Il fallait s'en douter, un immense cube de Rubik a surplombé la scène d'un Théâtre Maisonneuve rempli à craquer... et dont les parois ont effectivement été éprouvées par la manière Malajube. Rempli d'une audience dans la jeune vingtaine (ou la fin de dizaine!) qui n'a visiblement pas l'habitude d'investir ce lieu institutionnel. Et qui n'a pas l'habitude de s'asseoir gentiment.

On présumait d'un concept éclaté, pas plus resserré que ne l'est la rhétorique de Malajube. Après tout, ce spectacle était prévu en quatre parties et un cube comporte six surfaces, non? Il ne fallait donc pas trop chercher à comprendre. Et investir ce concept cubes rubiques (comme l'écrit Malajube) à la manière de tous ces fans vendus d'avance.

Casablanca, la première au programme, a été balancée en mode Kraftwerk: quatre claviers et une batterie à déclenchement numérique, costumes futuristes assortis. We are the robots!

Les Collemboles sautille alors dans le même genre, avec des oscillations, chuintements électroniques et autres effets de synthèse. L'intro mélodique d'Hérésie, franchement kitsch, ne passe pas inaperçue. Luna qui s'ensuit comporte un titre fait sur mesure pour cette première partie, somme toute réussie. On complète la séquence avec un gros clin d'oeil électro-pop avec Ursuline, dont le groupe réussit à conserver l'énergie rock - en mettant l'accent sur la percussion et une profusion d'épaisses coulées de claviers.

Question de changer de décor et de costumes, une harpiste tente tant bien que mal d'occuper l'espace-temps que la clameur de l'auditoire (peu attentif) participe aussi à meubler.

La seconde portion de Cubes rubiques s'avère chorale, pour ne pas dire pastorale, grano, un peu messe à gogo. Affublés de chasubles d'un blanc immaculé, six chanteurs et chanteuses se dressent derrière le band qui a changé d'instrumentation: guitares acoustiques, piano et vibraphone, batterie «normale». Malajube enchaîne alors Jus de canneberge, La Valérie, Dragon de glace... Une question s'ensuit pendant la version de Pâte Filo: pourquoi le choeur ne procède-t-il pas à l'explosion vocale que commande la chanson? Trop ténu, le choeur... Mal sonorisé? Pas sûr... Le deuxième bloc prendra du mieux avec les chansons Le Métronome et Cube rubique (carrément) sans atteindre le niveau offert par la partie technoïde du spectacle.

Après l'entracte, un canular savoureux nous saute aux yeux et aux oreilles: au lieu de Malajube, c'est Voivod qui se présente sur scène! Les invités-surprises sont ensuite joints par leurs hôtes au grand plaisir des fans. Après quoi Malajube restera seul sur les planches incendiées, pour ainsi attaquer La Maladie. La facture restera musclée, il va sans dire. Même Étienne d'Août, assez lyrique, sera interprétée avec un supplément de testostérone. Néanmoins, cette séquence d'intention métal restera relativement voisine du son «normal» de Malajube.

Cette musculation, d'ailleurs, sied bien à des chansons comme Casse-cou, ou à la couleur prog rock du Crabe ou encore au groove viral de Porté disparu. Et voilà que Voivod refait surface aux côtés de Malajube, sans compter les six choristes. L'intention est belle, la foule est soulevée par la relecture de Cristobald.

La quatrième partie de cette soirée au programme tenu secret jusqu'alors... c'est le rappel. Ça s'amorce sur Les Dents, ça explose avec Montréal -40 C et ça culmine avec La Monogamie, le tout coiffé d'une longue ovation. On aura saisi, somme toute, trois déclinaisons imaginées par Julien Mineau et ses collègues: techno, grano, métallo. Cubes rubiques, dites-vous?