Il faut du papier pour imprimer la série Harry Potter en braille. Beaucoup de papier: la National Braille Press, maison d'édition de Boston, a réalisé l'exploit en 56 volumes, épais de 30 cm chacun!

L'écriture en braille requiert du papier surdimensionné, ce qui donne inévitablement des livres encombrants. «J'ai des problèmes de dos tellement j'ai transporté de livres dans ma jeunesse. Je transportais peut-être 20 kg de matériel scolaire par jour. Pour un enfant de 12 ans, ce n'était pas rien», raconte Chantal Nicole, enseignante aveugle à l'Institut Nazareth et Louis-Braille.

Mme Nicole est l'une des meilleures lectrices de braille du Québec: elle déchiffre environ 175 mots à la minute, alors que la moyenne se situe autour de 40 mots. Pourtant, même cette experte lit rarement des romans en braille. «C'est compliqué à transporter, il faut aller chercher les livres au bureau de poste... pour moi, c'est trop contraignant», explique-t-elle.

Très cher

Sans compter que les livres en braille coûtent cher. Un seul roman peut coûter plusieurs centaines de dollars. Et la traduction exige bien souvent de longs mois. «À la sortie d'un roman comme Millenium 3, on a le choix: on patiente un an pour qu'il soit produit en braille, ou on utilise un scanneur à reconnaissance de caractères pour l'écouter le lendemain matin.»

C'est toutefois la vitesse de lecture en braille elle-même qui pose le plus grand problème. Même une spécialiste comme Mme Nicole est loin de lire aussi vite que les voyants, qui déchiffrent de 300 à 400 mots à la minute.

C'est ce qui a découragé Susan Vida, Montréalaise polyglotte qui a mis sur pied sa propre boîte de traduction, il y a quelques années.

Cette femme aveugle parle six langues, fait des traductions, rédige des communiqués pour des entreprises et gère son personnel sans jamais recourir au braille. Elle s'est découragée après un an d'études infructueuses. «Je pouvais m'exercer pendant des heures, mais mon débit de lecture n'accélérait pas. Finalement, je me suis dit que j'en avais assez avec les six langues que j'ai apprises...»