Le coup d'essai a été un coup de maître pour Montréal complètement cirque. Le tout nouveau festival des arts du cirque a prouvé qu'il avait sa place sur un circuit festivalier déjà encombré. Et le talent québécois y était à l'honneur, comme l'ont constaté nos journalistes.

Le bilan d'Éric Clément

Les meilleurs moments

iD, la création de Jeannot Painchaud, magistrale boussole du cirque Éloize, a fourni le meilleur moment de cette première mouture. Inutile de choisir un numéro du spectacle plutôt qu'un autre, tant chaque performance de ce conte urbain a sa propre magie et son propre tour de force. Dans son ensemble, la production, appuyée par une musique hors pair, est un grand moment d'art du cirque, le meilleur qu'il m'ait été donné de voir.

Le moins bon moment

Il n'y a pas eu de mauvais spectacles, mais j'ai moins aimé Tabú, des Gallois de No Fit State, et Sway, de la troupe belge Les mains sales. Oui, on est plus près des artistes dans Tabú, mais pour voir quoi de mieux? La démarche est originale, mais pas le contenu. La séduction est absente du propos, tout comme pour Sway, où l'idée de créer une théâtralité et de la souligner par des mouvements de cirque est toutefois intéressante. Mais la promesse, née au début de Sway, de faire émerger de la tension et du malaise un éblouissement au trapèze s'évanouit malheureusement trop vite.

Le moment le plus drôle

Avec Tous cousins!, le duo belge des Zyrgomatik nous a offert le réel plaisir de retrouver nos rires d'enfant. Sébastien Derock et Olivier Mahiant sont Mr. Bean et Stan Laurel en version poétique améliorée. Un brin de naïveté, des mimiques étudiées, des sketchs où l'absurde côtoie l'attendrissement: un grand moment d'humour... D'un humour à la fois simple et soigné.

La révélation du festival

Indéniablement, Éloize a fait un pas de géant avec iD, se révélant, avec des moyens plus modestes, un sérieux concurrent au Cirque du Soleil pour ce qui est de la profondeur du spectacle. Dans une bien moindre mesure, les Zyrgomatik sont une belle révélation et rappellent que les grands clowns font les grands cirques.

Résumé

Cette première année du festival Montréal complètement cirque est un succès total. La programmation de Nadine Marchand et de Stéphane Lavoie était diversifiée, tant dans l'origine des troupes que dans le genre présenté. On a pu mesurer l'incroyable variété de talents qui existe dans cet art de la scène, mais aussi la grande qualité du cirque québécois, infiniment soucieux du détail.

Après iD, le Cabaret des 7 doigts de la main était la production la mieux construite, avec une scénographie impeccable due à la touche exquise de Shana Caroll. Mention honorable aux Confins, venus de Québec présenter RUP-TURE(s), production téméraire et distinctive; et aux Australiens du A4 Circus Ensemble qui, avec Downpour, ont composé un très ingénieux mélange de poésie, de sensualité et de virtuosité, à l'image de ce festival.



Le bilan de Jean Siag


Les meilleurs moments


Le numéro hallucinant de trampomur et celui, jamais vu, du vélo acrobatique dans iD, du Cirque Éloize; la musique tour à tour rythmée et atmosphérique du compositeur Peter Reynolds, jouée live par un orchestre gallois, et le numéro de trapèze fixe de Natalia Fandiño dans Tabù; le numéro de jonglerie dans la finale de ; les masques hyper expressifs du duo allemand Habbe & Meik; les minutes complètement cirque, très astucieuses, seulement il fallait être là au bon moment.

Les moins bons moments

L'arrivée du train acrobatique du Cirque du Soleil pour marquer la première présentation de Montréal complètement cirque. L'idée était bonne, les numéros sympathiques, mais pas à la hauteur de ce que le Cirque du Soleil fait de mieux. Autre déception: ne pas avoir prolongé les représentations de Totem, qui a démarré sa tournée internationale sitôt le festival commencé... Les numéros clownesques de Habbe & Meik dans The Best étaient mignons, mais vraiment «passés date», bien que les enfants présents - et des adultes aussi - aient semblé apprécier. Inspirés de Laurel et Hardy, c'est vrai que les numéros sont intemporels. Mais je n'ai jamais aimé Laurel et Hardy...

Les moments les plus drôles

Le monologue d'Éric Longequel dans , où il se lance dans une pseudo-critique sociale et dénonce le fait qu'on nous écrase comme des citrons. Suivi d'un: «Je ne suis pas un citron!» L'acrobate de Tabù qui faisait ses numéros avec un cigare: ça m'a fait penser à Popeye. Et j'aime Popeye.

La révélation

. C'était le premier spectacle de la compagnie belge EAEO, et c'est certainement une troupe qu'on aimerait revoir avec ses numéros de jonglerie au service d'un propos intelligent. Dans , l'espace occupé par le quatuor de jongleurs rétrécissait à mesure que progressait le spectacle, jusqu'à ce que l'espace de jeu soit d'un mètre carré. Par contre, il leur faudrait revoir le nom de leur compagnie...

Résumé

Hormis le fait que Montréal complètement cirque se soit ajouté à un programme estival déjà chargé, avec Juste pour rire, Nuits d'Afrique et le Festival d'été de Québec, qui avaient lieu à peu près en même temps, le nouveau venu mis au monde par la TOHU a fait la preuve qu'il a sa place. Puisant aux sources du théâtre, de la danse, de la musique, et, bien sûr, du cirque, les spectacles retenus dans cette première programmation de Montréal complètement cirque étaient, dans l'ensemble, variés, audacieux et toujours avec une bonne dose d'humour. Ce festival, qui nous a donné l'occasion de voir ce que font les Belges, les Espagnols, les Anglais, etc., a également confirmé la force et le talent de nos artistes de cirque, avec Éloize et les 7 doigts de la main en tête.