Pour leur premier concert à Montréal en six ans, les Moody Blues ont revisité mardi soir à peu près toutes les époques de leur carrière, exception faite de leur tout premier album, dont n'étaient pas les chanteurs actuels Justin Hayward et John Lodge, et les disques quelconques qu'ils ont fait paraître dans les années 90. Le public de Wilfrid-Pelletier s'est levé systématiquement pour applaudir chaleureusement les chansons les mieux connues de leur vaste répertoire puis s'est rassis aussitôt que débutait la chanson suivante.

Des Moodies symphoniques de 1967 aux stars du vidéoclip, il y a une marge et cette soirée a forcément été un peu décousue. Une chanson comme Your Wildest Dreams possède un certain charme, mais ses contemporaines I Know You're Out There Somewhere et The Other Side Of Life font très années 80, surtout cette dernière dont le vidéoclip «acté» est tellement quétaine que les Moodies auraient probablement rougi de honte s'ils n'avaient pas fait dos au grand écran.

C'était sans doute le prix à payer pour entendre des choses plus rares qui nous ont rappelé que les Moody Blues ne faisaient pas uniquement dans la chanson sentimentale et/ou grandiloquente. Je pense surtout à Peak Hour, un extrait obscur de l'album symphonique Days of Futures Passed qui baignait joliment dans la pop des 60's, et à Higher and Higher, une chanson de 1969 à la thématique spatiale et au solo de guitare psychédélique.

Les moments de grâce ont été nombreux, surtout grâce à Justin Hayward, interprète de la plupart des chansons, dont la voix mélancolique n'a rien perdu de son pouvoir d'évocation et dont les solos de guitare constituent la seule valeur ajoutée à cette musique qu'on a déjà entendue. Le bassiste John Lodge, complice essentiel pour les harmonies, a tendance à beurrer un peu épais, tandis que le troisième Moody Blues officiel, Graeme Edge, laisse le gros du travail à l'autre batteur un peu hot-dog, mais s'amuse à jouer les stand-up comics quand vient le temps de présenter Higher and Higher.

Les immortelles étaient au rendez-vous : Tuesday Afternoon, évidemment, Nights in White Satin, toujours belle à en donner des frissons, Question, The Story In Your Eyes, Ride My See-Saw et des choses moins rythmées comme la pastorale Are You Sitting Comfortably et Isn't Life Strange.

On ne demande plus aux Moody Blues de nous surprendre ou de chanter de nouvelles compositions. En 16 chansons et 90 minutes pile, hier, ils ont offert au public ce qu'il était venu chercher : de belles chansons jouées avec un professionalisme qui les honore.