Bien qu’elle habite depuis 20 ans à « l’Extérieur », Geneviève Dufour n’a pas oublié l’essence du territoire charlevoisien qui l’a vue grandir. Enseignante de littérature qui jusqu’à maintenant « écrivait en cachette », elle sort de sa réserve pour nous offrir Comme par enchantement, une mosaïque de récits ancrés davantage dans l’aspérité de la vie dans Charlevoix que dans la beauté des paysages à laquelle s’accrochent les touristes.

Avec une plume à la fois sobre et colorée, enjolivée par la parlure de son village natal, Geneviève Dufour plonge dans son histoire familiale et celles des personnages qui peuplent Rivière-Malbaie. Il y est question de tremblement de terre, de chasse et de pêche aux moules, de nudistes qui accaparent des coins de plage, mais aussi de querelles, de silences, de pauvreté et d’audace qui, note-t-elle, manquent aux cartes postales.

À travers l’histoire des autres, c’est aussi la sienne qui jaillit, marquée par un déracinement volontaire qui, tel un séisme, a créé une fracture entre deux vies. « En m’évinçant de la sorte, et cela me désespère, j’ai perdu un accès naturel à ce monde-là que je ne peux désormais qu’observer par la lunette humide et floue de la mélancolie », écrit-elle.

Geneviève Dufour nomme avec justesse ce sentiment de rupture qui habite ceux et celles qui ont, un jour ou l’autre, quitté leur région natale pour s’installer à l’Extérieur, ce rapport ambivalent à l’accent et cette impression de décalage qui marque chacun des retours. Un collage de récits à la fois introspectifs et tournés vers l’autre, ancrés dans un territoire qu’on ne raconte pas assez.

Comme par enchantement

Comme par enchantement

Les éditions de la maison en feu

112 pages

7,5/10