«Je ne suis pas un chef!» C'est la déclaration la plus populaire de la dernière décennie dans le merveilleux monde de l'édition du livre de cuisine.

L'aveu des mordus de bonne bouffe qui proposent une incursion dans leur imaginaire culinaire. Non, ils n'ont pas de formation. Mais oui, ils tentent de rivaliser d'audace et d'imagination avec les toqués professionnels. Et les éditeurs et lecteurs en redemandent.

Les uns vous inviteront à opter pour l'ingrédient local, bio et éthique en vous fournissant les meilleures adresses et quelques trucs pour orienter vos choix. Les autres vous ouvriront les portes de leur maison. D'autres vous proposeront des recettes pour chaque occasion, du petit-déjeuner au réveillon, de la visite du patron à la tentative de séduction. Et d'autres encore vous transporteront dans leur univers, associant aux petits plats des musiques d'ambiance ou des lectures coups de coeur.

Deux façons de voir les choses. La plus cynique: d'aucuns profitent du chemin grand ouvert par les Pinard, di Stasio, Larrivée et Plante pour s'inscrire en phénomènes médiatiques de la bonne table. La plus heureuse sonnerait plutôt comme ça: la cuisine se démocratise. Mieux encore, elle ouvre vers un retour à la vie plus jouissive, plus vraie, plus passionnée. Christian Bégin vient de publier Curieux Bégin sur la route, tiré de l'émission Curieux Bégin. Dans ce livre de gars, qui accorde une large place aux viandes, le comédien nous entraîne à la rencontre de ses producteurs préférés, à bord de son Westfalia.

D'autres artistes moins connus se mettent aussi au coeur de leur livre. En voici trois sortis cet automne.

La tradition

Vous ne connaissez probablement pas Maria Loggia. À moins de l'avoir entrevue lors de ses apparitions à L'Épicerie de Radio-Canada ou d'avoir entendu parler des cours qu'elle donne chez elle depuis qu'elle a lancé son école Tavola Mia, il y a quelques années. Mais les offres télé commencent à débouler sur le comptoir de la Québécoise d'origine italienne.

L'Italie, la famille, la cuisine, la peinture et les traditions. C'est un peu tout ça qu'on trouve dans Cuisinez avec Maria Loggia, le livre qu'elle a accepté de publier aux Éditions Cardinal. «À condition que ça se fasse à la maison, chez moi, et que ça me ressemble», précise la mère de famille.

Le résultat ressemble à ces cours qu'elle a lancés il y a 10 ans parce que ses amies et connaissances insistaient tant pour qu'elle partage son savoir. Un savoir grappillé au moyen de cours, de lectures, de voyages et d'expériences. Ça donne un livre intime mais pas trop, personnel mais réservé, traditionnel, sans flafla. «Je veux que les choses aient une âme et qu'on le sente. Que ce soit assez simple pour que les gens aient envie d'essayer les recettes », dit-elle.

> On aime... La simplicité, les petits trucs qui accompagnent chaque recette.

> On hésite... La cuisine italienne ayant eu large place au cours des dernières années, on a un peu l'impression que ça se répète.

Cuisinez avec Maria Loggia, Éditions Cardinal, 34,95 $

L'urbain attaché à sa famille

Enfant, assis sur le bout du comptoir, Stefano Faita regardait sa mère Elena cuisiner. Tout a commencé là. Là où aujourd'hui sa fille Emilia prend place à son tour afin de mettre, littéralement, la main à la pâte (à pizza) de papa. Pour le quincaillier-cuisinier montréalais, la vie suit son cours comme elle se doit, sans jamais perdre de sa saveur.

Son deuxième livre de cuisine, Entre cuisine et bambini, n'est pas un livre de «recettes à faire avec les enfants». Il décrit plutôt la passion qui les habitera si vous les laissez participer quotidiennement à la préparation des repas.

«C'est ma fille qui a inspiré ce livre, mais il porte essentiellement sur la famille, explique-t-il avec l'énergie qui le caractérise. Tout tourne autour de la famille élargie, avec la blonde, ma fille, les parents, les frères, les soeurs, les neveux et nièces, mais aussi avec les amis et leurs enfants, et tout et tout. On joue sur ce thème. Des recettes pour les enfants, des plats faciles pour la petite gardienne, les barbecues, les soupers de Noël, on fait le tour. On fait même une visite chez ma soeur en Italie.»

Même à Montréal, Stefano voyage. Dans les ruelles, les parcs, au marché, dans les cafés, les restos, chez les amis. «Je suis un urbain fini qui aime Montréal, le marché Jean-Talon, toute la vie autour. Faire une piñata dans une ruelle, ça se peut pis c'est le fun. Je voulais montrer ça au monde et l'inviter à me suivre là-dedans, à profiter du temps, de la vie avec ceux qui nous entourent.»

> On aime... Les différentes variantes des recettes de Stefano, qui sont souvent surprenantes, et toujours délicieuses.

> On hésite... À vouloir offrir de tout pour toutes les occasions, on finit avec peu pour chacune d'entre elles.

Stefano Faita, Entre cuisine et bambini, éditions Trécarré, 39,95 $

L'authentique musique culinaire

Il l'avoue d'emblée: «Je ne suis pas un chef.» Voilà, c'est dit.

Il parle toutefois avec passion de bonne bouffe, des amis autour de la table, des brunchs en famille, des conversations culinaires avec son père, le comédien Gilbert Sicotte, des moments passés à brasser les chaudrons avec sa fille.

Il parle des saveurs qu'il a goûtées aux quatre coins du monde dans les tournées avec son groupe Sky, et du monde qui se trouve dans son assiette dans la cosmopolite métropole.

Antoine Sicotte est avant tout un artiste. Un musicien et un réalisateur. Et une bonne fourchette. Entre deux couvertures d'un énième livre de cuisine, il a inséré une oeuvre d'art à son image. «On ne mange pas qu'avec les papilles, dit-il. Je voulais créer un univers artistique en incluant les yeux et les oreilles.»

Chacune des recettes du cuisinier rebelle vient donc avec une suggestion d'accompagnement musical. «En écrivant le livre, je me suis rendu compte que la musique et la cuisine, c'est symétrique dans les angles créatifs. Dans l'écriture, l'exécution, la livraison, c'est plus que pareil.»

Et règle générale, c'est facile, même si Antoine Sicotte prêche le slow food. «Cuisiner, ça ne doit pas être angoissant, tu ne veux pas te prendre la tête. Et ce n'est pas parce que c'est simple que c'est décevant et sans saveur.»

> On aime... La facture du livre, originale et chaleureuse, la variété des recettes et des suggestions musicales.

> On hésite... Pas trop! Les recettes sont à l'image du Rebelle : éclatées, mais accessibles.

Antoine Sicotte, Le cuisinier rebelle, éditions Cardinal, 34,95 $