Même si Raté aborde la délicate question du suicide, du handicap et de la dépression, Hugo Meunier réussit le tour de force de ne pas nous déprimer à la lecture de son nouveau livre.

Au contraire, Raté est un roman profondément émouvant et humain, qui nous tire les larmes plus d’une fois. Le journaliste et chroniqueur, qui a déjà trois romans et un roman jeunesse à son actif, prouve à ceux qui en douteraient encore qu’il sait écrire de très bons livres.

Après avoir abordé la question de l’intimidation dans Olivia Vendetta — porté par une héroïne transgenre de surcroît —, Meunier montre de nouveau qu’il n’a pas peur de s’attaquer à des sujets difficiles et sensibles, ici celui du suicide, qu’il traite sans mièvrerie ni ton moralisateur. Christian, père de famille dépressif, acteur raté, a raté son suicide en se lançant devant une rame de métro et il est plongé dans le coma à l’hôpital, laissant son ex-blonde, Marilyn, et leur fils, Robin, incapable de lui pardonner son geste, devant un choix difficile : attendre ou le débrancher ?

Lorsqu’il se réveille, miraculeusement, mais lourdement handicapé, il doit réapprendre à vivre, même si tout ce qu’il désire, c’est achever le travail. Grâce aux retours fragmentés dans le passé, Meunier revisite le parcours de vie d’un homme qui n’a jamais su exister que dans le regard des autres, l’implosion de son couple, sa longue descente vers la noirceur.

L’auteur en profite pour aborder des sujets comme celui des proches aidants, la façon dont la société traite les sans-abri, la vie (et sexualité) avec un handicap... Oui, on sent le « jupon » de journaliste qui dépasse parfois — Meunier a toujours aimé dans ses reportages mettre la lumière sur ceux que la société relègue aux oubliettes —, mais il sait bien lier le tout à son histoire, parsemée de personnages attachants.

Ce qui ajoute une profondeur au récit, ce sont ces segments insérés tout au long du livre qui mettent tous en scène des gens qui ont décidé d’en finir — de Cléopâtre à Nelly Arcan, en passant par Anthony Bourdain — dans des vies parallèles où ils auraient plutôt continué à vivre. Une belle façon de dire qu’il y a toujours un autre chemin.

Raté

Raté

Stanké

344 pages

7/10