Comme un seul homme, le pianiste et brillantissime compositeur new-yorkais Vijay Iyer se produisait hier dans un Upstairs rempli jusqu'au dernier millimètre carré. Encore une fois, le ravissement.

Un de ses mentors absolus, Thelonious Monk, était l'inspiration d'un premier «mouvement» dominical, développé à sa manière, autour de Work et Friday the 13th.

Le deuxième «mouvement» de ce concert solo fut impressionniste: évocations des débuts de la modernité, concepts harmoniques si chers au jazz, actualisations typiques des années 80 et 90.

On saura plus tard que Vijay Iyer évoquait également la regrettée Geri Allen, pianiste extraordinaire et «profonde influence» dont il a repris des fragments de composition - tirés de l'album Etudes, enregistré de concert avec le batteur Paul Motian et le contrebassiste Charlie Haden... également disparus.

L'articulation des phrases, les concepts rythmiques, cette attaque lourde et dramatique, faussement graveleuse, ces transformations harmoniques, ces citations très conscientes de toutes les phases du jazz moderne ou contemporain, ces séquences atonales et abstraites, ces retours aux mélodies connues et aux harmonies consonantes... Manifestement, Vijay Iyer ne vit pas au pays de la légèreté!

Normalement, un musicien de cette profondeur serait confiné aux salles de concert. Or, notre homme n'est pas crispé, il sait adoucir la proposition et l'adapter au contexte d'un club, sans se renier pour autant.

On aura eu droit à un parfait dosage entre l'inconnu et le connu, avec un soupçon de Body & Soul pour conclure ce premier set des plus réussis.