d’être là pour s’amuser, voyager, flirter et non doper leur nombre d’abonnés sur les réseaux sociaux.

En vrac, Mathieu B. dit Mathieu Bijoux (le gars des bagues) dégage full, Johanel a une « vibe calmante », Racky est tellement « laid back », Mathieu P. dit Mathieu Pasta est « ballsy » et il a « drop » plein d’infos sur lui sans poser de questions à Rebecca, drapeau rouge. Ah ! oui, la maison des filles est « insane », celle des gars aussi.

Aux commandes de ce gros plateau, Alicia Moffet et Fred Robichaud ont été plutôt habiles. Je m’attendais à bien pire, car Jay Du Temple a imposé un style d’animation quasi inimitable. Alicia et Fred jouent beaucoup sur leur dynamique de couple – elle est où, ma bague ? –, ce qui pourrait devenir agaçant à la longue.

Après cette chaude soirée, « assez twisté et rebondu », pour citer Alicia Moffet, c’est le temps de s’ouvrir une bonne bouteille de (insérez ici le nom du commanditaire ou, encore mieux, laissez faire).