Lancé en 1971, le film Après-ski est loin d'avoir marqué l'histoire du cinéma québécois. Mis à part quelques scènes pseudo-érotiques avec Daniel Pilon et la présence à l'écran d'un certain René Angélil, ce navet soft porn réalisé par Roger Cardinal fut assez vite oublié.

Sa musique hyper funky, en revanche, n'a cessé de gagner en popularité, au point de devenir un objet de culte pour les mélomanes du monde entier. Devenue rarissime, la trame sonore d'Après-ski pouvait valoir dans les centaines de dollars sur le marché des collectionneurs, et elle est devenue un des disques les plus recherchés de notre patrimoine pop québécois.

La bonne nouvelle, c'est que l'album en question a été réédité plus tôt cette année par les disques Pluton, petite étiquette montréalaise consacrée à l'exhumation de vieux grooves québécois. Les 500 premiers exemplaires du disque se sont vendus comme des petits pains chauds, jusqu'aux États-Unis et au Japon. L'autre bonne nouvelle, c'est que la résurrection d'Après-ski ne s'arrête pas là.

Ce soir aux FrancoFolies, le groupe Érotique PQ jouera sur scène l'intégrale de cette fiévreuse trame sonore, qui se situe à mi-chemin entre l'afro-beat et la musique des films de blaxploitation. Huit musiciens monteront sur la scène de L'Astral, y compris une section de cuivres complète, un orgue et, surtout, la guitare psyché-funky du flamboyant Nicholas Jenkins, qui pilotera l'opération.

Jenkins, 28 ans, est trop jeune pour avoir connu l'âge d'or du cinéma érotique québécois. Mais il s'est rattrapé bien des années plus tard, quand les classiques Valérie et L'initiation ont été relancés en vidéo. Il a trouvé Danielle Ouimet «bien belle», mais il a surtout adoré la bande-son. «J'ai toujours été attiré par les trames sonores plus funky. Et surtout, je tripe sur ces vieilles sonorités compressées. Il y a un grain là-dedans qui m'attire particulièrement», dit-il.

Extraits de films

Le concert de ce soir en fera foi, car Érotique PQ interprétera aussi les musiques de Valérie, de L'initiation et d'une tonne d'autres incontournables du cinéma soft porn bien de chez nous comme Viens mon amour, Y a plus de trou à Percé et La pomme, la queue et les pépins. Bonus pour ceux qui veulent «voir» en plus d'écouter: les morceaux seront accompagnés de montages vidéo avec extraits de films, qui iront «avec le feel de la musique».

Pour la petite histoire, on a longtemps cru qu'Après-ski était l'oeuvre du compositeur Jacques Crevier, parce que son nom était sur la pochette. Mais des rumeurs voulaient que ce soit en réalité le célèbre groupe américain Chicago qui avait joué de façon anonyme, étant lié par contrat à une autre maison de disques.

Le fondateur des disques Pluton, Félix Desfossés, a fini par découvrir la vérité. Il s'agit en fait de la formation ontarienne Illustration qui, pour les mêmes raisons, n'a jamais pu en revendiquer la paternité. La musique aurait été enregistrée en un après-midi et son compositeur, John Ranger, n'a évidemment jamais reçu un sou pour ses droits d'auteur. Quant au film lui-même, il revendique l'exploit d'avoir été banni au Québec, les bobines ayant été saisies par la justice pour cause de nudité excessive. Ne courez pas au club vidéo, vous allez être déçu...

Après-ski par Érotique PQ, ce soir 23h, à L'Astral.