Le voyageur explore, le touriste consomme. Tellement que le tourisme est devenu la première industrie mondiale. Devant l'agroalimentaire, le pétrole et l'armement: 200 millions d'emplois, 730 milliards de dollars de retombées.

C'est deux milliards par jour, ça, dont le tiers se dépense autour de la Méditerranée, où se trouvent les deux pays les plus visités au monde: la France et l'Espagne (3e et 4e: les États-Unis et la Chine). Et qui dépense ces sommes folles?

Dans l'ordre décroissant: les Allemands, les Américains, les Anglais, les Français et les Japonais, touristes entre les touristes, on le voit bien, avec leurs caméras à 2000 $ accrochées dans le cou. En fait, la classe touristique est formée d'une minorité occidentale - 3,5 % de la population mondiale - et nantie qui, en avion-taxi, ratisse «la planète bocalisée» à la recherche de «compensations vacancières» au stress journalier de ses prenantes occupations socio-économiques.

Dans son Manuel de l'anti-tourisme, Rodolphe Christin explique de façon limpide les coûts économiques écologiques et sociaux de cette «liberté», arrivant vite à la conclusion que «l'idéal serait que l'autochtone puisse se passer de nous».

Dans ce fascinant «petit livre à rebrousse-poil», Christin - il a voyagé entre autres en Guyane et dans le Grand Nord canadien - n'est pas dupe de lui-même ni de la flambée «altertouristique» qui parle de tourisme durable, ou responsable, ou tout autre qualificatif susceptible de donner bonne conscience.

Finalement, comme dans bien d'autres champs, il y a ceux qui savent voyager, conscients, sensibles - vous et moi, par exemple - et les autres qu'il faut bien appeler par leur nom: des touristes. Regardez-les aller!

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MANUEL DE L'ANTI-TOURISME. Rodolphe Christin. Écosociété, 106 pages, 16 $.