Mary Margaret O'Hara est sans conteste une des artistes les plus libres que le Canada anglais ait engendrées. Reconnue pour la singularité de sa voix et l'éclectisme échevelé de sa culture musicale, artiste visuel respecté, insaisissable sur toute la ligne. Certes imprévisible, mais libre de tous trucages, comme disait Michel le Magicien.

Cette douée quinquagénaire fait l'objet d'un culte depuis les années 80, et ce pour différentes raisons: elle a très peu enregistré (une paire d'albums à son effigie!), elle a bousillé des offres en or notamment avec le prestigieux label Virgin dans les années 80. Ingérable, elle n'a jamais mené de carrière comme on l'entend dans le showbiz. Pour faire une histoire courte, cette indomptable Torontoise se montre la fraise quand, où et comment elle le désire.

Cette fois, c'est à Pop Montréal que ça se passe, et il faut sauter sur cette rarissime occasion. Mary Margaret O'Hara vient s'y produire avec le guitariste Rusty McCarthy, le bassiste Rich Brown, le percussionniste Aiden Closs et peut-être d'autres invités.

«C'est vrai, je suis venue peu souvent à Montréal, la dernière fois c'était à la Sala Rossa pour y faire de l'improvisation libre. Ce que j'aime de cette pratique, c'est que tes accompagnateurs cessent de l'être pour devenir des partenaires égaux. Mon prochain concert sera un mélange de chansons et d'impro; il ne faut pas exagérer car cela peut devenir trop étrange pour une partie de l'auditoire.»

Si c'est elle qui le dit, on fait un acte de foi immédiat!

De l'improvisation libre à l'American Songbook en passant par l'électronique, le jazz contemporain, le blues ou le country folk, l'univers de notre interviewée exerce une magie des plus attrayantes.

Inutile d'ajouter que les conversations avec la tante de l'excellente artiste montréalaise Alexis O'Hara ne s'organisent pas aisément. Il faut passer par le patron de Pop Montréal pour obtenir un rendez-vous téléphonique! Or, une fois qu'elle décroche le combiné tout se passe à merveille. Elle s'enquiert des activités de son interlocuteur, comme si elle faisait connaissance dans le quotidien. Le lien de confiance est vite établi, elle répond généreusement aux questions la concernant.

«Vous me dites que j'ai un style vraiment spécial? Qui ne ressemble à personne? Franchement, je ne sais pas ce que je fais. Les titres de l'American songbook me viennent naturellement, je les chante avec ma soeur depuis si longtemps. Le jazz? Mon père avait une très belle collection d'albums de jazz. J'aime la musique d'Afrique de l'Ouest, l'électronique, j'aime beaucoup de choses. Ce que j'écoute actuellement? J'écoute  la radio, notamment The Signal sur CBC Radio 2. J'aime la musique de mon jeune voisin, dont le père montréalais est d'origine indienne. Faudrait bien que je lui demande  comment il se nomme.»

Carrière musicale en dents de scie, avez-vous déduit.

«Je ne me produis pas sur scène aussi souvent que je ne le voudrais, remarquez. Il n'y a pas si longtemps, j'ai préparé un spectacle avec l'artiste multidisciplinaire Michael Snow. Vous savez, je compose plus de musique que je n'en chante. Et puis je peins, je dessine, je crée des images pour des magazines spécialisés, j'expose parfois. Et je ne montre pas tout ce que je fais; une part importante de cette production reste chez moi. Si je devrais présenter toutes les facettes de ma création en tant que tout? Je devrais peut-être y songer. Pour l'instant je fais des piles!» confie-t-elle en échappant un rire franc.

Et pourquoi, Mary Margaret O'Hara, avoir si peu enregistré depuis vos débuts si prometteurs?

«Je ne sais pas vraiment pourquoi... Je n'ai pas vu le temps passer. Je n'en ai probablement pas une juste notion! Chose certaine, j'ai l'impression de bien occuper mon temps, même quand je marche dans la rue.»

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Mary Margaret O'Hara se produit ce samedi, 23 h 30, au Cabaret du Mile-End