Sur la scène du Théâtre Maisonneuve, avant que n'y entre Jane Birkin hier, trônaient deux grands panneaux. Non, pas de pub. Il s'agissait plutôt d'agrandissements de la photo d'Aung San Suu Kyi, le Prix Nobel de la paix gardée en résidence surveillée en Birmanie depuis des années, malade, et qui sera jugée par la junte militaire mardi. Tout Jane Birkin était dans ce choix...

Hier, devant un public attentif, Jane Birkin a démontré qu'elle était beaucoup plus qu'une «femme ordinaire parlant de ses petites affaires», pour reprendre ses mots. C'était une humaine qui refusait qu'une autre humaine soit ainsi encagée et qui prenait les moyens à sa disposition pour que cette situation cesse, si possible («mais quand j'ai écrit cette chanson il y a deux ans, c'était parce que je pensais que ça changerait. Mais c'est encore pire...»). Et c'est avec une véritable colère dans la voix que Jane Birkin a chanté la chanson qu'elle a elle-même écrite pour défendre la dirigeante du Parti démocrate birman.

 

Car Jane Birkin écrit désormais ses propres chansons, et les morceaux de son très bel album, lancé en novembre dernier (Prends cette main, Période bleue, À la grâce de toi, Madame, etc. tirées de son disque Enfants d'hiver) se mêlaient sans aucun problème à celles de son «Sèèèege» Gainsbourg (L'anamour, Amour des feintes, Je suis venu te dire que je m'en vais...).

Vêtue comme un homme (chemise, gilet, bretelles, pantalon), la longiligne Jane était accompagnée de quatre musiciens qui l'ont appuyée avec talent, dans des arrangements qui étaient parfois plus audacieux qu'heureux, c'est vrai. C'est tout à l'honneur de Birkin que de ne jamais se répéter et de ne jamais craindre d'essayer autre chose. Et les spectateurs, parfois démontés, l'ont suivie et ont été une fois de plus séduits par l'étonnante lumière qui émane de la chanteuse sans artifice, le charme indicible de chacun de ses gestes, l'indéniable intégrité de cette femme qui, à 61 ans, a lancé son premier disque de chansons signées Jane Birkin - ce qui n'est pas rien quand celui qui vous a écrit un répertoire avant n'était nul autre que Serge Gainsbourg.

En première partie, Stéphanie Lapointe a, à sa manière délicate, su toucher les spectateurs, avec quelques chansons tirées de son nouvel album Donne-moi quelque chose qui ne finit pas, que ce soit deux duos avec le Français Albin de la Simone particulièrement réussis (À quoi et C'est moi qu'elle aime), des textes signés Pierre Lapointe (dont la très chouette Une fleur) ou Stéphanie Lapointe elle-même, bref tout un univers musical surprenant, qui mêle les années 60 et le 21e siècle. Elle était en outre accompagnée de musiciens exceptionnels: Philippe Brault à la contrebasse, Joseph Marchand à la guitare et surtout la découverte totale pour moi: la choriste Émilie Laforest - le mot choriste me semble toutefois bien faible! Les voix des deux jeunes femmes mêlées figureront certainement au nombre des très bons moments de ces FrancoFolies 2009.