«Eh oui, je publie mon premier roman à 54 ans.» Louise Lacasse émet un petit rire gêné, mais ne cache pas sa fierté. Récipiendaire du prix Robert-Cliche 2010 du premier roman pour Éteignez, il n'y a plus personne, cette prof de français qui dit avoir toujours écrit s'était donné le défi de se rendre jusqu'au bout de sa démarche.

«J'avais envoyé le manuscrit à des maisons d'édition, mais il a été refusé. Je me suis dit qu'en passant par un concours, avec un jury qui travaille sans contrainte de temps et d'argent et qui juge mon travail pour ce qu'il est, j'avais plus de chances.»

Dans ses rêves, Louise Lacasse n'espérait pas tant gagner qu'être lue. Elle a mis deux ans à écrire ce roman foisonnant, construit en chapitres quasi indépendants. «Pour moi, le fil qui unit ce roman, c'est la langue, le style, explique-t-elle. J'avais envie de décrire des lieux, un climat, des personnages. C'était ça le moteur.»

Éteignez, il n'y a plus personne raconte une multitude de destins qui se croisent, avec au centre Marie Cogère, professeure d'initiation aux études amérindiennes dans une université new-yorkaise, qui revient le temps d'un été dans son patelin natal pour vendre la maison de ses grands-parents. On imagine le village situé quelque part dans le Bas-du-Fleuve, mais l'histoire pourrait se dérouler dans n'importe quelle région du Québec.

«C'est un roman du terroir moderne», estime l'auteure qui, malgré la caricature et le burlesque de son écriture, trace un portrait un peu triste de la vie en région. «Je passe toujours mes vacances à Rivière-Ouelle, et je suis partie de cette impression-là. Le roman se déroule à la fin de l'été, les touristes partent, le jeunes aussi. Il y a des séparations, un dépeuplement.»

Et le roman se termine avec cette image terrible des camions à benne et des bulldozers qui rasent la maison familiale de Marie Cogère pour y installer des éoliennes. «Ce sont toujours les régions qui payent, estime Mme Lacasse, qui n'est pas surprise de voir les débats autour de l'exploitation de l'uranium et du gaz de schiste. Les gens ont l'impression que ça améliore leur vie, mais en fait, ils sont affectés par ces changements. Ça crée de l'angoisse, c'est ce que je décris.»

Le ton n'est cependant pas sentencieux, ni déprimant. Louise Lacasse l'a voulu ainsi, avec la présence d'un narrateur omniscient et moqueur. «J'y suis allée sans contrainte dans l'hyperbole, d'une manière féroce, sans finesse, sans subtilité... C'est ce que j'aime.»

Encouragée par son prix, - le jury dirigé par Micheline Lachance lui a remis une bourse de 10 000 $ -, Louise Lacasse s'est déjà remise à l'écriture. Elle aura aussi un automne occupé avec, entre autres, des invitations dans des salons du livre. «Tout ça est nouveau pour moi, je n'ai pas l'habitude, mais c'est excitant.»

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Éteignez, il n'y a plus personne. Louise Lacasse. VLB éditeur, 176 pages, 19,95 $. En librairie mardi.