La grande épreuve, ce n'est pas se produire dehors, à la belle étoile, devant des milliers de personnes. Non, l'épreuve réelle, celle qui distingue les vrais des éphémères, c'est se produire dehors, sous la pluie, devant des milliers de personnes. Cette épreuve, Coeur de pirate, alias Béatrice Martin, l'a traversée avec aplomb et grâce, hier, sur la grande scène de la Place des festivals, sous des milliers de gouttelettes, alors qu'une foule jeune et munie de parapluies l'accueillait avec chaleur, malgré l'humidité!

Disons-le tout de suite: c'est extraordinaire, l'assurance que la jeune femme blonde a acquise en un an. Exit, la timide effarouchée qui se produisait dans la petite salle de l'Astral aux Francos l'an dernier. Nous avions devant nous une artiste qui a multiplié les spectacles au cours des mois et qui en a vu d'autres, qui a connu le succès et le tourbillon médiatique en France... et qui en ramène même un tout petit brin d'accent, mignon. Mais nous avions aussi devant nous une chanteuse reconnaissante de voir à quel point son public l'aimait, une pianiste souriante, une fille vraiment plus naturelle... et les cheveux mouillés. Car un moment donné, il pleuvait en titi, les amis...

 

Pour l'occasion, Coeur de pirate a repris toutes les chansons de son seul album, avec ses musiciens, plus des cuivres et un quatuor à cordes. Elle a poussé l'audace jusqu'à en présenter, comme ça, en plein air, quatre inédites (Loin d'ici, Danse et danse, Tout reste du pareil au même, Place de la République), qui étaient intéressantes et très «coeur-de-piratiennes», que ce soit au piano ou accompagnée par un quatuor à cordes. Et elle s'est payé un chouette rappel: la chanson Étienne d'août de Malajube, avec tous ses invités.

Car elle avait aussi des invités, des gens qui lui tenaient à coeur: Dumas, Tricot Machine, Jimmy Hunt et le groupe The Stills (qui chantaient en français pour elle!). Étrangement, c'est tout de suite après une magnifique version de Corbeau (ma chanson préférée), quand elle a accueilli le duo Tricot Machine, que le spectacle a vraiment pris son envol. Et pourtant, rien de plus différent que Béatrice Martin et Catherine Leduc... Mais voilà, la loi des contraires a fait sa job, et tant Printemps de Coeur de pirate que Défier les rites de Tricot comptent au nombre des bons moments de la soirée. Même chose pour le passage des Stills, qui ont accompagné la belle ondine pour Retour à Vega et Place de la République.

Bref, Coeur de pirate a fait la preuve que, sous ses allures de jeune fille boudeuse, elle avait le coffre voulu (et même pas mal plus de voix et de registre qu'avant) et la nature batailleuse nécessaire pour mener une carrière qui ira au-delà d'un premier album. Le spectacle d'hier a été enregistré et devrait être diffusé cet été à Radio-Canada.

Chick'n'Swell

Il y avait des enfants qui dansaient sous la pluie, des gars qui faisaient du «headbanging», des filles avec des parapluies et des gens avec des sacs verts pour imperméables: on était au show des Chick'n'Swell et la pluie n'allait pas avoir raison de l'enthousiasme des fans, réunis pour célébrer le 20e anniversaire du trio.

Accompagnés par trois musiciens rock, les gars ont chanté aussi bien leurs classiques (dont les inénarrables Dring dring pow pow et Pète et répète), mais aussi certaines de leurs nouvelles chansons, qui ont bien marché: LOL avec le groupe métal eXtério (il y a même eu un petit mush pit et un solo de chat en peluche!!!!), Tout est tiguidou, Femme âgée asiatique, Ti coeur...

C'était vraiment chouette. Et vraiment mouillé. Alors, si Dieu est vivant comme le chantent les Chics et élégants, il va convaincre les FrancoFolies d'ajouter une supplémentaire du groupe, genre samedi, 16 h, sur la grande scène: les Chick'n'Swell n'ont pas tous les jours 20 ans.